Hier soir, la troisième chaîne diffusait un documentaire sur
les bombardements alliés qui, durant la dernière guerre, avaient frappé la France.
C’est un sujet qui a souvent provoqué mes interrogations. En effet, il y aurait eu 60 000 victimes
civiles de ces largages d’engins explosifs dans notre beau pays. Sans parler des blessés, des villes rasées et
d’autres menus dégâts collatéraux comme on dit aujourd’hui. Ça avait beau être pour la bonne cause, on
est en droit de se demander si ceux dont on retrouvait les cadavres des proches
sous les décombres de leur maison se réjouissaient sincèrement de ces actes
héroïques participant à leur libération
du joug allemand. Surtout quand les enjeux stratégiques, quand ils existaient, n’étaient pas immédiatement perceptibles aux
yeux du non initié.
Je vis dans une région où la plupart des villes et des
bourgs ont été en grande partie rasés suite au débarquement. Le but de la manœuvre
étant de désorganiser les communications allemandes, qu’elles soient
ferroviaires ou routières. Seulement, quand on n’est pas fin stratège et qu’on
se retrouve sous les bombes, il peut arriver qu’on en conçoive une relative
amertume. Surtout, quand comme à la Loupe, en Eure-et-Loir, le bombardement n’eut
lieu que par erreur alors que la cible devait être Senonches à une dizaine de
kilomètres de là à vol de forteresse volante (une des conséquences de cette
bavure fut la mort de la quasi-totalité du conseil municipal réuni en « comité
de sécurité »…)
Pourtant, de ce compréhensible ressentiment, on ne parle pratiquement
jamais, comme si la libération en avait comme par magie effacé la moindre
trace. Et c’est bien ce qui s’est passé. Car en vouloir aux libérateurs ne va pas dans le sens du poil de l’Histoire
tel qu’il est d’usage de le caresser. De plus, la grande majorité des 40 millions
de Français n’en avait pas été directement affectée… Et puis aussi parce que,
pour beaucoup, parmi les peuples qui les ont connues, les guerres sont des boucheries qui n’ont
rien d’héroïque et dont on s’empresse d’effacer le souvenir afin d’aller de l’avant.
La nécessité d’oubli, en quelque sorte…
Suivit un autre documentaire où était évoquée la lutte sans
merci qui opposa collaborateurs et résistants durant l’occupation et surtout à la
veille et au lendemain de la libération. Maquis, milice, faux-maquis, vrais
fanatiques du Reich, militants sincères, crapules sans scrupules, dénonciations,
épuration, furent évoquées. Encore une fois, que ce soit d’un côté ou de l’autre
les acteurs ne furent que très minoritaires. Mais pour que s’instaure un climat
de guerre civile point n’est besoin que tous y participent…
Tout cela laisse un goût bien amer et ne fait que me
confirmer dans mon total pacifisme.
Mes premiers souvenirs d'enfance sont ceux du hurlement des sirènes et des soirs où mes parents et moi descendions à la cave avec les autres habitants de l'immeuble pour nous protéger(?) des bombardements américains. Protection toute relative: au bout de la rue, un immeuble a été entièrement détruit et la cave n'était plus qu'un cratère.
RépondreSupprimerPacifiste? Moi aussi.
Et disiez-vous, depuis la cave, des prières dont le rythme s'accélérait à l'approche des bombes (perceptible au sifflement qu'elles émettaient), puis ralentissait une fois celles-ci tombées... à côté ? C'est l'un des souvenirs de guerre qui font rire maman quand elle les évoque, et en effet, si les bombardements ont creusé de cruelles plaies au village, les ravages en sont rarement évoqués.
SupprimerIl n'y a pas grand chose à faire en cas de bombardement sauf, si, comme c'était le cas pour les Allemands on disposait d'abris étudiés pour. Ainsi Saint-Lô fut-elle rasée dans la nuit du 6 juin avec des centaines de morts mais sans que l'ennemi n'en fut atteint...
SupprimerMoi aussi je suis pacifiste !! Je pense que seul la France devrait avoir la bombe nucléaire...
SupprimerLe 26 mai 1944, il y a 70 ans, la ville de Saint-Etienne est bombardée.
RépondreSupprimerLa première explosion a lieu à 10h17, à 10h35 l'attaque est terminée. Entre temps plus de 300 tonnes de bombes ont été lâchées sur la ville. Il s'agissait de détruire un centre de tri ferroviaire qui recevra bien quelques bombes, mais sera réparé en trois jours.
On comptera néanmoins autour de 1000 morts et 15000 blessés ainsi que de très nombreux sinistrés car plusieurs quartiers de la ville ont été très sévèrement touchés, et l'église Saint-François partiellement détruite.
