La semaine passée, l’« affaire » Philippe Varin,
Président du directoire de PSA, a défrayé la chronique. Et il y avait de quoi !
Figurez-vous que ce dégoûtant personnage aurait, si l’on n’en avait pas donné l’alerte,
touché, sur 25 ans, quelque 21 millions d’Euros en guise de retraite-chapeau.
Et au nom de quoi, je vous prie ? D’un
contrat qu’il aurait signé lors de son embauche ! Vous parlez d’une
justification ! Si on se mettait à
respecter les contrats, où irait-on ? Heureusement, la CGT veillait !
Il dénonça le scandale ! Le
sénateur PS, David Assouline, en fut, le premier, tout retourné, MM. Borloo,
Lemaire, Moscovici et Montebourg ainsi que tout ce que la France compte d’âmes nobles
et élevées lui emboitèrent le pas.
Chez Peugeot, où l’on est sans vergogne, on argumenta qu’il s’agissait d’une
simple provision, qu’il n’était aucunement question de verser 21 millions à ce
monsieur. Le délinquant prit lui-même la parole (comment osa-t-il ?) pour
expliquer qu’en fait, il ne toucherait « QUE » 300 000 € nets
par an après taxes et impôts divers. 25 000
€ par mois alors que tant de malheureux n’ont même plus les moyens d’acheter l’entrecôte
qui nourrirait leurs chères têtes blondes, comme le dit la belle chanson !
M. Varin, acculé, céda sans enthousiasme face aux multiples
pressions auxquelles il fut soumis. Medef et Afep saluèrent sa courageuse
autant que sage décision. La France respira
à nouveau. Les 8000 employés de PSA mis
sur le carreau retrouvèrent le sourire,
l’État qui avait prêté 7 milliards à PSA fut soulagé de l’avoir fait à de braves
gens, bref tout rentra dans la normale.
Sauf que…
L’État de droit sort en bien piètre état de cette aventure.
Si l’on peut contraindre quiconque à renoncer à ce qui lui était garanti par un
contrat en règle et conforme à la loi, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ?
Pourquoi ne pas déclarer clairement qu’aucun contrat n’a de valeur ?
La démagogie qui se gargarise de soi-disant « égalité »
peut mobiliser les foules contre un homme dont les avantages sont jugés
scandaleux en comparaison du lot commun. L’envie est une source inépuisable de
haine. L’égalité, hélas, n’est jamais revendiquée que vis-à-vis de ses
supérieurs. Les belles consciences
ci-dessus mentionnés vont-elles lors d’une nouvelle nuit du 4 août abandonner
leurs propres « privilèges » afin que leur propre retraite ne puisse
provoquer l’envie de personne ? J’en doute.
Si M. Varin a pu négocier un tel contrat, c’est qu’il était
en position de le faire. Essayez un peu d’en faire autant, il est probable que
votre employeur vous enverra vous faire voir chez Plumeau (à moins qu’un
langage relâché ne le pousse à exprimer
de plus vertes suggestions). Car le problème, voyez-vous, c’est que vous n’êtes
pas M. Varin, c'est-à-dire
un homme qui se montra auparavant capable de redresser les comptes du groupe sidérurgique Corus au
point de multiplier sa valeur par quinze lors de sa revente à Tata Steel. Si son passage à la tête de PSA n’a pas été
couronné du même succès, cela ne change rien à la valeur d’un contrat signé
sans qu’une clause de réussite y soit stipulée.
Cette envie pseudo-égalitaire me fait penser au sketch des
Deschiens « Le pape »
où M. Morel compare M. Lochet au pape et
lui trouve bien des mérites par rapport au Saint Père. Il me paraît ridicule de comparer sa situation matérielle (ou autre) à celle d’une
personne dont on n’a eu ni le succès ni
l’histoire. A moins bien sûr que l’on ne réclame une égalité pécuniaire totale,
dans ce cas, il faudrait le dire clairement et avouer que la seule société
tolérable soit un communisme sans nomenklatura. Je doute qu’un tel projet ne rallie beaucoup de suffrages. Mais,
a supposer que ce soit jamais le cas, en attendant ce beau jour, continuons de
respecter les contrats, nous ne nous en porterons que mieux…
Je suis entièrement d'accord avec votre billet, et j'ai été, du reste, étonné - non, consterné - de l'unanime condamnation de cette retraite-chapeau exprimée (sans surprise) par la presse, y compris "de droite", mais surtout par les partis politiques "de droite". « Je suis choqué. Partir avec une retraite de cette importance-là quand on a échoué à la tête de Peugeot, quand on n'a pas été capable de sauver un certain nombre d'emplois, quand on demande des efforts aux salariés, je trouve ça indécent » (Bruno Le Maire).
