..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

mardi 31 décembre 2019

Adieu 2019  et bonjour 2020 !


Sauf incident de dernière minute, je verrai dans quelques heures la fin de 2019. Année qui se termine plutôt bien, vu qu’hier je me suis acheté pour une somme dérisoire une paire de charentaises tout à fait confortables et que ce matin j’ai légèrement modifié la disposition des fauteuils, de la table et du buffet du salon, action qui me comble d’aise. Tout compte fait, et sauf incident de dernière minute comme on ne le dira jamais assez, 2019 s’achève donc de manière superbe si on ajoute aux bonheurs précédents le festin de ce soir en compagnie de ma chère Nicole.

Pourtant, si me venait l’idée saugrenue de classer les années en fonction des mauvais moments passés, sans être la pire, elle serait loin d’être la meilleure. J’ai, deux mois durant été mis quasi hors-service par une hyperthyroïdie carabinée et la mort de Nelly a plongé notre fille dans un profond mal être. Mais tout ça s’est estompé et me voici prêt et gaillard pour relever les défis de 2020. Quels seront-ils ? Je n’en ai pas la moindre idée !

Quoi qu’il en soit, je vous présente à tous mes meilleurs vœux. On dit qu’il ne faut pas le faire avant que le dernier coup de minuit n’ait sonné, que ça porte malheur. Mais vu que je ne suis pas superstitieux et que ma foi en toutes les conneries qu’on me raconte est très limitée, je le fais quand même. Si vous pensez que les accepter risquerait de vous nuire, vous êtes pouvez les refuser sans que je vous en fasse grief.

Donc, je vous souhaite une santé d’acacia (comme disait Anne Sylvestre) et une prospérité méritée (ou pas). Pour le reste, je ne m’avancerai pas trop. Pour le repos des mollets de mes amis franciliens, je ne peux que souhaiter que la grève des transports prenne fin d’une manière ou d’une autre. Je vous laisse, en dehors de cela, le choix de vos vœux qui, malheureusement, ne pourront pas tous se réaliser vu qu’il leur arrive d’être contradictoires. Mais qu’importe ? Quand on jouit d’une bonne santé et qu’on est prospère (yop la boum), le reste, hein ?

PS : Pensez à ne pas dater vos courriers ou vos chèques de cette manière : 01/01/20. Des gens malintentionnés pourraient les anti- ou postdater en 2030 ou 2005 ce qui pourrait vous créer de menues contrariétés. Ça ne se produit qu’une année sur cent-une depuis l’an de grâce 1010 et je doute fort qu’en 2121 vous soyez en mesure de courir ce risque.

vendredi 27 décembre 2019

De l’intérêt de réaliser ses rêves


Rêver, quoi de plus beau ? Mais aussi quoi de pus vain quand on ne passe pas à la réalisation ? Se dire d’une envie ou d’une ambition qu’elle n’est qu’un rêve inaccessible c’est se résigner voire s’enfoncer dans le ressentiment et l’aigreur. Il est évident que certains rêves sont irréalisables (se voir pousser des ailes, se convertir au macronisme, rallier l’Amérique à la nage en quelques heures, manger cinquante kilos de boudin en moins de cinq minutes et remporter le premier prix à la foire de Mortagne, etc.). Tant qu’à rêver, autant le faire en s’assignant des objectifs à sa portée.

Lorsque je fais le bilan de ma vie (on s’occupe comme on peut!), en dehors de quelques remords, je le trouve globalement positif, pour paraphraser M. Marchais quand il évoquait celui de l’URSS. J’ai en effet réussi à réaliser mes rêves qu’ils soient petits, moyens ou grands. Je ne parle pas de vagues velléités mais d’envies récurrentes.

Adolescent, je rêvais de passions amoureuses avec, de préférence, de jeunes et jolies femmes. J’étais alors un petit gros. Ça ne semblait pas gagné d’avance… Et pourtant, quand j’y repense, je peux dire que la vie m’a plutôt gâté de ce point de vue.

Une ex m’ayant fait ressentir mon infériorité en matière de diplômes, grâce à des concours, je me mis à les collectionner.

J’avais envie de gagner de l’argent, et beaucoup si possible. J’y suis, un temps, parvenu et ai pu goûter aux avantages comme aux limites des grandes tables, des beaux hôtels et des grosses voitures.

Mon second beau-père m’ayant initié au bricolage, je me lançai dans la transformation de taudis en demeures agréables. J’en suis à la cinquième.

Il y a trente ans de cela, la mort dans l’âme, je quittai la Corrèze dont j’étais tombé amoureux pour Londres. Depuis quatre ans, j’y possède une maison.

Plus que d’un emploi stable et d’un lieu où m’enraciner, je rêvais de changements de lieux et d’activités. J’ai vécu en nomade.

En gros, j’ai fait ce que je voulais. Et j’en ai tiré la leçon : ce qui compte, pour moi, plus que le lieu à atteindre, c’est le chemin. Bien sûr, sans désir de connaître le premier pourquoi se mettrait-on en route ? Il faut aller voir, satisfaire sa curiosité et celle-ci satisfaite passer à autre chose. Ça met à l’abri des regrets, des envies, des frustrations.Ça permet surtout, le rêve réalisé de relativiser son importance.

Peut-être pour cela faut-il une certaine forme d’esprit, un goût certain du risque. Mais si la sédentarité ne dit rien au nomade, pourquoi le sédentaire rêverait-il de mouvement ? Chacun son destin et les vaches seront bien gardées !

samedi 21 décembre 2019

Le modèle français


Notre chère gauche et nos non moins chers syndicats nous rebattent les oreilles avec un soi-disant modèle français qu’il est urgent de préserver et que le monde est censé nous envier.

