Ah, l’Espagne, ses corridas, ses ensorcelantes Gitanes
(auxquelles j’ai cependant un temps préféré les Gauloises disque bleu filtre), son
Benidorm, ses tapas, ses jambons, son Julio (pas le mois, Iglesias), son Aragon
(sans Elsa, il est plus rigolo), ses Castilles (la vieille et celle de
rechange), son Andalousie, sa sangria ! Quel pays de cocagne ! Que viva España, Vous écriez-vous tandis que
résonnent les trompettes des bandas !
Eh oui, mais il y a la carte postale et la réalité. Car qu’est-ce
que l’Espagne sinon une Italie surnuméraire ? Était-il indispensable qu’un
tel doublet existât ? Tout être sensé répondra que non. Seulement les
quarante-sept millions de déshérités qui peuplent ce malheureux pays ne le sont
pas tous. Sa forme générale, quasi-carrée, si on y inclut le Portugal comme le
fit un temps le bon roi Philippe II, est
une insulte au bon goût lequel requiert que tout pays digne de ce nom s’inscrive
approximativement dans un hexagone. Et puis toutes ces montagnes, est-ce bien utile ?
Le pays est, sur trois de ses côtés (si comme il siérait on y annexait le Portugal)
cerné d’une quantité d’eau saumâtre, pompeusement nommée mer ou océan, avec laquelle ne saurait aucunement rivaliser
le peu d’eau douce que charrient des fleuves sans grand intérêt, surtout quand
on réalise que ladite eau court se mêler à la mer (ou à l’océan) sans en faire
baisser notablement la salinité.
Retracer l’histoire de l’Espagne en quelques lignes serait
une gageure. Nous n’évoquerons donc que quelques points important. A la période
préhistorique, le pays était bien moins peuplé. Des êtres frustes s’amusaient à
y faire des gribouillis dans des grottes comme à Altamira. Longtemps dominée
par les Romains (dont ils adoptèrent, sans trop la modifier, la langue, ce qui,
comme signalé plus haut en fait des sortes d’Italiens), ils furent ensuite en
proie aux invasions barbares, notamment celle des Vandales qui selon une
étymologie douteuse auraient donné son nom à la vaste Andalousie. Je n’en crois
rien. Baptiser un pays du nom de voyous qui cassent tout demande un sens du
pardon que le vindicatif Ibère ignore. Au début du VIIIe siècle, des Arabes et
autres Berbères s’emparèrent d’une grande partie du pays avant de se voir
progressivement repoussés par une Reconquista qui s’étendit sur quasiment huit
siècles puisqu’elle ne s’acheva qu’en 1492.
Notons au passage l’indolence de l’Espagnol si on le compare à l’Étasunien
qui reconquit une surface bien supérieure en moins d’un an. Cette même année un
Génois nommé Christophe Colomb (encore un Italien !) découvrit par hasard l’Amérique et, au lieu de
se la garder en amorça la conquête au nom des rois d’Espagne. Comme par un vol
de gerfauts hors du charnier natal, il fut suivi de quelques conquistadors qui
taillèrent à leur roi un immense empire qu’ils pillèrent avec le même
enthousiasme qu’ils en massacraient les autochtones. L’or d’Amérique permit à l’Espagne
de vivre un siècle du même métal. Mais ça ne dura guère, l'Espagnol étant dépensier. Plus tard, la France eut
des vues sur ces terres arides. Ce n’est pas Louis XIV ou Napoléon qui me
contrediront. Le pays continua son chemin cahin-caha, perdant au fil du temps un vaste empire sur lequel, du temps de Philippe II, le soleil ne se couchait jamais (ce qui devait le fatiguer). Les rois se succédèrent jusqu‘en 1931 où une seconde république (vu la brièveté de la première, nous n'avons pas jugé utile d'en parler) tenta de s’instaurer. C’était
compter sans les méchants qui à partir de 1936 se lancèrent dans une guerre civile,sanglante comme on les apprécie, épaulés en cela par les encore plus
méchants Mussolini et Hitler. Au bout du compte, ce furent les méchants qui
gagnèrent et un certain Franco qui, suite au sort malheureux de ses trois co-putschistes,
se trouva à la tête du pays en 1939. Il s’y maintint pendant 36 interminables années de deuil avant
de passer l’arme à gauche et la main au roi Juan-Carlos. Ce dernier abdiqua, il y a quelques jours en
faveur de son fils, un certain Philippe VI.
Voilà, vous en savez bien plus que nécessaire pour briller
dans les salons. Demain nous examinerons l’économie et la pseudo culture espagnoles.