Combien de villes ont subis ce sort sans résultats probants ?
SupprimerLa guerre ne fait pas que des héros, il y a aussi beaucoup de victimes. Avant l'apparition de l'aviation, seules les populations se trouvant sur le chemin des armées en mouvement ou lors des sièges subissaient les affres des conflits.
RépondreSupprimerOn peut se poser la question de l'utilité de ces bombardements surtout de nos jours, je pense que mes parents les ayant subit, en ont souffert mais jamais ils ne l’évoquèrent.
Ma mère reprochait plus aux anglais, l'agression de Mers El Kébir que les bombardement alliés, elle me parlait du comportement des résistants de la dernière heure.
Quant à moi, cette guerre, je ne la connais que par les livres même ceux écrits par les vaincus car il ne faut pas l'oublier, l'histoire est toujours écrite par les vainqueurs et ensuite réinterprétée par ceux qui ont à se faire pardonner.
Certains historiens et autres se posent la question de l'utilité des bombardements de terreur sur l' Allemagne en prétextant que la production allemande de matériel militaire était toujours voire plus importante, certes mais qu' elle aurait été cette production sans ces bombardements.
Le bombardement par les airs de population civile connu fut le blitz de Londres lors du premier conflit effectué par les zeppelins et surtout ne pas faire l'amalgame avec les bombardement sur Paris le " Paris kanonen" qui fut tout aussi traumatisant pour les parisiens d'alors.
Pacifiste, je ne suis pas , pacifique, certainement je n'irais pas refaire la gueule à un garenne simplement pour le plaisir mais il ne faut pas trop me chercher des poux.
C'est curieux ce silence général. Sur les résistants de la dernière heure (et même de l'avant-dernière), comme vous, je n'ai pas eu beaucoup d'échos favorables.
SupprimerUtiles ou inutiles, les bombardements font des victimes innocentes. En cela ils participent au charme puissant de la guerre...
"Sur les résistants de la dernière heure" Vous pensez à Mitterrand ?
SupprimerN'oubliez pas Cher Jacques, qu'à l'époque, malheureusement, la précision pour les largages se faisait à vue d’œil, d'environ 1500 à 3000 mètres d'altitude selon les cas, au travers de lentilles de visée plus que sommaires.
RépondreSupprimerBien sûr il y a eu des progrès mais quand on parle de frappes chirurgicales, je préfère que ce ne soit pas un jour où mes lèvres sont gercées.
SupprimerVous me faites rire -pardon- à chaque fois, avec vos lèvres gercées. C'est une aubaine cette saint Servais aujourd'hui (enfin, c'est ç'qu'on a dit dans l'poste).
SupprimerDisons qu'ils y sont allés de bon coeur !
RépondreSupprimerPour le reste, la France en armes, mon père avait coutume de dire : 5% de collabos, 5% de résistants, 90% de chasseurs de tickets de rationnement et marché noir.
Inutile de s'exalter !
Et c'est normal. Peu de gens aiment la guerre et la mort. Leur but principal est de survivre...
SupprimerLes gens de l'époque considéraient la chose avec une philosophie dont nous serions bien incapables.
RépondreSupprimerNaturellement, lorsqu'il y avait des tués les familles avaient du mal à célébrer les libérateurs mais, somme
toutes, ils maudissaient le sort funeste et les "Boches" sans trop en vouloir aux alliés, en général.
En revanche, beaucoup se méfiaient terriblement de l'amateurisme yankee, ces braves Amerloques
lâchaient leurs bombes au petit bonheur la chance et posaient des mines sans même prendre la
précaution d'établir des plans. A ce titre, ils faisaient encore plus peur aux populations que les
Allemands eux mêmes.
Amitiés.
Leur devise devait être : "Tuons les tous, Dieu reconnaîtra les siens"...
SupprimerOu plutôt, sur l'air de "Amor, amor, amor"
SupprimerA mort, à mort, à mort,
Qu'on les tue tous
Pour leur apprendre
A vivre.
"Les guerres sont des boucheries qui n’ont rien d’héroïque et dont on s’empresse d’effacer le souvenir afin d’aller de l’avant. La nécessité d’oubli, en quelque sorte…"
RépondreSupprimerEuh...Où voyez-vous la nécessité d'oubli dans les commémorations du 11 novembre et du 8 mai? (Je dis cela maintenant que je suis à la retraite, hé, hé!) Et du désir d'"aller de l'avant" avec le jour de l'esclavage?
