Comme tout un chacun, vous sentez en vous l’étoffe d’un
grand écrivain, de ceux dont l’œuvre magistrale fait qu’il y a en littérature
un avant et un après eux. Seulement, la vie fait que vous manquez de temps pour
vous consacrer au grand œuvre. Nous
menons des vies de fous : qui dira combien de romans, essais, biographies,
traités scientifiques n’ont jamais vu le jour à cause du passage de Secret story ou de la finale de la CEBS
(Coupe d’Europe de Bilboquet en Salle) à la télé ?
Mais à quoi bon pleurer sur le lait renversé ? Et puis,
la sagesse des nations ne nous enseigne-t-elle pas que ce qui n’est pas fait
aujourd’hui reste à faire demain ? On
peut penser qu’une réforme prochaine des retraites entraînera une longue grève
à la télé vous laissant le temps de passer à l’acte. Surtout si vous ne
mettez pas à profit ce temps libre pour prendre quelques apéros de plus.
Maintenant, si c’est d’un roman que vous voulez accoucher,
dites-vous bien que malgré tout ce qu’on raconte, écrire un chef d’œuvre du genre n’est pas
aussi simple qu’il paraît. Il y a pourtant des recettes simples et
éprouvées. Comme ma modestie m’ôte jusqu’à
l’envie d’accrocher mon nom au panthéon des lettres et que ma générosité me l’impose,
je vous les livrerai. En fait, il n’y en a qu’une : il ne faut ABSOLUMENT
pas se louper quand on rédige l’INCIPIT.
C’est tout.
J’entends des ignares (car il en est quelques uns qui me
lisent)s’étonner : « Quoi qu’cest-y donc son innesi-machin-truc ? »
Paedagogus in eternam sum, aussi ne
laisserai-je pas ces âmes frustes sans réponse. Les autres peuvent sauter
quelques lignes. L’Incipit, ce sont les premiers mots d’un livre. Pourquoi
sont-ils importants ? Parce que figurez-vous que, comme vous, les
critiques littéraires manquent de temps. S’ils lisaient autre chose que les
premiers mots d’un ouvrage, et, pour les plus consciencieux d’entre eux, la
quatrième de couverture et le troisième paragraphe de la page 123 ou de toute
autre page de leur choix, comment voulez-vous qu’ils trouvent le temps de
regarder Secret story ou la finale de
la CEBS (Coupe d’Europe de Bilboquet en Salle) à la télé et pour aller lever
minettes (ou minets, selon leur sexe ou leurs orientations) dans des cocktails
mondains en leur causant littérature ?
Saluons au passage le travail de ces humbles auxiliaires de
la critique que sont les salisseurs de tranches, les corneurs de pages et les
colleurs de post-it sans lequel le livre
que tient en main le critique, lors des émissions télévisées, semblerait bien neuf, voire jamais ouvert.
Mais revenons à nos moutons.
Donc ne pas rater son Incipit. Plus facile à dire qu’à faire. Le hasard a voulu qu’achetant un kilo de sardines, trois beaux maquereaux
et deux-cent grammes de crevettes chez « mon » poissonnier l’autre
jour, ces produits de la mer fussent enveloppés respectivement dans la première page des manuscrits originaux d’A la recherche du temps perdu, du Voyage au bout de la nuit et D’Eugénie Grandet. A les lire, on s’aperçoit que ces chefs-d’œuvre
ont demandé du boulot et pas qu’un peu.
Je vous les retranscris afin que vous vous fassiez une idée du labeur
qui vous attend :
Longtemps je me suis poli la colonne trois fois par jour
couché de bonne heure.
Ça s’est très mal terminé . Moi j’avais
commandé des pieds de cochon
a débuté comme ça jamais rien dit.
Rien.
C’est Louis Aragon qui m’a ramené à la maison
Arthur
Ganate fait parler.
Il se trouve dans certains quartiers parisiens des bobinards où on
nique pour pas cher
certaines provinces maisons dont la vue inspire une mélancolie égale à
celle que provoquent les cloîtres les plus sombres, les landes les plus ternes
ou les ruines les plus tristes.
Voilà. Vous savez tout . A vous de jouer maintenant !
Allez, à plus, et, avec un peu d’avance, JOYEUX NOBEL !
Moi, je me contente de faire des commentaires, nuls, la plupart du temps…
RépondreSupprimerPar exemple : bientôt il y a aura plus d'écrivains que de lecteurs…
Ce sera d^au fait que bien des auteurs ne se relisent pas.
SupprimerAh, merci, merci mille fois. Je sens la muse pousser en moi.
RépondreSupprimerMais dites moi, vous n'auriez pas aussi des trucs pour faire un blog accrocheur? En dehors du fait d'y parler de femmes à poils, ça va de soi.
Merci d'avance!
Vous n'avez qu'à intituler votre prochain billet "François Hollande nu". Vous n'êtes pas forcé pour autant de mettre des photos de François Hollande, mais ça devrait ramener du monde. Puis, vous continuez en déclinant les différents membres du gouvernement. Vous nous direz si Najat provoque un pic de fréquentation.
SupprimerVous nous direz si Najat provoque un pic de fréquentation.
SupprimerCa devrait...
Pendons le derniers coco avec les tripes du dernier socialo ! pourrait attirer du monde. Même si le billet parle d'autre chose...
SupprimerCadavre exquis ?!
SupprimerAmike
Ah, le début d'Eugénie Grandet...Si on le lit tout haut, c'est encore plus beau...
RépondreSupprimerVous parlez de la version définitive ?
Supprimer
RépondreSupprimerCar j'ai vu trop souvent la pitié s'égarer.
Surtout à la vue de certaines maisons de province.
Rajoutez-y quelques centaines de pages et vous tiendrez le bon bout !
Supprimer
RépondreSupprimerOn ne va pas loin de nos jours avec un milliard de francs.
Surtout si l'on est convoyeur de fonds.
Le casse de l'oncle Tom.
San A.
Ca donne envie non ?
En effet. Quoique San Antonio m'ait lassé depuis belle lurette.
SupprimerExcellent, vraiment!
RépondreSupprimerPour le joyeux nobel, c'est pas gagné mais qui sait, en bossant bien sur l'incipit...
Amitiés.
Vous manquez de confiance en vous !
Supprimer(ça fait une heure que je réfléchis à l'incipit de mon commentaire, et je n'y parviens pas. Adieu veau, vache, prix Nobel)
RépondreSupprimerVous oubliez de faire vos adieux au cochon et à la couvée. ce n'est pas très poli, sauf votre respect.
SupprimerConnaissant (intimement) Perrette, je pense cependant qu'elle vous pardonnera.
J'habite Villa Borghèse.
RépondreSupprimerSi c'est une contrepèterie,je n'en ai pas bien saisi le sens !
SupprimerA Clichy.
RépondreSupprimerEt c'est pas tous les jours tranquille. Traverser le périph pour me rendre à Pigalle me bousille le plexus.
SupprimerVous avez deux indices.
Henry Miller.
SupprimerJ'ai toujours eu envie d'écrire les mémoires d'un amnésique.
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