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samedi 16 mars 2013

Merci M. Boudard !



L’autre jour, je m’interrogeais sur l’opportunité de relire M. Simenon. J’y fus encouragé mais, attendant de renouveler mon abonnement à la médiathèque, j’ai repoussé à plus tard ces lectures. En revanche, l’ayant sous la main, ou plus exactement en rayonnages, je me suis lancé dans la relecture de Cinoche d’Alphonse Boudard où je savais se trouver un portrait à peine déguisé de Georges Simenon. Bien m’en a pris ! Il y a beau temps que je n’avais tant ri !

Ce roman à clés raconte les heurs et surtout malheurs du brave Alphonse alors qu’il travaille en tant que scénariste-dialoguiste sur un film de Luc  Galano, heureux époux de Gloria Sylvène et fils du célébrissime et richissime peintre Ralph Galano. Sous ces masques qui ne trompent personne se reconnaissent  aisément Marc Simenon, Mylène Demongeot et Georges  Simenon. Rien ne manque : l’alcoolisme de Marc, la ménagerie de sa femme, les péchés mignons du grand écrivain. Boudard en fait de pathétiques gugusses dont l’idiotie, la folie, l’obsession sexuelle, le snobisme, le niais suivisme, l’avarice, la futilité, la vanité et autres menus défauts vous arrachent par surprise,au détour d’une phrase, de francs éclats de rire.

L’autre fil conducteur  du récit est l’évolution d’un scénario qui devait au départ narrer les aventures truandes d’un malfrat cacochyme. Au gré des changements de producteurs, tous aussi croquignols les uns que les autres, on abandonne progressivement le vieux malfrat pour une non-histoire sans queue ni tête qu’Alphonse tente de corser un peu avant qu’un dernier ne reprenne l’affaire pour le transformer en instrument de publicité pour son village de vacances.

Ces producteurs, valent leur pesant de cacahuètes.  Le premier, un rastacouère doté d’une syntaxe et d’un accent inénarrables, adore les starlettes qui « soucent perfectionne »  mais n’a aucune intention de financer l’imbécile Luc.  Le second, homosexuel adipeux, est surtout préoccupé de sponsoriser les délires esthétisants de son petit ami. Seulement, il n’a pas le premier rond pour le faire et l’aventure se termine façon catastrophe avec les deux amants en prison, l’un pour chèques en bois, l’autre pour détournement de mineur. Le salut arrive, inattendu, sous la forme d’un Allemand aussi riche qu’ivrogne qui croit dur comme fer au succès de ce qui s’avèrera un bide mérité après que le Luc eut remanié l’histoire à sa sauce.

Faire un parallèle entre Céline et Boudard est enfoncer une porte ouverte. Le problème est que l’un a précédé l’autre et qu’on a tendance à faire d’Alphonse une sorte de sous-Louis-Ferdinand. Les ingrédients sont les mêmes : autobiographie revisitée, tentative de reconstitution du langage parlé populaire, recours aux  points de suspension et d’exclamation pour  rendre l’émotion.  Nier qu’il y ait filiation, voire imitation serait vain. Qu’importe au fond que Boudard emprunte à Céline s’il fait à sa langue de beaux enfants ? Et puis l’ancien malfrat a sur le médecin l’avantage d’une authenticité certaine  et d’un humour désabusé. Je n’y peux rien, je préfèrerai toujours le rire distancié à l’indignée grandiloquence. Voilà pourquoi, je recommanderais sans états d’âme la lecture d’Alphonse Boudard à ceux qu’un bon moment de lecture intéresse.

4 commentaires:

  1. Zéro commentaires pour l'Boudard, trente-deux pour la rosawelle dans le billet d'après...
    Nous gagnerons par la pensée, par nos idées (roulement de tambour), par la culture (la race, quoi!!?, le divertissement?!? bouh caca!), par l'élégance (sonnent les trompettes), oui m'sieur!, vive la France!

    ("tentative de reconstitution du langage parlé populaire")

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  2. Boudard ne se cachait pas de l'importance de la prose de Céline sur son propre style.

    Mais Boudard reste singulier car c'est un merveilleux raconteur d'histoires tirées sur le vif et ce dans un même roman avec en plus l'emploi de l'argot qu'il n'avait pas appris dans les livres mais dans la rue au gré de ses pérégrinations.

    Celine lui est un immense romancier de la noirceur. Certes l'argot est là les néologismes aussi mais c'est plus désespéré.
    En résumé :
    Boudard est un conteur amusé désabusé et distancié
    Celine est un romancier halluciné

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  3. Je suis assez d'accord avec vous. Boudard est un voyou. Céline une sorte d'imposteur lyrique.

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