Il y a une dizaine d’années, je regardais vaguement une connerie américaine (je pratique volontiers la redondance) à la télé en compagnie de ma fille. Je suppose que c’était surtout elle qui la regardait, vu que moi, les séries américaines… Ça se passait dans une école, du niveau lycée, vu que les élèves semblaient avoir dans les vingt-cinq ans comme c’est la règle du genre. Ce qui m’étonna, ce fut le fait que ces élèves-vétérans avaient un comportement curieux. Bien qu’en cours, certains téléphonaient, mangeaient, écoutaient leur walkman, bavardaient et accordaient généralement une attention distraite à ce que pouvait bien dire le prof.
Je communiquai mon étonnement à ma fille, lui disant que ces américains, quand même, ils allaient loin dans le n’importe quoi, un pareil laxisme me paraissant un rien improbable. Ma progéniture, bien que n’ayant pas encore vingt-cinq ans, était elle-même lycéenne à l’époque. Ma surprise incrédule l’étonna. Elle me déclara que dans son lycée, établissement « « réputé » du centre d’une paisible ville moyenne, c’était comme ça. De sceptique je devins abasourdi et lui demandai comment réagissaient les profs . « Ben, les vieux pètent les plombs et les jeunes font comme si de rien n’était ».
J’eus un peu de mal à en croire mes oreilles. Les bras faillirent m’en tomber. Dieu merci, ils étaient et sont encore bien accrochés. D’un autre côté, ça m’aida à comprendre pourquoi les petits gars en grande difficulté à qui je tentais alors de faire partager mon petit savoir avaient tendance à qualifier mon style de dictatorial…
Je sais que les choses ont changé, que les jeunes d’aujourd’hui ont des capacités inconnues de mon temps. Ils peuvent écouter de la musique, téléphoner et suivre un cours en même temps. Toutefois, je me demande si, malgré tout, ces activités multiples ne nuiraient pas un tout petit peu à leur concentration. On pourrait même se demander si l’écroulement du niveau que l’on a pu récemment constater ne pourrait pas, soyons audacieux, être en partie dû à ces attitudes plus cool face à l’apprentissage.
On aurait tort. C’est dû au manque d’effectifs dans le corps enseignant. La solution, comme l’indique M. Flamby, Futur-président-auto-proclamé©, consiste à embaucher 60 000 nouveaux professeurs. C’est beaucoup, ce n’est pas trop. Et c’est plus facile à dire qu’à faire.
Évacuons d’emblée le côté financier de l’affaire : il intéresse peut-être les boutiquiers mais les âmes nobles l’ignorent. C’est ailleurs que gît le lièvre. Figurez-vous que, pour des raisons mystérieuses, les candidats, crise ou pas crise, chômage ou pas chômage, ne se bousculent pas pour embrasser la noble profession d’enseignant ! Timidité maladive? Crainte irraisonnée que l’épousée ne soit vérolée ? Allez savoir…
Mais, encore une fois, supposons le problème résolu comme le fait régulièrement M. Flamby, Futur-président-auto-proclamé© : à quoi serviraient 60 000 enseignants de plus si on ne les écoute pas ? Et je n’ai même pas parlé d’établissements où règnent chahuts, violence, « incivilités », racket, drogue et autres manières d’exprimer une inextinguible soif d’apprendre.
Il me semble que le problème ne se pose pas uniquement en termes d’effectifs.
Il n'y en a qu'une qui pourrait peut-être faire quelque chose, oui mais non quand même, il y a des thèses auxquelles vous ne sauriez adhérer.
RépondreSupprimerIl n'est pas question de 60000 professeurs supplémentaires, Jacques, c'est pire que cela : 60000 postes liés à l'éducation (on peut tout imaginer : infirmières, nounous et compagnie). Ainsi Hollande attrzape le gogo en lui faisant espérer 60000 professeurs supplémentaires - mais encore une fois il n'est pas question de 60000 professeurs supplémentaires, mais essentiellement de métiers annexes à l'Education.
RépondreSupprimerProfs ou autres, la solution n'est pas là.
SupprimerOui mais c'est autre chose de promettre 60000 postes de profs que 60000 postes annexes à l'éducation, bien autre chose.
SupprimerJacques, c'est d'une simplicité extrême, faire croire aux gogos de service qu' un nouveau monde existera quand l' Élu sera parmi nous, et nous chanterons ensemble l' Avé Sainte Ségolène et le François Gracias.
RépondreSupprimerRegardez Jéguon depuis qu'il a vu la Vierge, il se voit en archidiacre du nouveau socialisme.
