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jeudi 11 octobre 2012

Sensiblerie et décadence



Hier, une amie Facebook a publié sur son mur la photo d’un chevreuil et d’un isard pendus par les pattes arrières et dûment éviscérés. Je suppose que c’était en devanture d’une boucherie. Elle eut droit à des réactions horrifiées. Rendez-vous compte !  Un joli isard et un chevreuil tout mimi qu’on a tués !  Des animaux qui ne demandaient qu’à vivre ou à se faire bouffer par un gentil loup ou un adorable ours, exposés ainsi comme n’importe quel dictateur déchu ! Dire qu’en passant des enfants peuvent voir ce spectacle obscène qui révulse de jeunes femmes supposées adultes !

Ces réactions sont symptomatiques. Nos ancêtres de Cro-Magnon ne les avaient probablement pas. Et c’était préférable. Plutôt que de s’extasier  sur l’œil de velours de ces gracieux mammifères  ils y voyaient une source de protéines. Le droit de chasse fut constamment réclamé dans les cahiers de doléances de 1789. Chasser, tuer les bêtes de basse-cour, le cochon, l’agneau, la chèvre était ordinaire jusque récemment dans notre France rurale. Personne ne s’en offusquait. Le lien entre la viande qu’on mange et l’animal vivant, si mignon soit-il, était évident.

Nos contemporains, devenus citadins, ont du mal à le faire. Dans son conditionnement aseptisé ou, mieux,  enrobé chapelure, la viande ou le poisson s’éloignent de plus en plus de l’animal qui la fournit.

Même ainsi, les plus sensibles n’en peuvent plus : ils tournent végétariens.  Alors que l’être humain a besoin de protéines animales.  Évidemment les horrifiés de la barbaque le nient. Pourtant, un régime totalement végétal nécessite la prise par ceux qui le suivent d’additifs alimentaires.

Pour moi, cette répugnance à accepter que la mise à mort des animaux est indispensable à notre alimentation me semble un signe de plus de la décadence de notre société. Elle témoigne d’une sensiblerie qui se voudrait signe de civilisation. J’y vois plutôt une régression. Plutôt que d’élever les enfants dans une mièvre admiration de tout ce qui bouge, il me paraîtrait préférable qu’on  maintienne chez eux le lien entre viande et animal, qu’ils assistent à sa mise à mort  comme c’était (et c’est toujours) le cas dans nos campagnes. Trouver ce spectacle horrible ne résulte que d’une mise en condition bisounoursique. J’ai toujours vu  tuer lapins, poulets, porcs. J’ai vu les saigner. Je l’ai fait moi-même à l’occasion. Je n’en suis pas pour autant devenu criminel.  

Ma fille elle-même n’a pas ces répugnances stupides. Je me souviens qu’un jour dans ses tendres années, l’emmenant à son club équestre, elle s’extasia sur de mignons agneaux qui gambadaient dans un pré. « Oh, papa, comme ils sont mignons ! » puis après un temps de réflexion : « Et en plus, c’est drôlement bon ». Un jour qu’ayant renversé un chevreuil avec ma voiture et que mon beau-père était venu le découper en mon absence, elle fut la seule à assister à cette délicate opération tandis que ma femme et sa mère s’en abstenaient. Elle n’en est pas devenue sanguinaire non plus.

A une époque ou tout enfant peut sans problèmes assister à des milliers de meurtres à la télé on s’acharne à lui  inculquer le respect de toute vie. Comme si celle d’un lapin avait plus de valeur que celle d’un humain. 

Que deviendraient nos hypersensibles s’ils se trouvaient d’aventure dans une situation où pour survivre il leur fallait chasser ou pêcher ? Se laisseraient-ils mourir de faim ou bien reviendraient-ils à de moins mièvres sentiments ?  La réponse ne me paraît malheureusement pas évidente.

23 commentaires:

  1. "Que deviendraient nos hypersensibles ?"
    Ils disparaîtraient, c'est en cours.

    Coach Berny

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  2. Personnellement, je suis tellement sensible que, même lorsque l'animal est déjà mort depuis lulure, je préfère encore passer ma soirée à picoler plutôt que de manger l'un de ses gigots…

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  3. Merci, Jacques, de ce billet.
    J'ai bien du mal à comprendre cet acharnement et surtout cette hypocrisie.
    Un petit canard c'est tout mignon, et tout le monde se régale de magret (sans parler du foie gras, je vais encore me faire taper sur les doigts).
    J'aurais du photographier le petit garçon accompagné de son Papa qui lui expliquait quelles étaient ces bestioles et qui a demandé à mon boucher s'il pouvait le toucher pour savoir si c'était doux!
    Bref, j'aime et j'assume et si pas contents je m'en moque.

