Les jeunes sont intelligents, posés,
réfléchis riches en expérience et porteurs d'avenir. Les vieux
sont idiots, un peu fou-fous, spontanés, n'ont en guise
d'expérience que des souvenirs brouillés et ne rêvent que du
retour à un passé largement fantasmé. C'est pourquoi la brillante
jeunesse Britannique a voté en faveur du Remain quand sa
folle vieillesse a rejoint en masse le camp du Leave.
D'ailleurs si on en croit Le Monde, quotidien de référence
dont l'objectivité ne saurait être mise en doute, nombre de vieux
irréfléchis regrettent déjà un vote dont leur folie ne permettait
pas d'envisager les apocalyptiques conséquences que l'on constate.
L'Union Européenne est notre seule
planche de salut. Si nous voulons continuer de jouer un rôle dans le
monde de demain, face aux géants émergents que sont la Chine,
l'Inde ou le Vanuatu, ce sera au sein d'un état supranational, seul
capable de nous apporter paix, prospérité et bonheur. Pour cela, il
faudra oublier des cultures nationales millénaires qui ne nous ont
apporté que deuil, conflits et misères. L'UE, c'est un peu comme
une omelette : pour y parvenir, il faut d'abord casser ces œufs
que sont les États-Nations, bien les fouetter pour qu'ils
s’homogénéisent et une fois cuite, on s'en régale. Comme elle
est synonyme de paix, elle n'a pas besoin d'armée surtout quand
elle est déjà à l'abri de toute menace, protégée qu'elle est par
le parapluie que ses généreux amis Étasuniens lui offrent dans le
cadre de l'OTAN. Pour ne pas partager cette vision, il faut être un
vieux (ajouter con à ce dernier terme serait pléonastique,
cf.supra)
Ces questions réglées, venons en aux
vrai problème de notre époque à savoir la corrosion des tuyaux
d'acier. Comme tout un chacun, vous avez fait l'emplette du
placoplâtre, de la laine de verre et des montants et rails
nécessaires à l'isolation de vos murs. Pour entreposer tout cela,
il vous a fallu ranger un peu le sous-sol et que remarquez-vous ?
Un sac poubelle empli de gravats que vous aviez pour ce faire déplacé
est tout trempé ! Bien que vieux, les quelques neurones qui
vous restent vous font lever les yeux et constater que des gouttes
s'échappent d'un morceau de tuyau rouillé que dissimule en partie
le conduit en Évérite de la cheminée de l'antique chaudière à
air pulsé. Ainsi s'explique la grosse tache d'humidité que vous
aviez remarquée précédemment et que vous attribuiez abusivement à
ces pluies torrentielles qui avaient égayé notre printemps.
Alléluia, vous exclamez vous in petto ! Point d'infiltrations,
juste un petit bout de tuyau et Bob sera votre oncle (expression
que j'emprunte à nos amis britanniques et qui traduite moins
littéralement signifie « le tour est joué »).
Eh, oui, vous oubliez votre vieillesse et son inconscience !
Armé d'une masse vous cassez le tube dissimulateur vous couvrant à
l'occasion de suie et, conséquence redoutée, le goutte à goutte
se transforme en douche. Vous coupez l'eau puis vous ravisez vu
qu'aller à Tulle acheter les nécessaires raccords noir de suie
comme le Petit Savoyard de la chanson* serait indigne et que partant
une vraie douche s'impose. Vous la prenez après avoir disposé un
seau sous la fuite, coupez l'eau, de quatre roues allègres vous
rendez au chef-lieu chez M. Leclerc (bricolage) et guidé par un bon
vendeur afin d'éviter toute erreur en revenez muni des accessoires
idoines. Ce n'est qu'après un frugal repas que vous constatez qu'en
fait vos raccords sont inadaptés et refusent obstinément de
s'introduire dans le tuyau. Vous poncez, éliminez les barbures qui
pourraient expliquer cette résistance, rien n'y fait. Alors, muni de
votre bout de tuyau, vous vous rendez à Treignac voir si des fois le
monsieur du bricolage aurait un plan B à vous proposer vous évitant
ainsi l'épreuve d'un week-end sans eau. Armé de son pied à
coulisse, l'homme arrive à la conclusion que contrairement à ce
qu'un gâtisme normal (cf. supra) doublé d'une absence de ce
précieux appareil vous avaient amené à croire votre tube ne mesure
pas 20mm mais 21 ! Tout s'explique ! Or pour ce diamètre,
pas plus de raccords que de bon sens chez un vieil Anglais. La seule
solution consistera donc à relier directement le compteur à la
partie du réseau d'eau en cuivre. J'achète les raccords souhaités
et au pied du mur je réalise que ça ne va pas être de la tarte :
comme on pouvait s'y attendre ce rattachement au cuivre ne peut
s'effectuer que dans un endroit difficile d'accès. Il me faudra donc
me jucher sur le ballon d'eau chaude après une pénible escalade
afin d'opérer la jonction. Je vous épargnerai les multiples
grimpettes de plus en plus pénibles à mesure que la fatigue
s'installe, les outils qui tombent, la nécessité de percer au burin
un trou dans le mur afin que le PER se trouve en face du raccord
bicone, la pénibilité de ces opérations effectuées dans un
endroit sombre autant qu'inconfortable, la douche due à un joint
défectueux nécessitant un démontage et un remontage du tout et me
contenterai d'annoncer qu'après quelque trois heures d'efforts
soutenus l'eau coulait à nouveau dans les tuyaux. Pour que tout soit
parfait, ne me manquait qu'un raccord en T pour raccorder l'eau
froide à l'évier. Je m'en occuperai demain. Voilà pourquoi, bien
que farouchement anglophile, j'ai eu si peu de temps pour pleurer le
Brexit.
*Mes
vieux lecteurs comprendront l'allusion
Photo
de l'auteur présumé du crime :