Le gogo est loin d'être aussi enthousiaste que le militant !
SupprimerJe me pose quelque fois la question quand j’entends les les discussions de certaines personnes de mon entourage professionnel.
SupprimerHé ho ! Faut pas être désagréable avec Jegoun, pour une fois qu'il écrit quelque chose de positif sur Ségolène !!!
RépondreSupprimerJégoun, si tu me lis...
Vous avez raison mais vous n'allez pas assez loin : il ne faut pas être désagréable avec M. Jégou (et non JégouN car le N représente Nicolas) sans restriction.
SupprimerComme en toute circonstance, la gauche ne résonne qu'en terme de moyens, financiers et humains.
RépondreSupprimerSi on ne redéfinit pas clairement les missions de l'école et la manière de les réussir, on pourra bien mettre 100 000 profs ou encadrants de plus, le niveau continuera à baisser. Le mal est profond et être généreux avec l'argent des autres (que l'on n'a pas...)n'y changera rien.
Absolument !
SupprimerJe crois que tant que nous n'aurons pas réinventé le préceptorat pour chaque tête blonde, oups, pour chaque apprenant de toutes couleurs et de toutes origines, l'école manquera de moyens.
RépondreSupprimerBien entendu le précepteur devra être assisté dans sa tâche par les psychologues, orientateurs et autres conseillers nécessaire au plein développement du merveilleux potentiel de chaque apprenant.
Un ratio de cinq adultes pour un apprenant me paraitrait une base de départ acceptable (à augmenter tant que les résultats ne suivront pas, bien sûr).
Bravo Aristide ! Voilà enfin des propositions de réforme constructives. Reste à trouver des adultes dignes de ces ambitieuses tâches. Je pense qu'il faudrait les recruter à un minimum de bac+8. Avons nous les effectifs suffisants à ce niveau ? Non ? Importons-les ! L'enjeu en vaut la peine !
SupprimerNana, Jacques,
RépondreSupprimerVous exagérez, comme souvent. La réflexion sur l’École menée à gauche, je suis désolé de vous le dire, va bien plus loin.
On ne règlera pas TOUS les problèmes qu'a l’École aujourd'hui en embauchant du personnel enseignant (et la gauche ne prétend pas le contraire), c'est vrai. Mais en supprimant des postes, on aggrave au moins une situation : celle des enfants en situation d'échec scolaire. Et je ne parle de l'accès aux Études Supérieures qui redevient privilège des plus aisés, y compris à l'Université, ce qui est un comble quand on se penche sur le niveau des Étudiants.
Mes filles sont dans une École (publique) Parisienne qui n'est pas en sureffectif pour la première fois depuis longtemps. La différence, je la vois. Elle est manifeste, flagrante. Personne n'est laissé de coté et l'exigence des institutrices est très forte. Le programme pédagogique de qualité.
Le problème est en fait moins l’École en tant que telle que le fait qu'elle n'est plus sanctuarisée. Les problèmes sociaux sont aujourd'hui tels que l’École ne parvient plus à s'en prémunir. L’École est poreuse en somme. Bien sûr, les changements de programme, de méthodes d'apprentissage ont fait parfois du dégât. Mais il faut prendre conscience que l’École pour tous, obligatoire, véritablement obligatoire, n'est pas si ancienne que cela. Et cela ne fait guère qu'une trentaine d'années que les problèmes sociaux sont aussi aiguës, vifs, et qu'on s'y casse les dents. Nous n'avons donc pas réellement de référents. Si ce n'est qu'on travaille mieux et plus efficacement en groupe restreint qu'à 40.
La concentration des élèves, c'est encore autre chose. Sans aller jusqu'à mener une réflexion sur l’École, on peut constater sans grand mal que les enfants d'aujourd'hui ne sont en effet plus du tout les mêmes que ceux d'hier. Ils sont plus éveillés, plus vifs, plus intelligents, mais aussi plus sollicités et donc bien plus difficiles à tenir, parce qu'ils ne savent plus ce que c'est que la tranquillité, le silence, l'ennui, la rêverie. Et ce n'est pas l’École qui est responsable de cela, ni les caïds des cités. C'est notre société toute entière qui est à repenser.
J'ai largement dépassé le cadre de votre billet mais il me semble évident que le mal de notre pays se trouve là, plutôt qu'ailleurs : dans son absence totale de vie spirituelle.
"La réflexion sur l’École menée à gauche, je suis désolé de vous le dire, va bien plus loin. "
RépondreSupprimerQuand on fonce dans le mur, ce n'est pas recommandé !