    Bon, je vais m'occuper de l'arrivage d'encornets de ce matin. Avec ça, je suis certaine de ne pas choquer! Encore que...

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    1. Attention, Valérie ! Ces encornets arrachés à la mer et même pas relâchés comme le font les bons pêcheurs, c'est un sujet ultra sensible.

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  4. Regardez Koh-Lanta sur TF1 et vous aurez la réponse à la question de votre dernier paragraphe : on n'en a pas vu un seul mourir de faim.

    Cela dit, avez-vous déjà vu le massacre du bébé surimi aux yeux et à la barbe de la maman surimi ? C'est effrayant, et vous la ramèneriez moins.

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    1. Koh-Lanta, c'est un peu bidon, non ? Imaginez les ennuis de la boite de prod si un concurrent mourrait de faim ! En plus, les rares fois où j'ai entrevu cette émission, je me suis toujours demandé pourquoi, au lieu de faire les cons pour un maigre poulet, ils ne bouffaient pas le présentateur.

      Pour s’apitoyer sur le sort du jeune surimi, il faut n'avoir jamais vu ce monstre dévorer un jeune rillettedemaquereau encore à la mamelle.

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  5. "Un jour qu’ayant renversé un chevreuil avec ma voiture et que mon beau-père était venu le découper en mon absence"

    Hé, hé, braconnage...
    (pas que j'y soit opposé :-) )

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  6. En résumé, nous sommes devenus tellement cons que c'est nous qui allons nous faire bouffer tout crus.
    Et ce sera bien fait!
    Amitiés.

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    1. @ realist : Tout de suite les grands mots ! En fait, il s'agissait d'un suicide. Cette pauvre bête est venue se jeter sur ma voiture. A moins qu'il ne s'agisse de malveillance. Un kamikaze chevreuilliste tentant de détruire mon automobile...

      @ Nouratin : Manger du végétarien ? Est-ce bon ?

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  7. Hier soir on s'est marrés avec ma copine, car sur france tv, une écolo se promenant sur une plage toute coquillagée, mettait en garde les promeneurs qu'il fallait faire attention où ils mettaient les pieds car un oiseau y avait fait son nid. Et là on voit galoper un truc en arrière-plan, mi-mouette, mi-moineau, et juste après la caméra filme 2 oeufs que cet oiseau avait du pondre quelques jours plus tôt.
    D'abord on s'est marrés en voyant passer l'oiseau, et ensuite on s'est fait la remarque: "mais quand est-ce qu'ils vont arrêter leurs délires"?
    La promeneuse avait à coeur de démontrer 2 choses: l'oiseau savait s'adapter, en raison des oeufs camouflés parmi les coquillages. La seconde: bah il n'y en a pas en fait.. Si ce n'est le degré manifeste d'auto-adhésion de ladite écololo.

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    1. J'ai vu le reportage. Ce petit échassier dont je ne me rappelle plus le nom avait trouvé la parade contre les prédateurs venus du ciel, il n'avait pas prévu les promeneurs qui, sans être prédateurs, leur marcheraient distraitement dessus. L'évolution les amènera-t-elle à produire des oeufs rouge-fluo et clignotants afin d'éviter les innocents piétons ?

      Ce faisant, ils attireraient leur prédateurs traditionnels.

      La vie n'est pas simple !

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  8. Pas mieux.

    Votre billet m'a remis en mémoire une déception dont je suis la cause. Un de mes potes qui fait de l'équitation m'avait avoué qu'il ne mangeait pas de cheval, de peur d'avoir un jour à croquer un de ceux qu'il avait monté. Du coup, je me suis senti obligé de lui dire que je n'en mangeais pas non plus ce qui l'a poussé à vanter ma sensibilité. Il m'a fallu le décevoir en lui expliquant que je n'aime pas la viande de cheval et que ma répugnance n'a rien à voir avec le regard doux de ces paisibles équins qui par ailleurs m'indiffèrent totalement vu que je n'ai jamais cherché à leur grimper sur le dos.

    Il faudrait que les gentils bisounours aillent faire un tour en Chine, hors des grandes villes. J'ai pu voir comment les restaurateurs y préparent la viande de chien avant de la cuire. Un bon quart d'heure de coups de trique pour bien irriguer la viande de sang, puis couic. Je ne vous raconte pas le concert d'aboiements vers les 11h00.

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    1. En effet, la viande de cheval n'est pas très bonne. On en mangeait dans mon enfance parce qu'elle était supposée donner de l'énergie (croyance teintée d'animisme).