RépondreSupprimerDe quoi je me mêle ? Bruno Le Maire et ses copains de l'UMP, qui codirigent la France avec les socialistes depuis si longtemps avec le succès que l'on connaît dans la sauvegarde de l'emploi, pourraient donner l'exemple et renoncer, eux aussi, à leur retraite parlementaire. Charité bien ordonnée commence par soi-même...
Si on soumettait le respect du contrat à la réussite, je me demande combien de professions verraient leurs retraites supprimées ou réduites...
SupprimerMerci Jacques pour ce nécessaire rappel de la réalité.
RépondreSupprimerSondage hier : 80% des citoyens pour l'interdiction des "retraites-chapeau".
Je crains que la situation ne soit désespérée, et m'en vais regarder un divertissant film tamoul.
Vous devriez vous réjouir qu'il y ait 20 % de gens sensés. A moins qu'ils n'aient pas bien compris la question...
SupprimerSi nos politiciens députés de tous bords pouvaient renoncer à leurs salaires indûment perçus.
RépondreSupprimerCe serait un peu sévère !
SupprimerL'erreur a été d'établir un contrat sans clause de réussite.(A moins que cette clause n'ait existé et que la retraite chapeau ne rémunère que l'échec. Pour la réussite, c'eût été plus cher?).
RépondreSupprimerCe qu'on appelle retraite chapeau n'est qu'une prime de départ à la retraite. Un peu excessive selon certains. Personne n'a obligé Peugeot à en accepter le montant.
Et Bruno Le Maire et ses copains politicards seraient mieux inspirés de s'occuper de leurs oignons et de ne pas attirer l'attention sur eux et leur régime de retraite.
Moi, ce qui me gêne, c'est l'envie. Si les gens veulent bénéficier de certains avantages, qu'ils se fassent embaucher comme président du directoire de PSA ou qu'ils se fassent élire députés...
SupprimerVoila qui est bien dit! Tout patron de haute volée y réfléchira à deux fois avant de se faire embaucher par une entreprise française, France, pays où la pression médiatique et politique fait voler en éclat les contrats passés de gré à gré entre gens consentants.
RépondreSupprimerNotons que le jour où Varin a annoncé qu il renonçait sans vraiment y renoncer, le PSG annonçait que Laurent Blanc toucherait 6 millions d euros de salaire, ça n a choqué personne.
C'est en effet un très mauvais signal.
SupprimerQuand au foot, on est là dans le domaine du sacré...
Ils ont gagné ! L'Etat perd 14 millions de rentrées fiscales. Ils sont contents les connards. Ils veulent faire raquer les riches, mais dès qu'ils pourraient gagner de quoi alimenter leur soi-disant solidarité républicaine, ça gueule comme des putois. Cons et incohérents.
RépondreSupprimerSinon, excellent billet. Comme d'hab'
Vous me flattez, Koltchak !
SupprimerL'incohérence de la démarche est aussi évidente que courante.
La droite veut "coller" à l'opinion, opinion qui bizarrement réagit fortement aux tendances des élites médiatiques ... Alors la poule ou l'oeuf ?
RépondreSupprimerJe crois que l'opinion cherche une cohérence dans ce salaire -- normale pour la culture française qui varie entre l'égalitarisme de la révolution et la culture catholique de l'humilité. Comment pourrait-elle avoir le logiciel lui permettant de faire confiance aux individus les plus talentueux pour le bénéfice de tous, alors que Colbert passe pour le moule parfait de nos hauts fonctionnaires ?
Amike
Colbert, s'il s'habillait modestement de noir ne poussait pas l'austérité jusqu'à négliger de se bâtir une fortune considérable et pratiqua le népotisme avec ardeur et constance. Un grand modèle, en effet...
SupprimerExcellent Jacques Etienne !! Vos commentateurs sont également de grandes qualités.
RépondreSupprimerMerci, cher Skandal, pour eux comme pour moi.
Supprimer