". Et je ne parle de l'accès aux Études Supérieures qui redevient privilège des plus aisés, y compris à l'Université"
Vu l'inflation des effectifs du supérieur, le nombre des plus aisés doit exploser. Ce qui paraît paradoxal dans un contexte de paupérisation généralisée.
"l'exigence des institutrices est très forte"
Va-t-elles jusqu'à préconiser que leurs élèves sachent lire, écrire et compter en sortant du CM2 ?
"Et cela ne fait guère qu'une trentaine d'années que les problèmes sociaux sont aussi aiguës, vifs, et qu'on s'y casse les dents."
On voit que vous n'avez pas connu les années 50. Dans mon école primaire (Groupe Paul-Bert, à Sartrouville, 78) certains élèves ne voulaient pas se déshabiller pour la visite médicale parce qu'ils n'avaient pas de sous-vêtements ! On distribuait des galoches à semelle de bois aux indigents, des chaussettes chaudes aux plus aisés, un verre de lait à tout le monde pour lutter contre la malnutrition. Bien des gens habitaient dans des cabanes où vous ne mettriez pas un chien. L'alcoolisme faisait rage. A part ça, tout allait bien. Je mets votre ignorance de la véritable évolution de la société au compte de votre jeunesse.
"on peut constater sans grand mal que les enfants d'aujourd'hui ne sont en effet plus du tout les mêmes que ceux d'hier. Ils sont plus éveillés, plus vifs, plus intelligents"
C'est frappant ! Curieusement, plus les gens deviennent intelligents, plus la société se lézarde. A moins que le phénomène ne soit très récent...
va-t-ELLE !
SupprimerDodo,
SupprimerVos filles dans une école publique mais dans quel arrondissement car ceux du Mord de Paris ont de moins en moins d' élèves dont les deux parents sont issus de nos belles campagnes.
Faites vous comme ces "degôche":
http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=JYePIuM275Y
La diversité c'est bien mais pour les autres!
Quant à la qualité de l'enseignement, certains professeurs de collège ont des doutes quand ils voient arriver des enfants ayant des difficultés de lecture entre autre.
Je partage l'avis de Jacques-Etienne malheureusement les enfants sont de moins en moins dans un milieu familial stable, famille recomposée, décomposée ou monoparentale.
Les dégâts sur les enfants ne sont ps encore trop voyants mais l'avenir ne me semble pas rose mais avec l' avènement de l' Élu.
Mon petit poteau,
SupprimerLa plus âgée de mes filles est en CE1, elle sait déjà lire et écrire et comprendre ce qu'elle lit. Je n'ai pas dit que l'enseignement - en général - était de qualité mais que celui de l'établissement dans lequel mes filles allaient l'était. En partie à cause d'une baisse d'effectifs. Cette baisse d'effectifs s'explique très bien. On a créé une école à proximité et on a pu répartir les enfants géographiquement. Sans doute, cela ne va pas durer, surtout si on continue à couper dans le corps enseignant. CQFD mon petit poteau.
J'habite dans le 13ème arrondissement. Le 13ème est tout ce qu'il y a de plus divers. Il se dit même chez certains qu'on y trouve trop d'africains. Le collège dans lequel ma fille ira est classé 55ème sur 69.
Je ne suis pas un "bobo". Je n'en ai pas les moyens, du reste et je dois dire que des bobos, je n'en connais pas. La majorité de mes amis viennent de banlieue et les autres sont des musiciens sans une thune (qui habitent tous dans le 18ème, y compris à la Goutte d'Or). Je suis un gars de la classe moyenne, moi, rien de plus. Je vis dans un logement de la Ville de Paris. Et j'ai vécu la majeure partie de ma vie en banlieue parisienne, dans un HLM, à Champigny sur Marne. La diversité, je sais ce que c'est. Votre procès d'intention, vous pouvez vous le garder, il sera sans effet sur moi.
Je n'ai par ailleurs jamais milité ardemment pour la diversité (ou ce que vous appelez "diversité") et je ne la refuse pas non plus. Pour moi, le problème est ailleurs. La diversité, c'est l'obsession que vous partagez avec ceux que vous appelez les "bobos" ; ça ne me concerne pas.
"Les enfants sont de moins en moins dans un milieu familial stable, famille recomposée, décomposée ou monoparentale."
SupprimerJe suis d'accord là-dessus. Mais, vous vous en rappelez peut-être, je suis catholique. Je ne suis pas favorable au mariage gay, pas franchement enthousiaste à l'idée que les homosexuels puissent adopter une ribambelle de mômes, mais surtout pour un durcissement de la législation sur l'accès au divorce.
