Étant d’un naturel mauvais et, avouons-le, spéciste, cette information sur ma vulnérabilité m’a rendu assez agressif vis-à-vis de ce type d’insectes. Je ne conseille à aucun frelon, à aucune guêpe de s’aventurer chez moi car s’ils tendent à s’y incruster et à refuser de profiter de l’opportunité de s’échapper que leur offrent portes et fenêtres ouvertes, leur destin est réglé. Cette année, ils étaient nombreux en Corrèze et ce sont quelques frelons et nombre de guêpes à qui ma cruauté a fait connaître une fin tragique.
Seulement aussi prudent soit on, l’accident demeure possible. Ainsi, voici quelques jours, alors que j’étais descendu en Corrèze pour y accueillir ma fille et son compagnon, un jour que ceux-ci étaient parti découvrir quelques merveilles locales, j’entrepris de vider l’eau dont un orage avait noyé le barbecue de la terrasse. Saisissant ledit appareil, je ressentis une violente brûlure à la main gauche. Curieuse sensation en touchant un métal baignant dans l’eau et forcément refroidi. Sans avoir vu mon agresseur, je conclus que j’avais dû poser ma main sur une de ces satanées bestioles. Vu ce que m’avais dit mon bon docteur quelques décennies plus tôt, j’en fus quelque peu affolé. Je saisis mon téléphone et appelai le praticien local. Son répondeur m’indiqua qu’elle était en vacances. Je me hâtai donc de rejoindre la pharmacie afin qu’on m’y conseille.
La pharmacienne, une fois que je lui eus expliqué le motif de ma visite et les raisons de mon émoi, ne parut pas plus inquiète que cela, et tenta de me rassurer en minimisant la gravité de la chose. Il est vrai qu’à part une rougeur à l’endroit de la piqûre, une douleur modérée et un gonflement de mon index, rien ne justifiait mon inquiétude. M’ayant proposé un antiseptique à appliquer avec une compresse, des comprimés antiallergiques et une crème à la cortisone, elle me dit de revenir au cas où d’autre symptômes apparaîtraient. Je suivis ses directives et la douleur se calma. L’œdème généralisé que m’avait prédit mon docteur castelroussin ne se produisit pas. Le lendemain, mon doigt avait un peu désenflé. Ensuite tout disparut.
Il semblerait donc que je ne sois pas vraiment allergique, ce qui me débarrasse d’une phobie pluridécennale : je ne connaîtrai donc probablement pas le triste sort du regrettable Alcofribas Pecuchard dans l’article du Rabouilleur dont la lecture me fit me remémorer cet incident.