Avant d’aller plus loin, il est intéressant de rappeler les différentes acceptions du mot modèle. Pour premier sens, nous trouvons « Ce qui sert comme base à l‘imitation ». En second vient « Personne qui pose pour un artiste (peintre ou sculpteur) ». En troisième position arrive « Prototype ». On parle aussi d’un « objet de même forme qu’un objet plus grand ».

Il va de soi que le second sens ne peut réellement s’appliquer au système social de notre beau pays. Car si un sculpteur archaïsant voulait représenter, par exemple, « Le modèle français terrassant la misère », pour incarner cette allégorie, il lui faudrait faire appel à un modèle humain. Pour ce qui est du prototype, il ne me semble pas qu’un système se réclamant du programme du Conseil National de la Résistance, vieux de soixante-quinze ans et que l’on tente de sauvegarder plutôt que de perfectionner soit d’une nouveauté renversante ou susceptible de précéder une fabrication en série. Quant à le qualifier de modèle réduit, ce serait lui faire offense.

Nous reste donc le sens premier. Et là, ça ne semble pas coller tout à fait. Il semble que rares soient les pays qui tentent de copier notre modèle. A cela, des explications peuvent se trouver. Championne du monde des prélèvements obligatoires, connaissant un taux de chômage très élevé, étant paralysée tous les trois quatre matins par des conflits sociaux menés par des syndicats cryptocommunistes aux effectifs réduits quand elle n’est pas agitée d’émeutes destructrices, on voit mal comment la France pourrait provoquer chez ses voisins et ses concurrents une irrépressible envie de l’imiter. Un modèle ne peut l’être que s’il fonctionne. Et il ne semble pas que ce soit vraiment le cas du nôtre.

J’en voudrais pour exemple la grève de nos sympathiques cheminots et RATPistes qui provoque quelques menus troubles dans la circulation des personne et des biens en ce moment. Celle-ci est supposée être soutenue, selon les sondages par une majorité de Français. Lesquels verraient dans les héros du rail de braves gens qui se battent pour eux. On parle de grève « par procuration » : ne pouvant faire grève eux-même parce qu’ils n’en ont pas les moyens, l’envie ou le temps, ils chargent des êtres d’exception de combattre pour eux. Ce qui est amusant, c’est que cette « procuration » est également donnée par le personnel de la SNCF, en large majorité non gréviste, aux super-héros que sont les conducteurs de train. Or un train sans conducteur ça pose problème. Au bout du compte, quelques milliers d’employés, bénéficiant probablement de cagnottes mises de côté à cet effet et bénéficiant du soutien ou de la compréhension de millions de gogos, sont en mesure de troubler gravement les transports du pays. Je serais prêt à parier que si demain le premier ministre déclarait « Mes chers CGTistes de la SNCF, mes adorés Sudistes du même tonneau, je vous ai compris, et je maintiens votre statut jusqu’à la fin des temps, voire davantage. » la grève s’arrêterait immédiatement et les donneurs de « procuration » seraient gentiment priés d’aller se faire voir chez Plumeau.

Pour résumer, notre modèle-qui-n’en-est-pas-un a été mis en place et est maintenu en réanimation par les tenants d’une idéologie qui, sous prétexte de défendre les droits de tous, tentent à tout prix de maintenir leurs propres avantages. Et qu’importent le chômage de masse, les dommages causés à l’économie du pays et à la paix publique quand la cause est noble ?

mardi 17 décembre 2019

Recyclage



Allez savoir pourquoi, hier, je me suis demandé si le défunt site « Aux amis de Romain Gary » au forum duquel je participais et pour lequel j’écrivis quelques textes, voici une quinzaine d’année,  n’aurait pas par hasard ressuscité. Je fis une recherche Google et ne  trouvai qu’une coquille quasiment vide. Toutefois, à la rubrique «Rencontres avec Gary...» se trouvait un texte par moi écrit narrant comment, à une époque peu faste de ma vie, j’avais re-découvert cet auteur. J’y donnais quelques citations extraites de L’angoisse du roi Salomon, livre que j’ai lu, relu et re-relu maintes et maintes fois.  Je reproduis ici ce texte avec l’espoir qu’il saura susciter chez certains l’envie de lire ce roman.

Parfois la vie se fait taquine. Longtemps vous vous étiez cru maître des choses et du destin et vous voilà bouchon jeté au gré des vagues d'une mer en furie contre les brisants. Et les brisants, ça casse. Vous échouez enfin, bouchon écorché de partout, sur une plage solitaire, inhospitalière… Un désert, humide et glacé.

Trêve de métaphores. J'allais sur quarante ans. Très allégé. Dans ma chambre meublée à Londres, je pouvais faire le bilan. Envolés veaux, vaches, cochon couvée, famille, foyer, amour, patrie. De l'autre côté, la vie devant moi… La vie comme on la voit quand on est fracassé et qu'on se doute que tous les whiskies de l'Ecosse ne seront remèdes que le soir et catalyseurs d'angoisse au matin.

C'est alors que j'ai rencontré Gary. Pour de bon. Je le connaissais déjà, bien sûr. J'avais goûté son humour. Comme on fait dans le confort, en esthète. J'allais le découvrir mieux. Car il y avait dans mon livre de chevet d'alors des phrase à vous requinquer le bouchon . A vous défracasser le bonhomme :

« Il s'est tu, pour m'encourager, car,des fois, la pire des choses qui peut arriver aux questions, c'est la réponse »

« Il a même réussi à empêcher une fille de se suicider, en lui prouvant que ce serait encore pire après. »

« Ils parlaient ensemble de la sagesse orientale qui leur est d'un grand secours, là-bas, quand on ne les a pas tués avant »

« Vous avez un sens aigu de l'humain, mon petit et c'est très douloureux. [...] Vous auriez fait autrefois un excellent missionnaire… au temps où on les mangeait encore. »

« Il faut prendre les choses du bon côté, mademoiselle Cora, sauf qu'on ne sait pas toujours lequel c'est. Ça ne se voit pas très bien... »

« Elle a recommencé à sangloter. C'était peut-être parce que le champagne s'est arrêté et l'a laissée seule. »

« Il paraît qu'ils ont des écoles de clowns en URSS où ils vous apprennent à vivre. »

« Il n'y a rien de pire pour un malheur que de manquer d'importance. »

« - Un brave homme, un brave homme ! répéta monsieur Salomon à deux reprises, pour mieux se contredire.
– Oui, c'est un méchant con, reconnus-je. »

« Le stoïcisme, c'est quand on a tellement peur de tout perdre qu'on perd tout exprès, pour ne plus avoir peur. »

Je vous en passe des dizaines, des centaines, aussi bonnes mais qui ne concernaient pas la situation. Celles-là parlaient à mon mal-être.

