Un autre banquier, travaillant pour une banque américaine
cette fois, me fit acquérir une notion assez exacte de ce que pouvait recouvrir
le terme « burnout ». C’était un homme très sympathique, charmant et plein
d’enthousiasme. Le formateur qui m’avait précédé lui avait fait, à travers la
lecture de La Femme du boulanger,
découvrir le talent de Pagnol. Il me
suggéra donc que nos cours fussent basés sur la poursuite de cette lecture. Je
n’y vis pas plus d’inconvénient que si ses préférences l’avaient poussé vers l’étude
de l’annuaire téléphonique de la Haute-Loire (édition de1963) : keep the
customer satisfied est une de mes maximes.
Seulement, de menus problèmes venaient perturber notre
progression à travers les heurs et malheurs du cocu provençal. D’une part, d’incessants
appels téléphoniques venaient le troubler et, en cas d’accalmie, il avait une fâcheuse
tendance à bailler puis à s’endormir. Je le voyais lutter désespérément contre
l’alourdissement de ses paupières et
craignais de devoir le quitter dans les bras de Morphée, le front posé sur le
livre du bon Marcel. Une telle mésaventure n’aurait pas plaidé en faveur du
côté stimulant de ma pédagogie…
Nos cours ayant lieu en soirée, il me demanda de les transférer au matin. J’accédai à sa demande. Cela ne changea rien car s’il tombait de sommeil le soir, le matin il n’était pas réveillé. Il me raconta quelques mésaventures que lui occasionnait sa grande fatigue. Entre autres étourderies, il lui arriva un beau matin de remplir le réservoir de sa Porsche de gazole, avec les regrettables conséquences que l’on devine. Ce qui me turlupinait quand même un peu, bien que cela ne me concernât pas vraiment, c’était que cet homme qui semblait traverser ses journées dans un état semi-comateux, était quand même en charge, si j’en croyais la teneur des appels que je l’entendais recevoir, de gérer des millions de Livres. Espérons que ce faisant, il se montrait moins distrait qu’à la station service…
Nos cours ayant lieu en soirée, il me demanda de les transférer au matin. J’accédai à sa demande. Cela ne changea rien car s’il tombait de sommeil le soir, le matin il n’était pas réveillé. Il me raconta quelques mésaventures que lui occasionnait sa grande fatigue. Entre autres étourderies, il lui arriva un beau matin de remplir le réservoir de sa Porsche de gazole, avec les regrettables conséquences que l’on devine. Ce qui me turlupinait quand même un peu, bien que cela ne me concernât pas vraiment, c’était que cet homme qui semblait traverser ses journées dans un état semi-comateux, était quand même en charge, si j’en croyais la teneur des appels que je l’entendais recevoir, de gérer des millions de Livres. Espérons que ce faisant, il se montrait moins distrait qu’à la station service…
Un jour, il se déclara trop occupé et fatigué pour
poursuivre les cours. Quand il aurait récupéré la forme, il me recontacterait
avec plaisir. Je n’en entendis plus jamais parler…
Cadre d’une banque japonaise, M. Y m’apprit beaucoup sur la civilisation
nippone. Outre de précieuses informations sur les mœurs et coutumes, bizarres à
mes yeux d’occidental, du peuple japonais, sa fréquentation me laissa trois
souvenirs marquants.
Le premier fut la visite d’un ponte de Tokyo à la branche
londonienne de la banque. Ce jour-là, Y m’attendit au rez-de-chaussée et m’invita
à monter à son étage par l’escalier m’expliquant qu’au cas où l’importantissime
personnage eût désiré quitter la banque, il eût été inconvenant de le retarder
en occupant l’ascenseur. D’ailleurs, personne n’eut l’outrecuidance de se
servir de cet équipement jusqu’au départ
du Tokyoïte.
J’assistai à ce départ, scène mémorable. Toute l’équipe
dirigeante le raccompagna jusqu’à l’ascenseur dans lequel il monta seul. Dans
un silence total, je vis les divers responsables faire moult et moult
courbettes devant la porte fermée de l’appareil et les courbettes continuèrent
bien après que le personnage ait disparu. Je pense que le grand homme était
déjà installé dans sa limousine quand cessèrent les révérences. On dira ce qu’on
voudra, mais les japonais ont un sens et un respect de la hiérarchie que nous
sommes loin d’égaler.
Le second souvenir fut le départ pour le Japon du directeur
de la branche. Ce fut l’occasion de grandes libations auxquelles participa
activement mon disciple. Lesquelles se poursuivirent pendant une bonne semaine.
Assis à attendre Y dans le hall de l’étage de direction, j’apercevais dans une
vaste salle de réunion tout ce qui comptait dans la banque porter maints et
maints toast à la santé et prospérité du dirigeant, en vidant force coupes de
saké. Quand Y finissait par me rejoindre, il en avait un bon coup dans les
carreaux. Un jour il faillit tomber de son siège, un autre il s’endormit
carrément.
Le dernier fut qu’un jour, ayant quelque consigne à y donner
, Y m’amena aux quartiers des esclaves (ou salle des marchés), toujours
patriote, il me fit remarquer qu’alors que la journée de travail était
officiellement terminée, seuls les japonais continuaient, et en nombre, de travailler. J’aperçus pourtant une
chevelure blonde dépasser du dossier d’un fauteuil. Je le fis remarquer à Y que
cette singulière nouvelle intrigua. Nous nous approchâmes du brave Européen
pour constater qu’il dormait d’un profond sommeil…
Toujours un plaisir de lire vos histoires, pour les japonais et leur courbette appuyée, j'en fus témoin durant plus d'une année , ayant vécu avec une demoiselle nippone, j'eu l'occasion à maintes reprises d'assister à cette gymnastique corporelle qui pour un occidental est du plus haut comique.
RépondreSupprimerMais à chacun ces coutumes qui peuvent aux étrangers pour bizarres.
Le plus difficile pour moi dans la culture, ce ne fut pas leur extrême politesse mais de se lever après s' être avaler moult verres d'alcool et manger assis en tailleur durant 3 heures mais cela fait des souvenirs.
Par contre j 'ai remarqué que plus la dose d'alcool ingurgitée est importante, plus la barrière des langues se dilue., vérification effectuée plusieurs fois et souvent avec des japonais de rencontre lors de mon petit séjour au pays du soleil levant.
Bien à vous
Merci d'avoir confirmé mes observations et d'y avoir ajouté les vôtres.
SupprimerLourdes de symboles, vos aventures, notamment celle de l'Européen endormi au beau milieu des asiatiques qui bossent, un vrai résumé de tous nos ennuis actuels.
RépondreSupprimerAmitiés.
Je n'y avais pas pensé, mais la métaphore est adaptée. Même si le Japon connaît depuis des lustres une stagnation économique certaine.
Supprimerma dernière fille a fait parti de ces " esclaves" de salles de marché, elle était épuisée, jusqu'à ce que l'agenc e Reuters pour laquelle elle étudiait les cours mondiaux colle tout le monde au chômage de Londres à Paris il y a 3 ans, depuis elle a changé de boulot, son esclavage est différent, moins payée mais sans chaines
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