Je vous signale enfin que c'est la droite qui a le plus favorisé l'accès au divorce. Le fameux consentement mutuel qui permet de divorcer en transformant la Justice en chambre d'enregistrement des dissolutions de mariage, c'est la droite qui l'a fait et Sarkozy en a du reste lui-même profité avec Cecilia.
SupprimerJe souscris, c'était pas mieux avant.
RépondreSupprimerApparemment tout le monde a oublié les bidonvilles (les premiers grands ensembles, c'était le grand luxe) et la faiblesse des salaires (plus des semaines beaucoup plus longues).
Maintenant, est-ce que les mômes savaient mieux lire et écrire, je n'en sais fichtre rien !!! C'est pourtant l'essentiel du sujet.
Un élément de réponse :
Supprimerhttp://www.francesoir.fr/actualite/societe/les-francais-sont-de-plus-en-plus-nuls-en-orthographe-211413.html
Rappelons que le nombre moyen d'élèves par classe dans le primaire est passé de 24 à 22 (et des poussières) de 1980 à 2006.
Et on y compare 2007 à 1987 année où la grande dégringolade était déjà bien entamée ! Il y a déjà une dizaine d'années de cela, mon inspectrice me reprochait de faire trop de dictées, les jugeant inefficaces. Je n'ai jamais pensé qu'elles permettaient à elles seules d'atteindre un niveau orthographique merveilleux mais elles avaient au moins le mérite de faire se concentrer les élèves sur l'orthographe et de donner à la morphologie un certain poids dans la notation et la moyenne. Quand je lui demandai ce qu'il fallait faire pour être efficace, elle me répondit que pour le moment on faisait des recherches sur la didactique de l'orthographe mais que celles-ci n'avait pas encore abouti.
SupprimerJ'appartiens à une génération ou au brevet on faisait des dictées d'une page au Brevet et où 5 fautes entraînaient un zéro. La dictée fait maintenant quelques lignes... Il est vrai qu'entre 1970 et 2009, le pourcentage de bacheliers dans une génération est passé de 20.1 à 66.8 % (tous types de bacs confondus) et que les titulaires du bac général sont passés de 16.7 à 35.9 %.
J'ai lu quelque part qu’on ne sait même pas combien de profs sont vraiment enseignants dans des classes...certains mécréants proposent le chiffre de plusieurs dizaines de milliers d'enseignants absents, détachés dans d'autres administrations plus cool ou des syndicats... !
RépondreSupprimerEnfin j'dis cela comme ça ...
Il existe en effet toutes sortes de détachements : syndicats, œuvres laïques, diverses administrations...
SupprimerSur la question des moyens, je me permets de mettre un extrait d'une série d'articles que j'avais publié sur mon blog à la rentrée :
RépondreSupprimer"Aux Etats-Unis, l’étude la plus importante est celle qui a été menée, à la demande du Congrès, par le sociologue James Coleman entre 1964 et 1966. Elle a porté sur 645 000 écoliers et a recueilli des données sur tous les éléments dont il est possible d’imaginer qu’ils affectent les résultats scolaires : le milieu familial des enfants, l’endroit où ils habitent, les qualifications de leurs professeurs, la qualité des locaux scolaires, la taille des classes, les programmes utilisés, etc.
Or, à la grande surprise de son auteur lui-même, le rapport Coleman est parvenu à la conclusion que la qualité de l’école n’a presque aucun impact sur les résultats moyens des enfants. Tous les éléments habituellement mis en avant, comme le nombre d’élèves par classe, l’argent dépensé par élève, la formation des enseignants, etc. ne produisent pas de différences significatives. Le seul facteur qui soit corrélé de manière significative avec les résultats scolaires est le milieu familial des écoliers."
L'intégralité est là : http://aristidebis.blogspot.fr/search/label/Real%20education
Cette étude ne fait que confirmer ma conviction. J'ai été (plutôt) bien formé par des profs qui étaient (selon les critères académiques actuels) peu compétents, dans des classes de 30 à 40 élèves mais je venais d'une famille ambitieuse. Ça change tout !
SupprimerEn tout cas, le prof vote à gauche, donc il aura
Supprimerplaisir à voir débarquer 60 000 nouveaux collègues qui laisseront les charmantes têtes crépues développer librement leurs prédispositions aux
activités multifonctionnelles et simultanées.
Jusqu'au jour où les bambins en question auront grandi et refuseront de les payer.