Une bonne mécanique : on avance une platitude qu'on plastique d'un paradoxe, grinçant de préférence. Et voilà le malheur qui sourit ou le bon sens qui perd les pédales. On relativise, ça fait chaud : on n'est pas seul.

On est sur le fil, sans balancier et le pied pas bien assuré. Ben, ces petites lueurs ironiques, ça fait des points de repère. On avance… On a beau savoir que le funambule en chef , un jour de stoïcisme (ça tombe souvent le 2 décembre, le stoïcisme) s'est fait un croche-pied, ça ne change rien. C'est les risques du métier. Si personne ne croyait en la possible chute, pas de public, pas d'artiste. C'est comme ça.

Les belles leçons, les meilleurs aphorismes, ça ne vous remet pas à neuf. Mais ça aide à faire un petit pas en avant… Et comme dit si bien la chanson : « La meilleure façon de marcher, c'est encore la nôtre, c'est de mettre un pied devant l'autre et de recommencer ».

Ainsi, de petit pas en petit pas, on finit par atteindre le bout du fil. On abandonne le funambulisme pour la terre ferme. On se refait une existence, plusieurs si nécessaire. Et revenu le confort, on redevient esthète. Mais on n'oublie pas.

Voilà ce qu'a été et reste pour moi Gary : un faiseur d'étoiles dans la nuit.

Je ne suis pas fan. Je n'aime pas tout. Je ne le suis pas dans bien des envolées. Les pieds sur terre, j'ai vite le vertige. Mais comme Brassens c'est un compagnon à qui je suis fidèle. Fidèle au rire doux-amer dont ils ont su parer leur angoisse… et, accessoirement, ma vie.

dimanche 15 décembre 2019

Merci M. Delevoye !



Depuis quelques jours, M. Delevoye est la cible de bien des critiques amères ! Qu’il en soit remercié ! Il faut bien que haines et envies se trouvent un objet. Ne pas leur en fournir serait cruel. En effet, faute d’objets, haines et envies tournent en rond et le fiel qu’elles secrètent, faute d’exutoire, stagne et pourrit les âmes des braves gens. Vu que tout le monde n’a pas la chance d’avoir une belle sœur, un frère une tante, des voisins ou un cousin sur qui s’en soulager totalement, il est normal que des personnages publics viennent compléter ce rôle salutaire. Haine et envie se nourrissent l’une de l’autre et tel un Moloch bicéphale et insatiable réclament sans cesse de nouvelles victimes. Dieu merci, des media aussi bien intentionnés qu’attentionnés les lui fournissent et renouvellent !


Que reproche-t-on à cet homme ? En gros de cumuler des postes d’administrateur ou autres dans une multitude d’organismes, lesquels seraient susceptibles de provoquer des conflits d’intérêt et aussi, du fait de ses mandats et fonctions diverses, de collectionner les grasses retraites tout en exhortant le petit peuple à accepter des pensions de misère. Avide d’argent, forcément malhonnête et corrompu, menteur hypocrite et sans cœur il tutoie la perfection !

Que M. Delevoye, ancien ministre, ancien médiateur de la république, ancien président de l’association des maires de France, ancien médiateur de la république, ancien député, ancien sénateur se voit plus souvent que moi offrir un siège au conseil d’administration de tel ou tel organisme n’a rien de surprenant. Bien des élus de moindre graisse sont dans son cas, comme le sont nombre de personnes à la fortune conséquente. Que ce soit pour leur prestige et/ou pour leur influence, on les recherche. Qu’ils jouent, au sein de ces dits organismes un rôle prépondérant ou qu’ils en retirent de grasses rémunérations n’est pas toujours et cas. Et quand c’est le cas, qu’importe ?

Que M. Delevoye, ancien ministre, ancien médiateur de la république, ancien président de l’association des maires de France, ancien député, ancien sénateur, ait droit, conformément aux règles en vigueur de bénéficier de retraites me paraît normal. Que ceux que ça choque s’arrangent pour devenir ministres, médiateurs de la république, président de l’association des maires de France, députés, sénateurs ou papes*, si la blanche soutane est à leur goût ! 

Cette indignation m’indignerait si j’étais de nature à m'indigner et cela d’autant plus quand les indignés se proclament de droite voire réacs. L’égalitarisme forcené, la haine née de l’envie, sont le fond de commerce des gauchistes. Il serait malhonnête de leur voler une part de ces gâteaux !

*A tous ceux que les avantages supposés d’autrui dérangent et qui, comme moi, ne sont pas papes, je dédicace ce grand moment des Deschiens : https://www.youtube.com/watch?v=qRJIrY2bHfA

vendredi 13 décembre 2019

Histoire locale

La fontaine dont il sera question. Ses blessures ne sont pas dues à l'indignation citoyenne mais à la contre-attaque allemande d'août 1944 qui détruisit en grande partie la ville.