Je parlais des gens ordinaires qui se contentent d'être victimes des guerres et non de ceux qui se glorifient d'y avoir pris une part active ni des dirigeants qui tentent de jouer sur la fibre patriotique...
SupprimerDiverses lois interdisant de parler librement de cette période, je recommande de lire "La chronique de Vichy" de Maurice Martin du Gard.
RépondreSupprimerJe vais le commander. Toutefois, vu les idées du personnage, je doute un peu de l'objectivité de l'ouvrage...
SupprimerBah, non : il y a une seule loi, et elle n'interdit pas de "parler librement", elle interdit simplement de dire des conneries, à savoir que les chambres à gaz n'auraient pas existé.
SupprimerEt je suis d'accord, on devrait avoir le droit de dire des conneries, y compris qu'Alain Soral, Dieudonné ou Vincent Reynouard n'ont jamais existé.
Néanmoins, cela laisse toute la place à la libre expression d'innombrables polémiques historiques sur la Seconde guerre mondiale, et on ne peut pas vraiment dire que l'édition mondiale soit chiche en la matière.
Sur le sujet que Jacques aborde ici, il vient de paraître un livre entier, que j'ai feuilleté il y a quelques jours en librairie. Je n'ai pas remarqué de Flics du Régime m'encerclant en loucedé.
Une recherche sommaire sur Amazon montre même un titre en poche :
http://www.amazon.fr/dp/2262028362
On peut même s'acheter un bouquin de propagade anti-américaine haineuse, avec, sur la couverture, un portrait d'un Roosevelt ricanant orné de la légende "assassin", et une allégorie de la douce France pleurante et victime à ses pieds. Tandis que le résumé de l'éditeur fait le parallèle entre le 11-Septembre et les bombardements alliés :
http://www.amazon.fr/dp/2911202449
Commandez-le, je vous garantis que personne ne viendra défoncer votre porte à 6 heures du matin.
Ne parlons pas des livres en anglais (c'est une langue qui existe, et la lecture en est autorisée) :
http://www.amazon.fr/dp/0670025151
http://www.amazon.fr/dp/144118581X
Le documentaire dont il est question a été diffusé par la télévision d'Etat :
http://basse-normandie.france3.fr/2014/05/13/debarquement-revoir-le-documentaire-la-france-sous-les-bombes-alliees-475899.html
On ne peut donc pas vraiment dire que les opinions anti-américaines soient interdites en France, ce serait même plutôt le contraire.
Une recherche Google fait remonter des tripotées de références, dont ce délire pro-communiste :
http://www.matierevolution.fr/spip.php?breve357
Je ne pense pas que l'auteur de cette page soit inquiété par la Police de l'Etat à la solde des atlanto-sionistes.
Il est parfaitement légitime que ce détail de l'histoire de la Seconde guerre mondiale, ahem !... soit approfondi et discuté avec toute l'attention que mérite la recherche de la connaissance.
Ce qui est moins admissible, en revanche, c'est que soixante-dix ans après, alors que la reconstruction a eu lieu depuis longtemps et que les enfants des victimes ont à leur tour disparu, d'aucuns nous ressortent cet épisode avec des arrière-pensées politiques contemporaines, alors que la pire horreur de guerre qu'ils aient connu, ce soit de s'être fait refuser une demande de RTT par leur employeur.
D'innombrables commentateurs sur Internet nous laissent entendre, rétrospectivement et sans le dire ainsi, bien entendu, qu'il aurait mieux valu que les nazis l'emportent (ou alors les Soviétiques ?), et que la France ne doit pas sa liberté aux Américains. Les bombardements civils de 1944 justifieraient l'anti-américanisme de 2014, le terrorisme de Ben Laden, le néo-communisme du Front national et l'impérialisme militariste de Poutine.
Cette malhonnêteté me fatigue.
Un peuple capable d'aussi peu de lucidité sur lui-même est un peuple arriéré. Un peu comme les Russes.
Les alliés utilisaient le viseur Norden pour tous les bombardements, ils volaient à une altitude entre 5000 et 6000 mètres d'altitude, ce fut souvent un maître bombardier installé dans l'avion de tête qui donnait l'ordre de bombardement, les autres avions ouvraient leur soutes dès qu'ils voyaient les bombes tomber de l'avion pilote.
RépondreSupprimerIl ne faut pas oublier que les avions de chasse allemands n'étaient pas pilotés par des manchots même si le nombre d' "experten" diminuait de façon dramatique vers la fin de la guerre,bien souvent les hommes à bord de ces bombardiers étaient de gamins entre 18 et 22 ans.
Le film " Memphis Belle" restitue très bien l'ambiance qui regnait dans ces bombardiers durant cette guerre.