Être formateur en Français-Langue-Étrangère, si ça ne
rapporte pas grand-chose présente au moins l’avantage de faire découvrir des
milieux et des endroits que l’on aurait
sinon ignorés. Rencontrer des gens de toutes sortes est un des attraits de la
vie.
Un an durant, j’occupai cette fonction à Londres. Ça avait
plutôt bien commencé. Ayant envoyé mon C.V. à divers instituts ou écoles je fus
souvent convié à des entretiens qui ne menèrent à rien. Et puis un jour je
rencontrai M. Tous Langages, un
Français, qui sembla on ne peut plus
intéressé par ma candidature. Quand
étais-je prêt à commencer ? Les conditions me convenaient elles ?
Bref on était dans le concret. En tant que chômeur non indemnisé, j’avais hâte
de cesser de vivre aux crochets de ma compagne : tout me convint donc à
merveille et ma disponibilité fut totale. Il me fut demandé si entre autres missions, j’accepterais
de donner des cours d’initiation au français, en août, à de jeunes enfants d’une
banlieue huppée. Tu parles que j’accepterais ! Prêt-à-tout était mon
deuxième prénom ! Je préparai donc un cours en ce sens. Ça se passa
super-bien. Parents, enfants, M. Tous Langages et son associé furent ravis et
impressionnés par les merveilleux résultats obtenus en si peu de temps. M. T.L.
en personne me convoqua pour un entretien.
J’en sortis abasourdi. Malgré mes immenses mérites si
souvent reconnus (humour !) je crois n’avoir jamais reçu autant de
compliments et, qui mieux est, m’être vu
ouvrir de perspectives aussi alléchantes. M. T.L. débordait d’enthousiasme à mon endroit. Il
me fit miroiter des voyages à Paris en compagnie d’hommes d’affaires ou de
politiciens importants à qui je servirais d’interprète à raison de plusieurs
centaines de livres la journée, des missions de traduction grassement payées.
Un brin mélancolique, il se déclara plus tout jeune, il fallait penser à l’avenir…
Bientôt viendrait le temps où la fatigue des ans (- Allons, M. T.L ., vous
êtes frais comme l’œil !) nécessiterait qu’il ait à ses côtés quelqu’un
sur qui se reposer (en tout bien tout honneur, va sans dire, car le bougre en
était un !). En fin d’entretien, il me demanda si je serais également intéressé par m’occuper de cours aux enfants
sur une base pérenne. Il ne me demandait pas une réponse immédiate, simplement
d’y réfléchir. Je le quittai un peu étonné qu’il ne m’ait pas demandé huit
jours de délai pour débarrasser son bureau des affaires personnelles dont il l’encombrait
afin que je m’y installasse. Un oubli, probablement…
Je réfléchis donc à sa proposition et arrivai à la
conclusion que je n’avais pas quitté le noble métier de professeur pour
recommencer à me coltiner des morpions. Quelque temps plus tard, je lui
signifiai ma préférence pour l’interprétariat, la traduction et les cours aux
adultes. C’était la MAUVAISE réponse. Du
coup, il ne fut plus question de voyages, de traductions et encore moins de
sous-direction. On ne me confia plus que
quelques heures de cours de ci-de là et mon salaire se fit bien maigre…
N’empêche ça me permit de découvrir de nouveaux univers
comme la banque et les ministères…
"je n’avais pas quitté le noble métier de professeur pour recommencer à me coltiner des morpions."
RépondreSupprimerAlors ça j'adore! Si on quitte l'E.N, on sait pourquoi, apparemment ça ne saute pas aux yeux de tout le monde.
C'est amusant, j'ai eu une expérience un peu similaire: un banquier espagnol auquel je donnais des cours de conversation française me fit miroiter "des voyages à Paris...". A l'époque j'étais jeune et fringante, et surtout j'étais une femme (je précise que je le suis toujours). Méfiante, j'ai décliné et "il ne fut plus question..."
Ainsi nous fûmes collègues ! C'est un métier riche en surprises et enseignements...
SupprimerVous fîtes bien, je crois, "timeo danaos et dona ferentes", n'est-ce pas, les propositions des bougres doivent toujours se prendre avec des pincettes. Méfiance est mère de sûreté, comme on ne dit pas.
RépondreSupprimerAmitiés.
Et confiance deviendrait père de sécurité ? Voilà qui me laisse coi !
SupprimerOn ne se méfie jamais assez !
SupprimerEt donc, vous continuâtes à vivre aux demi-crochets de votre belle par pure détestation des des morpions. C'est du joli ! Bougre de morpionophope et exploiteur de la gent féminine !
RépondreSupprimerVous vous méprenez, chère Louisa ! Du fait de l'amenuisement de mes ressources, je décidai de réduire drastiquement notre mode de vie et du coup, ma compagne n'ayant rien perdu de ses revenus se trouva vite à la tête de relativement importantes économies...
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