J’habite avenue Bernardin Le Neuf. En fait tout le monde ici l’appelle avenue Bernardin. L’adjonction de Le Neuf présenta pour moi une énigme jusqu’à ce qu’hier, ma chère Nicole attirât mon attention sur un article de presse parlant de Sourdeval. Le fils d’un gendarme qui avait, dans les années 50 exercé dans cette bonne ville, curieux d’histoire et peut-être nostalgique, avait retrouvé l’ancienne gendarmerie et y avait remarqué sur une pierre une inscription dont l’usure et les lichens ne laissaient plus lire que le dernier mot : Sourdeval. Désireux d’en connaître plus, il fit des recherches sur le Net et trouva, dans Gallica, l’ouvrage d’un historien local où apparaissait in-extenso les mots de l’inscription en question : « 1733, j’ai été posée par Mr Gabriel de Monteney le Neuf, Sr de Sourdeval ».

la pierre en question


 Ma curiosité en fut piquée et je parvins à retrouver l’ouvrage en question. C’est là que j’en appris davantage sur la famille Le Neuf. De vieille noblesse, les Le Neuf étaient seigneurs de divers endroits et couramment appelés de Montenay Le Neuf. Gabriel eut cinq enfants dont quatre fils. L’aîné mourut jeune, le second,Pierre-Gabriel-Louis, lui succéda, le troisième fut prêtre et entre autres titres chanoine de Bayeux et abbé-commanditaire de l’Abbaye Royale de la Prée. Le quatrième, Louis-Bernardin Le Neuf de Sourdeval embrassa la carrière militaire et s’illustra dans la Marine Royale au point qu’en 1764, après qu’il eut épousé sa nièce, fille de Pierre-Gabriel-Louis de vingt-cinq ans sa cadette, le roi Louis XV le fit comte de Sourdeval-Le Neuf. Je tenais mon Bernardin Le Neuf !



Le pauvre Bernardin connut une bien triste fin. Accusé de complicité avec la complotiste Elisabeth, sœur du ci-devant roi Louis XVI, il fut jugé par le tribunal révolutionnaire en compagnie de 24 autres criminels le 10 mai 1794 qui, après une interminable délibération de 25 minutes, les condamna tous à mort, exécution qui eut lieu le jour même. Madame Elisabeth se vit offrir le privilège d’assister à l’exécution de ses coaccusés avant qu’on lui tranchât la tête. L’aimable Fouquier-Tinville, accusateur public de son état, s’étonna auprès du président René-François Dumas de ce que cette dernière n’ait formulé aucune plainte à l’énoncé du verdict. Le brave juge lui fit cette réponse toute empreinte de bonhomie républicaine : « De quoi se plaindrait-elle, Elisabeth de France ? Ne lui avons-nous pas formé aujourd'hui une cour d'aristocrates dignes d'elle ? Et rien ne l'empêchera de se croire encore dans les salons de Versailles, quand elle va se voir, au pied de la sainte guillotine, entourée de toute cette fidèle noblesse* » .

L’acte d’accusation ne consacrait que quelques lignes au comte de Sourdeval Le Neuf. Je vous les retranscris. «  Sourdeval, ex-comte, lié avec la femme Sennozant partageait sa haine pour la révolution. Il s'était établi à Caen en 1791, au moment où se préparait la contre-révolution, dont il a été l'un des agents, et il ne s'est retiré de cette ville que pour se soustraire aux poursuites faites contre les conspirateurs. Il avait excité contre lui, par sa tyrannie et son oppression, l'indignation des habitants de Sourdeval. Enfin, tout donne lieu de croire qu'il avait des relations intimes avec d'Aligre, et qu'il entretenait des correspondances avec ce conspirateur, et avec Vibraye et La Luzerne, émigrés, gendres d'Angran d'Alleray, aussi frappé du glaive de la loi, chez lequel il s'est réfugié longtemps, de son propre aveu » . Tout donne lieu de croire ! Si ce n’est pas une preuve accablante, ça !

Au jury, on posa la question suivante : « II a existé des complots et conspirations formés par Capet, sa femme, sa famille, ses agents et complices, par suite desquels des provocations à la guerre extérieure de la part des tyrans coalisés, et à la guerre civile dans l'intérieur, ont été formés; des secours en hommes et argent fournis aux ennemis, des intelligences criminelles entretenues par eux, des troupes rassemblées, des chefs nommés, des dispositions préparées pour assassiner le peuple, anéantir la liberté et rétablir le despotisme.Chacun des accusés est-il coupable de ces complots? » 

Il va sans dire qu’au cours des vingt-cinq minutes de délibération , le cas de chacun des vingt-cinq accusés fut examiné avec attention et que, comme tout donnait lieu de croire qu’ils avaient tous participé aux complots visant à rien moins qu’assassiner le peuple, on ne pouvait que les condamner. Heureux temps où la justice ne gaspillait pas son temps en vaines palabres et où le combat contre la tyrannie exigeait qu’on exécutât par pleines charretées les ennemis de la liberté !

L’indignation que l’érection d’une fontaine publique surmontée d’un obélisque (encore existante) aux frais du comte et le don des cloches qu’il fit à l’église dut à un moment se calmer et les Sourdevalais, mauvaises têtes mais bons cœur, oublièrent sa tyrannie et son oppression au point qu’on donnât à l’une des artères principale de la petite ville le nom du malheureux comte !

*Il était indéniable que M. De Sourdeval Le Neuf était en excellente compagnie !




mercredi 11 décembre 2019

Cascade


Hier matin, je fus à Vire pour des courses. Il se trouve que ma rue fait, depuis quelques jours déjà l’objet de travaux de terrassement qui la mettent en circulation alternée et qui y prohibent le stationnement. Il s’agirait, selon le chef de chantier auprès duquel je fus m’enquérir, de raccorder les maisons d’en face à la nouvelle conduite qui se trouve de notre côté. Ça ne m’a pas tout à fait convaincu. Pour moi, ces travaux n’ont pour but que de nuire à ma qualité de vie tout en faisant croire au contribuable que son argent est utilisé utilement. Le fait que très rapidement ils entreprennent de reboucher les trous prouve leur totale inutilité.

