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dimanche 11 mai 2014

En territoire ami





Je termine En territoire ennemi,  le beau livre de M. Didier Goux. Si j’ai mis tant de temps  à le lire, c’est que c’est plus un livre de chevet dont on lit avec plaisir quelques pages avant de s’endormir d’un sommeil apaisé qu’un thriller  que l’impatience pousse à dévorer afin d’en connaître le dénouement. C’est un ouvrage  qui se déguste, qui se sirote doucement,  comme un cognac hors d’âge. Pour ceux qui l’ignoreraient encore, il s’agit d’un recueil de billets de ce blog sans lequel la réacosphère perdrait en style comme en narquoise profondeur.

Faire l’inventaire des sujets traités serait impossible. Il en va de ce livre comme de la Grèce de Kharlampy Spiridonovitch Dymba, personnage de  La Noce, farce en un  acte de Tchékhov, à qui le maître de maison tente vainement  de faire avouer que certaines choses ne se voient pas en son pays : on y trouve TOUT. Du moins, tout ce qui compte. Vous aimez qu’on évoque les cocus, les zombis, les clowns, les gitanes, la lettre X, les morts, le désert, les guillemets, les discours, l’adjectif, le kebab, le communisme, les médecins ? C’est votre livre ! Vous aimez la musique, les films, les romans ? C’est votre livre !  Vous ne tombez pas raide d’admiration dès qu’un « progressiste » émet une ânerie ? C’est votre livre ! Vous pensez que tout n’était pas pire avant ? C’est votre livre !

Il ne suffit pas cependant de traiter des sujets qui réjouissent l’âme réactionnaire, encore faut-il le faire avec talent. Et de talent, M. Goux est éminemment pourvu : un style impeccable au service d’une langue alerte, riche et sure, un humour léger, un flair infaillible  pour dénicher  le ridicule d’un discours ou d’une situation, une vaste culture, une sensibilité que tente maladroitement de masquer un cynisme affecté sont, entre autres, les ingrédients qui concourent à son excellence.

On n’est pas obligé de partager l’idée, pas toujours subliminale, qui sous-tend ces textes à savoir  que nous vivons les derniers instants d’une civilisation moribonde. Ou que tout était mieux avant. Le regard que Didier Goux pose sur notre temps est souvent nostalgique, rarement, et c’est là un  euphémisme, optimiste quant à l’avenir mais il est lucide et l’humour vient toujours tempérer l’amertume de son constat. Plus que désespéré, M. Goux est désabusé : il se refuse  à prendre pour argent comptant la fausse-monnaie « modernoeuse » qu’on essaie abusivement de nous fourguer à longueur d’ondes, d’images et de discours. On ne saurait lui en vouloir…

Je conseillerai donc ce livre à tout lecteur lucide. Je n’irai pas jusqu’à prôner sa lecture aux  progressistes rabiques que trop de préjugés font condamner toute voix discordante dans un concert qu’ils ne supportent qu’unanime…

13 commentaires:

  1. Je vous remercie vivement de n'avoir pas dévoilé à vos lecteurs qui est le coupable et la manière dont mon détective s'y prend pour le confondre.

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    1. J'ai également évité d'évoquer la mort de la maman de Bambi parce que c'est trop triste !

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  2. Robert Marchenoir11 mai 2014 à 15:24

    On y trouve TOUT. Du moins, tout ce qui compte.

    Ouais, ouais, ouais... Je suis sûr qu'on n'y parle pas trop de vis Bricorama, dans ce livre.

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    1. Sans vouloir aggraver mon cas, je crois bien qu'il n'y est jamais question d'Ikéa non plus…

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    2. Oh (comme disait l'Edouard de René de Obaldia), en cherchant bien...

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    3. Robert Marchenoir12 mai 2014 à 20:50

      J'en profite pour signaler aux foules impatientes l'ouverture du musée Ikea.

      De même, c'est bien joli ce blog consacré à la plomberie, mais avez-vous jamais essayé un blog d'étagères ?

      Egalement pour amateurs : les musées les plus ennuyeux du monde.

      Parmi lesquels la France s'enorgueillit de compter le musée du papier peint.


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  3. Je partage tout à fait les avis de Didier Goux...en gros s'entend. A tel point que je me demande comment il parvient à trouver un éditeur, ça tient du miracle.
    Amitiés.

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    1. Certains miracles s'expliquent : on peut connaître l'éditeur, ce dernier peut avoir des idées pas trop éloignées de celles qu'on professe...

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  4. Les derniers textes à l'eau de rose me pompent l'air.
    jard

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    1. Il est difficile de tout aimer. Je donne une impression générale. Il est des auteurs ou des musiques auxquels je suis hermétique...

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    2. Ce sont plutôt les chroniques musicales -hormis les Grands boulevards, que j'ai relu avec le même plaisir- qui m'ont le moins intéressé. Rétrospectivement, et sans l'avoir sous la main pour le vérifier, les derniers chapitres ressemblent davantage à des coups de pied au cul.

      Je crois que je vais apprendre par cœur La pluie, je crois. Je devrais logiquement finir de toutes façons par le connaître, à le lire et le relire.

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    3. "Je crois, [...] je crois." c'est Alzheimer, mon vieux !

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    4. Magnifique texte que "La pluie". Comme vous, étant peu amateur de musique, les billets à elle consacrés ne provoquent pas mon enthousiasme...
      Pour Alzheimer, vous me semblez bien jeune ...

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