      Quant à manger du chien, pourquoi pas. S'il faut qu'il soit préalablement battu (comme l'ormeau (ce régal) eh bien soit.

      Les gens revenus de Chine m'ont souvent souligné le peu de sensibilité de ce peuple. Ce qui en fait des compétiteurs implacables.

      La Chine s'est éveillée. Le monde occidental) ne tremble pas encore, occupé qu'il est à de mesquines querelles internes. le pire est peut-être devant nous et pourrait venir d'un Orient beaucoup plus extrême qu'on ne l'imagine...

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  9. Arguments que l'on trouve le plus souvent à droite (je ne vais pas me faire des copains!)où l'on confond protecteurs de la nature avec Cécile Duflot.
    Il y a belle lurette et c'est tant mieux qu'en France, on ne chasse plus pour se nourrir. Mais le vrai plaisir de la chasse, disent les chasseurs, c'est de se balader dans la nature avec son chien. Comme le vieux vicelard qui dit qu'il va se dégourdir les jambes et prendre l'air dans les jardins publics et qui en profite pour mater la culotte des petites filles sur les balançoires.
    Il y a une différence entre tuer des animaux de boucherie et tirer sur des faisans pour le plaisir. Pour le plaisir, tout est là.
    L'argument des Chinois, des arabes ou d'autres peuples, en retard de ce point de vue n'est pas une excuse.
    Il faut avoir vu un chevreuil blessé retrouvé quelques heures après par les chiens de sang, achevé (servi!) avec une dague et avoir entendu celui qui lui coupait la gorge (halal!) dire "Ah! La sale bête! Elle nous aura fait courir!".
    Il y aurait aussi beaucoup à dire sur le sort des animaux d'élevage.
    Je vis à la campagne, je traite bien mes animaux (je tue mes poulets) pour faire honte à ceux qui traitent les hommes moins bien que je ne traite mes bêtes.

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  10. Personne avant vous n'a jamais fait le lien entre l'observation de la mise à mort d'une bête de boucherie et le déclenchement de pulsions criminelles.
    Sinon il ne ferait pas bon croiser le personnel des abattoirs et les bouchers.
    On peut adhérer à votre point de vue toutefois vous devriez reconnaître que alimenter
    7 milliards de personnes en bonne bidoche quotidiennement et à tous les repas représente un problème sanitaire et écologique sans solution.






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    1. La question à se poser serait plutôt de se demander si notre bonne mère Gaïa, je fais des efforts pour me mettre au diapason, a les moyens de supporter la présence de 7 milliards d'individus. Surtout lorsque l'on sait que les endroits où la natalité est galopante sont justement ceux où on a toutes les peines du monde à faire pousser quoi que ce soit.

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    2. @ Brindamour : Les hypersensibles parlaient de "cruauté" c'est pourquoi j'en suis venu à évoquer des pulsions criminelles.

      D'autre part, envisager que 7 milliards d'humains puissent vivre à l'occidentale est totalement utopique.

      @ Koltchak : Normalement, la transition démographique devrait finir par se tasser.

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  11. Un chevreuil n'est pas une bête de boucherie. Et je n'ai pas dit que les bouchers ont des pulsions criminelles. J'ai connu le temps où les bouchers abattaient eux-mêmes leurs bêtes et ceux que j'ai connus veillaient à ne pas les faire souffrir. Adolescent, il m'arrivait d'aller aider le boucher du village.
    Nourrir l'humanité avec de la viande, pourquoi pas? A tous les repas, c'est peut-être déconseillé par les diététiciens. Mais tuer POUR LE PLAISIR du gibier qui, trop souvent, n'a été élevé que pour permettre à quelqu'un d'éjaculer sa cartouche, non!

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  12. " Il y a belle lurette et c'est tant mieux qu'en France, on ne chasse plus pour se nourrir."
    Hélas si ! Et quand un cornard de cerf égaré traverse la Loire juste devant votre chalet, au prix où est la viande, le douze toujours à porté de main est parti tout seul ! Propre, net, en plein coeur. Le plus fastidieux fur de le découper pour le mettre au congélo, mais putain que c'est bon, on dirait du boeuf !
    Pour plussoyer votre conclusion, y en a qui feront moins les chochottes après la fin du monde des Mayas de l'espace quand faudra reconstruire une civilisation de zéro.
    Comme on disait chez les "scouts" de ma jeunesse...
    Marche ou crève !

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    1. N'importe comment, cerfs, chevreuils et sangliers ont tendance à pulluler et font des dégâts aux cultures...

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