Je m’arrangeai donc pour revenir de chez M. Leclerc passé midi de manière à pouvoir décharger mes emplettes sans risquer de me trouver coincé devant chez moi, comme hier, par un des ces gros engins dont ils se servent pour nous casser les oreilles. Mes courses rentrées, je pris la sage décision d’aller garer ma voiture sur la place voisine. Sortant dudit véhicule une chose incroyable se produisit. Un homme d’un certain âge s’approcha de moi, me salua en me tendant une main, que, ne voyant quoi faire d’autre, je serrai. Un autre s’approcha et en fit autant avant de dire: « Bon, faut qu’on y aille !». J’en restai comme deux ronds de flan. Il s’agissait probablement d’une méprise sur la personne mais voir deux Normands non seulement me saluer mais me serrer la main avait quelque chose d’inédit.

Troublé par cette étrange aventure, je pris néanmoins d’une démarche alerte la direction de ma maison à quelques pas de là. Ayant traversé la route, et atteignant le trottoir, je ne vis pas un de ces boudins remplis de sable à l’aide desquels les gredins fouisseurs du BTP empêchent que leurs panneaux d’interdiction de stationner ne soient emportés par les bourrasques automnales. S’ensuivit, vu mon pas décidé, un vol plané qui se termina par un atterrissage un peu rugueux sur le macadam du trottoir. Je me relevai sans problème tandis qu’un automobiliste ayant vu la scène se précipita vers moi pour s’enquérir de mon état à plusieurs reprises. Je le rassurai. Tout allait bien.

Je venais de faire une intéressante découverte : sans m’en douter, j’étais doué pour les cascades ! A part une douleur costale tout à fait supportable* et un léger saignement à la main droite, j’étais indemne. Tout ça sans entraînement ! Rentré chez moi, je me pris à rêver que j’étais peut-être passé à côté de ma vocation : celle de roi de la cascade, j’aurais pu devenir l’Inspecteur Derrick, le Horst Tappert français ! Mais il est un peu tard pour m’y mettre sérieusement, hélas...

* Je dois admettre que cette douleur costale, une fois couché, s'aggrava et que j'eus bien du mal à trouver une position qui la fît disparaître, d'où mauvaise nuit. Mais qu'importe, en trois semaines, une côte fêlée, ça s'arrange...

lundi 9 décembre 2019

L’engueulade familiale



Je ne suis, n ‘ai jamais été, et il y a de moins en moins de chances pour que je devienne un jour ce que l’on appelle un sportif.Toutefois, il est un sport que je pratique parfois et dont je m’étonne qu’il ne soit pas une discipline olympique vu son nombre d’adeptes : l’engueulade en famille. Il faut dire qu’il existe diverses explications à la raréfaction des occasion que j’ai de jouir de cette innocente distraction familiale. Le décès de mes parents en est une. Ma mère nous ayant quitté, selon elle, pour un monde meilleur il y a trente cinq ans, les réunions familiales se firent plus rares et sans l’ardeur qu’elle mettait à y faire monter le ton, elles avaient beaucoup perdu de leur vigueur. Malgré les efforts méritoires de mon frère aîné pour provoquer l’ire de mon père, ce n’était plus ça. Ce qui a le plus nui à ma pratique est ma tendance de plus en plus marquée à éviter toute réunion familiale. Depuis la mort de mon père, avec qui j’avais fini par m’entendre très bien, plus question d’assister au moindre mariage, baptême, communion ou funérailles. Au début, on insistait pour que j’y assiste et puis, avec le temps on a compris et si on m’invite encore, c’est uniquement pour la forme.

En dehors de quelques neveux et nièces que je n’ai jamais beaucoup fréquentés et des nombreux cousins que je ne vois plus depuis des décennies parce que, la vie, c’est comme ça, j’ai pour toute famille deux frères et une fille. Vu que j’adore cette dernière et que nous nous entendons à merveille, les chances de disputes sont inexistantes. Lors des rares rencontres avec mon plus jeune frère, nous évitons les rares sujets qui fâchent et tout se passe bien. Il ne me reste donc, pour m’adonner à l’engueulade familiale, que mon frère aîné.

Et avec lui, je ne suis jamais déçu. Il se trouve qu’ayant fait de mauvaises rencontres dans sa jeunesse et qu’étant de nature fidèle, il est de gauche. Pas d’une gauche modérée, limite centriste, non, d’une gauche radicale tendance écolo. Ce que M. Le Pen appelait une pastèque : vert à l’extérieur et bien rouge en dedans. Ce qui a pour conséquence que la plupart des sujets sont, vues nos positions respectives, susceptibles de fâcher. C’est pourquoi, il est très rare que nos rencontres, après un début paisible, ne tournent à l’affrontement verbal. C’est un peu comme sur un terrain miné : où qu’on pose le pied, l’explosion menace et comme en l’occurrence le terrain est densément miné, il faut une chance extraordinaire pour le traverser sans encombre.

Ces anicroches ne parviennent pas réellement à entamer ma bonne humeur. Bien sûr, les voix montent, les remarques peu amènes pleuvent, mais je vois davantage cela comme les étapes obligées d’un rite. Vu que les points de vue sont totalement irréconciliables et qu’aucun des participants ne risque de convertir l’autre, il ne peut y avoir ni gagnant ni perdant dans ce qui, au fond, n’est qu’un jeu sans véritable enjeu.

Bien sûr, on pourrait se dire que l’harmonie serait préférable. Mais autant regretter qu’il y ait tant d’arêtes dans le bar et si peu de soleil en Normandie...

dimanche 1 décembre 2019

Hachis Parmentier


Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis, je l’ai déjà dit, on se mitonne un pot au feu. Y’a pas à revenir là-dessus. Seulement, et quel que soit le plaisir qu’on en tire, on ne peut pas passer sa vie à en manger. Comme disait Houdard de la Motte (ou Émile Louis, je confonds toujours les deux) : « L’ennui naquit un jour de l’uniformité ». Que faire du reste de bouilli se demande le béotien tandis que l’homme de culture a la réponse : on fait un hachis parmentier.

C’est donc ce que j’entrepris en ce dimanche matin frisquet où le vent s’acharne à hurler dans les câbles. A l’aide de mon hachoir ancien cri, je hachai donc le bouilli ainsi qu’un gros oignon coupé en quatre :



Pendant ce temps, cuisaient des pommes de terre. Celles-ci cuites, à l’aide de mon presse purée à manivelle (toujours à la pointe du conservatisme!), je les écrasai.


A cette purée j’ajoutai du lait, du beurre et un œuf. On peut y ajouter des dizaines d’autres ingrédients si on tient absolument à se compliquer la vie et obtenir un résultat déplorable. Ensuite, sur une première couche de purée, on étale son hachis que l’on recouvre de purée puis on saupoudre le tout de parmesan, emmental râpé ou de chocolat (pour les malades mentaux).


Dans un four préchauffé à 180°, on place le plat pendant un quart d’heure avant de
faire gratiner le fromage cinq à dix minutes. On en sort ceci :


On s’en sert une part, on se régale et se rit du climat. Simple comme une réforme du français !

vendredi 29 novembre 2019

Vers une vraie réforme.


L’époque est venue où, secouant l’intolérable joug du patriarcat, les femmes peuvent enfin échapper à la domination masculine et ceci grâce à l’infatigable combat des militantes féministes. Dans bien des domaines des victoires éclatantes ont été remportées. Il reste pourtant beaucoup à faire et certaines réformes, si elles offrent une place à la féminisation n’en sont pas moins timides, incomplètes et pour tout dire ne font que perpétuer la domination masculine. J’en veux pour exemple l’écriture inclusive. Je m’étonne que personne ne semble avoir été choqué par ce fait : quand on écrit : « Les éboueur.e.s et les grutier.e.s sont en général.e satisfait.e.s de leur.e sort.e », le e censé représenter la forme féminine du mot arrive APRÈS la forme masculine ce qui laisse, c’est évident, penser que les grutières sont en position d’infériorité par rapport aux grutiers. C’est proprement intolérable !


Seulement existe-t-il une autre solution ? Je pense que oui. Les langues romanes ont pour origine principale la langue latine où existaient trois genres : féminin, masculin et neutre. L’évolution a fait que le neutre a disparu. Notons au passage que suivant les langues le neutre a pu laisser place au masculin ou au féminin. Ainsi en espagnol dit on « el flor » et « el mar » tandis que nous parlons de la mer ou de la fleur. La forme masculine prit le rôle de terme générique ce qui fait que quand je dis que l’homme est un être vraiment mignon cette qualité s’applique également à la femme. Parfois ce rôle est tenu par le féminin ainsi une souris ou une araignée peuvent être mâles. Une estafette ou une sentinelle, avant la féminisation des armées étaient des hommes. Par ailleurs, en dehors de l’opposition homme/femme, il existe des espèces animales ou mâle et femelle sont nommés différemment : coq/poule, sanglier/laie, lièvre/hase, bélier/brebis, etc. Quelle pagaille ! C’est pour remettre de l’ordre à tout ça que m’est venue une idée toute simple et de nature à réparer les injustes brimades faites aux femmes  : donner à tous les noms communs ou propres ainsi qu’à tous les autres mots une seule et même forme, les rendre épicènes. Il va de soi que leur donner la forme masculine serait inconcevable et,en l’absence de neutre, il ne reste qu’une alternative : la forme féminine.

Ainsi, quel que soit leur sexe ou leur genre, tous les anciens humains deviendraient des femmes et tous les moutons des brebis. On pourrait, en cas d’ambiguïté préciser qu’on parle d’une poule masculine ou d’une souris féminine. Par l’adjonction d’un e (quand ils n’ont pas de forme féminine) tous les autres mots (pronoms, adverbes, conjonctions, verbes, etc) seraient également féminisés.

Exemple : Incipit du Voyage au bout de la nuit (Voyage à la boute de la nuite)

Ça a débuté comme ça. Moi, j’avais jamais rien dit. Rien. C’est Arthur Ganate qui m’a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin lui aussi, un camarade. On se rencontre donc place Clichy. C’était après le déjeuner. Il veut me parler. Je l’écoute. « Restons pas dehors ! qu’il me dit. Rentrons ! » Je rentre avec lui. Voilà. « Cette terrasse, qu’il commence, c’est pour les œufs à la coque ! Viens par ici ! » Alors, on remarque encore qu’il n’y avait personne dans les rues, à cause de la chaleur ; pas de voitures, rien.

Ça a débutée comme ça. Moie, j’avaise jamaise rienne dite. Rienne. C’este Arthure Ganate quie m’a faite parlère. Arthure, une étudiante, une carabine elle aussie, une camarade. One se rencontre donque place Clichie. C’était après la déjeunère. Elle veut me parlère. Je l’écoute. « Restonse passe dehorse, qu’elle me dite. Rentronnes ! »Je rentre avec elle. Voilà. « Cette terrasse, qu’elle commence, c’este poure les œuves à la coque ! Viennes pare icie ! » Alorse one remarque encore qu’elle n’ye avaite personne danse les rues, à cause de la chaleure ; passe de voitures, rienne.

Simple comme toutes les grandes idées, non ?

mercredi 27 novembre 2019

A l’infortune du pot (au feu)

Le résultat, après 3 heures de cuisson (30 mn seulement pour les patates). Les poireaux cachent leur honte sous patates et carottes. Ce fut néanmoins excellent.

Quel bonheur ! Faisant l’inventaire de mon congélateur, j’y découvris du plat de côte acheté cet été. Car il faut l’avouer, je suis de ceux qui font leurs courses sans idées préconçues. En dehors des incontournables (sel, beurre, crème, sucre, café, rosé, whisky, vodka, etc.) dont je manque, je fais mon (super) marché à l’ancienne, achetant ce qui m’attire et qui se trouve en promotion. Si le poisson a l’œil d’un Gainsbourg au petit matin, je m’en passe. Si la viande est à un prix réduit pour cause de date courte, j’achète : ça m’évite d’avoir à la laisser mûrir dans le frigo. Tout cela est bel et bon mais a parfois pour conséquence que je me retrouve avec un congélateur rempli de manière à me permettre de soutenir un fort improbable siège.

Du plat de côte, donc, je découvris. Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle sur l’esprit gémissant en proie au longs ennuis et que, pour arranger le tout, souffle un vent à décorner les cocus, quoi de plus consolant que de se préparer un bon pot-au-feu ? Rien, bien sûr. La viande sortie hier soir avait dégelé, j’avais fait l’emplette de navets, oignons et patates chez le bon monsieur Leclerc. Pour le bouquet garni et les poireaux, je comptais sur mon jardin. J’arrachai donc quelques poireaux à une terre que j’espérais généreuse. Grande fut ma désillusion quand vint le temps de l’épluchage ! Mes poireaux, déjà bien frêles par rapport à ceux du commerce, avaient été victimes d’attaques du ver du poireau et une fois que j’eus éliminé les feuilles abîmées, il n’en resta plus grand-chose. Je fis contre mauvaise fortune bon cœur et en ajoutai de nouveaux. Telle est la rançon d’un potager sans engrais ni traitement : des légumes parfois malingres souvent attaqués par nombre de prédateurs (piéride du choux, vers du pois ou du poireau, mulots, cloportes, pour n’en citer que quelques uns). Même si votre récolte est gravement réduite voire totalement détruite, est-ce bien grave ? Non, car, une fois vos pleurs séchés et votre deuil fait, il existe un plan B : acheter des légumes sains dont commerces alimentaires et étals de marchés regorgent. Et pourquoi cela ? Parce que les producteurs, bio ou pas, traitent les leurs. Le traitement est plus ou moins nocif, l’engrais est plus ou moins « naturel » mais sans l’un et l’autre point de beaux légumes en abondance.

Contrairement à ce que pensent certains citadins pour qui faire la différence entre une fourche-bêche et un cacatoès d’Indonésie pose problème, la nature n’est, je me tue à le répéter, ni bonne ni généreuse. Les temps heureux où l’on ignorait tout des traitements et où les apports nutritionnels à la terre étaient réduits étaient aussi ceux des disettes et des famines. Laisser, comme je le fais, faire la nature, c’est s’exposer à des déconvenues. Je ne compte pas pour autant changer de méthode. Pour moi, le potager est un loisir. Une fois les gros travaux terminés, j’y trouve le plaisir innocent des visites du matin où j’observe la croissance de mes semis et plantations, où j’arrache ici et là quelques mauvaises herbes, je récolte des haricots verts ou une courgette, mange au passage une fraise qu’oiseaux, fourmis ou cloportes ont consenti à me laisser. Cette activité, comme tout loisir, n’a pas la rentabilité pour but. C’est un bien modeste luxe et non une façon d’économiser.

lundi 25 novembre 2019

Ma France se meurt ! Ma France est morte !




Bossuet, pour souligner la surprise que créa la mort subite de Madame Henriette d’Angleterre, épouse de Monsieur, frère du roi, duc d’Orléans, prononça au cours de l’oraison funèbre de cette princesse deux phrases célèbres qui inspirèrent mon titre.

Ce triste constat, je l’ai fait depuis longtemps, mais mon séjour à Bellac que je relatais ici avant hier en a avivé ma conscience. Si je parle de MA France et non de LA France, c’est que je ne veux parler que du pays que j’aime et ai aimé et non d’un territoire qui, sauf cataclysme général subsistera quels que soient son peuplement, sa civilisation, sa démographie.

J’ai voulu insister sur la soudaineté de cette disparition mais en fait, le processus de destruction, s’il prend moins de temps que celui de construction, n’est pas pour autant immédiat. Né en 1950, c’est peu à peu que j’ai pu voir les mentalités comme la population changer tandis que moi-même je changeais. Ce point me paraît important à souligner. Bien des « réacs » accusent les autres de tout détruire alors qu’eux-mêmes (et comment pourrait-il en aller autrement?) ont suivi le mouvement qui tendait à effacer la tradition. Par exemple, j’ai été élevé, comme encore beaucoup de ma génération dans un catholicisme plus ou moins fervent (fervent dans mon cas), j’ai ensuite, comme beaucoup d’autres, perdu toute pratique et toute foi. Ça ne m’a pas empêché de me marier à l’église et de faire baptiser ma fille qui, si elle trouve chaussure à son pied, se mariera à l’église. Mais il n’empêche que, si nous restons catholiques de culture et de tradition, nous participons de la déchristianisation. La nature ayant, comme disait l’autre, horreur du vide, comment s’étonner que d’autres croyances (religieuses ou non) s’installent ?

La France que j’aime est rurale. Seulement ses petites villes et villages se dépeuplent inexorablement, leurs commerces ferment, leur habitat se délabre, on n’y croise presque plus que des personnes âgées (dont je suis), les cloches y sonnent plus souvent pour un enterrement que pour un mariage ou un baptême. Sauf miracle ou catastrophe, ces bourgades finiront par disparaître. Qu’y peut-on ? L’emploi se concentre dans les métropoles. Le peu de jeunes qui nous restent vont y travailler. L’e-commerce présente bien des avantages de prix, de commodité comme de rapidité. Pourquoi se rendrait-on à la petite ville voisine pour y faire ses achats quand, de chez soi, on peut obtenir les mêmes produits à moindre prix et qu’ils vous sont livrés rapidement ? Les commerces ferment, les rues commerçantes dépérissent, inéluctablement. On peut toujours dessiner des moutons pour masquer la décrépitude des vitrines et distraire de celle des immeubles. C’est joli, c’est pimpant mais ça ne résout pas le problème.

On ne peut pas avoir le beurre, l’argent du beurre et le cul de la crémière comme il est impossible d’avoir les avantages du « progrès », la conservation du passé et l’idéologie d’hier. Il faut choisir. Le franchouillard se doit de singer le Suédois ou tout être aseptisé de ce genre (ce n’est pas facile avec un pied dans le passé et un autre dans le présent ou un avenir rêvé) tandis que d’autres venus d’ailleurs tout en comptant bien y rester se foutent de la Suède comme des progressistes amerloques .

Qui sait de quoi l’avenir sera fait ? Continuera-t-il sa course effrénée vers un prévisible néant ? Des catastrophes inouïes mèneront-elles à des modifications fondamentales du système apparu ces dernières décennies ? Nul ne le sait. Je mourrai probablement avant d’avoir le loisir d’observer laquelle de ces hypothèses (ou de toute autre hypothèse) se réalisera. Et je n’en suis pas triste.

samedi 23 novembre 2019

Découverte


Selon la sagesse des nations, le hasard fait bien les choses. J’en ai eu une nouvelle preuve pas plus tard qu’avant hier. Quittant le Limousin pour la Normandie je sentis comme une odeur de gazole brûlé dans l’habitacle de mon fidèle break. Je n’y prêtai pas plus attention que cela, pensant que, comme j’avais fait chauffer un peu la voiture avant de prendre la route, cette odeur désagréable s’expliquait par le fait que des gaz d’échappement avaient pu s’y introduire.J’ouvris les fenêtres mais l’odeur persistait. Je mis ça sur le compte d’un problème d’échappement et parcourus ainsi plus de 100 kilomètres quand, approchant de Bellac, charmante sous-préfecture de la Haute-Vienne, se produisit un curieux événement : sans que rien ne l’ait provoqué, mon break fit une embardée vers la gauche que je corrigeai par un coup de volant à droite ce qui provoqua une nouvelle embardée dans la direction contraire. J’eus la très nette impression que j’allais finir dans le décor mais je parvins à reprendre le contrôle et réussis, à faible vitesse ,à rejoindre un proche parking. Allez savoir pourquoi la voiture qui me suivait ne tenta pas de me dépasser. Les gens sont parfois étonnants. Je descendis de la voiture,  allai vérifier que mon pot d’échappement était bien en place puis ouvris le capot et découvris l’ampleur des dégâts. Un liquide continuait d’inonder le moteur dégageant une désagréable fumée.Je coupai le contact et appelai mon assistance qui m’envoya une dépanneuse. Je pensais, dans ma grande ignorance que ma direction était foutue mais, vu que nous étions arrivés au garage passé midi, il fallait attendre 14 heures et l’arrivée du technicien qui sait pour connaître la raison de mes déboires. La gentille dame de l’assistance me rappela pour me proposer de me louer une voiture afin de regagner mes pénates. Je lui dis que plutôt que de rentrer je préférais attendre le diagnostic et le délai de l’éventuelle réparation avant de prendre une décision. Si le délai était court, je resterais sur place à attendre dans une chambre d’hôtel. Là dessus j’allais déjeuner dans un restaurant voisin et à 14 heures, le mécano arriva et diagnostiqua une étonnante fuite affectant une durite de gazole. Accessoirement, ce liquide avait profité de son écoulement pour détruire le démarreur. Il s’enquit de la disponibilité des pièces et m’annonça que la voiture pourrait être prête le lendemain après-midi. Il m’apprit que mes embardées s’expliquaient par le fait que du gazole avait coulé sur le pneu avant gauche et que la direction n’était aucunement en cause. On me loua donc une chambre d’hôtel mais la réception n’ouvrant qu’à 17 h j’eus le temps de découvrir la ville en attendant. Et c’est ainsi que je pris les jolies photos qui suivent :



















Ma favorite, bien qu'un peu délavée la voici :



Ce clin d’œil d'Eléonore do Vincou (Le vicou et la rivière qui arrose Bellac)  à son homologue italien m'a d'autant plus fait rire que le texte plus très lisible qui l'accompagne est réjouissant. On y apprend par exemple que"les portions du corps du mouton, ça déchire, deux gigots c'est presque la moitié de l'agneau, les côtelettes il y en a de chaque côté et le ris, c'est pas l'accompagnement mais c'est délicieux"

Bellac est au centre d’une région d’élevage ovin. Mais de là à lui vouer pareil culte, il y avait un mystère. J’avais pu constater à Domfront qu’afin de rendre moins affligeante la vue des vitrines des commerce désertés au rez-de-de chaussée des immeubles lépreux de rues jadis commerçantes, on les peignait ou les couvrait d’affiches auxcouleurs gaies. C’est ce matin que je découvris sur Internet la raison de tous ces moutons : du 4 au 7 juillet avait eu lieu au Dorat, village voisin possédant une magnifique collégiale romane, le championnat du monde de tonte de mouton et que la ville voisine de Bellac avait voulu ainsi célébrer l’événement.

Les plus observateurs d’entre vous auront noté que ces anciens commerces sont très souvent à vendre. Si l’idée de faire rapidement faillite en y ouvrant un quelconque négoce vous séduit, je suppose que les prix sont très abordables et que vous n’aurez que l’embarras du choix. Une mise en garde cependant : si vous vous  imaginez déjà trotter allègrement par les rues de la ville, n’y comptez pas : cette plaque de rue douchera votre enthousiasme :