M.Didier Goux, l'a dit et répété :
avec le temps, il arrive qu'un livre qui jadis avait recueilli nos
suffrages enthousiastes cesse de nous intéresser, que ses défauts
nous semblent l'emporter sur ses qualités. Bref, qu'on brûle ce que
l'on a adoré.
Je viens de vivre cette expérience en
relisant Mort à crédit de M. Destouches. Je dus faire bien
des efforts pour ne pas abandonner la lecture tant par moment elle
devenait pénible. Le pire fut quand le bon docteur se lançait dans
des délires qui plus que des envolées me semblaient autant de
noyades. J'avais l'impression de lire l’œuvre d'un dément !
Et que c'était long et ennuyeux ! Et puis la forme de paranoïa
qui parcourt en fil rouge tous ses ouvrages y compris les pamphlets
me fut insupportable. Le « héros » Célinien est
quasi-perpétuellement en butte à la maligne traîtrise de qui
l'entoure. Face à cela, une seule solution : la fuite. Fuite
qui, dans la vraie vie fut salutaire à Louis-Ferdinand, lui
permettant, de Sigmaringen au Danemark, de sauver sa triste peau
d'éternel "persécuté".
Même au joli temps de ma Célinolâtrie,
je pensais qu'il aurait dû s'arrêter d'écrire après Mort à
crédit. Que ce soit dans Guignol's band ou la trilogie
finale, je trouvais que l'auteur devenait caricature de lui-même et
pour tout dire illisible. Quant aux pamphlets qu'il est de bon ton de
juger anodins, si on les replace dans le contexte de la montée d'un
antisémitisme rabique qui mènera à ce que l'on sait, il est
difficile de ne pas y voir des appels au massacre.
Fut un temps où, comme si ce genre de
classement avait le moindre intérêt, je plaçais Mort à crédit
au dessus du Voyage ! J'ai relu ce dernier roman il y a
quelques années et l'ai trouvé aussi génial qu'il m'avait paru
lors de précédentes lectures. Après ma récente et cuisante
déception, j'en suis venu à redouter qu'une nouvelle lecture ne me
fasse revenir définitivement sur la haute estime en laquelle je
tenais cet auteur.
Il n'empêche que son influence sur le
style de nombre d'auteurs est incontestable et que, ne serait-ce que
pour cela, il tient dans la littérature française du vingtième
siècle une place prépondérante. Que sa place, dans un panthéon
personnel en totale ruine, soit remise en cause n'y change rien.
Après tout, peut-être est-ce moi qui vieillis mal...
Étant resté fidèle à Tintin, je ne suis pas déçu ��, ni aucun, rejet.
RépondreSupprimerJ'ai toujours eu du mal à comprendre la tintinolâtrie. Mais j'aimais beaucoup étant enfant.
SupprimerC'est mon côté nauséabond qui m'y pousse.
SupprimerJamais lu Destouches, même pas Le Voyage...
RépondreSupprimerEt ce n'est pas votre relecture du zigoto qui va m'y inciter!
Bon,pire encore que l'antisémitisme rabique et délirant,le fait pour un écrivain d'être illisible.
Là, c'est inexcusable :-)
Essayez Pierre Antoine Cousteau pour voir,tout aussi parano que Céline,fasciste jusqu'au bout et fier de l'être resté,mais qui a tenu un amusant(!) journal de ses sept années de captivité,après être resté 141 jours dans la cellule des condamnés à mort: "Intra Muros".
Vendémiaire.
Cousteau, frère du commandant, était une des têtes de turc de Céline. Je ne l'ai jamais lu mais si l'occasion se présente, j'aimerais le faire.
SupprimerJ'ai lu en son temps Le Voyage, l'ai trouvé "génial" à tous les égards que vous dites, et ai décidé d'en rester là ! Mort à crédit était là, sur les étagères mais je ne l'ai jamais ouvert.
RépondreSupprimerCela dit, j'ai pris beaucoup de plaisir à voir certain spectacle de Luchini à base de Céline. Il me semble me souvenir de L'arrivée à New-York où, au théâtre de la Croix-Rousse, j'étais assise à côté de Michel Bouquet devant lequel j'étais passée sans le reconnaître.
Ah ! Une autre petite chose, hier au soir j'ai regardé le film consacré à Luchini par la 2. J'ai été frappée par la ressemblance physique de Fabrice Luchini avec le Docteur Destouches sur certaines images.
Comment expliquez-vous ce refus d'ouvrir ce livre ?
SupprimerUn éclair de lucidité sénile à la fin... de votre billet !
RépondreSupprimerEh oui, ça peut arriver aux plus stupides. peut-être même à vous...
SupprimerCela dit, l'inverse peut se produire aussi : que le plaisir resurgisse, parfaitement intact, voire qu'il soit supérieur à ce qu'il avait été lors de la première et juvénile lecture. ainsi moi, en ce moment, avec Zola ; particulièrement en ce qui concerne La Terre.
RépondreSupprimerJ'ai commencé à lire Zola très jeune et ai gardé un bon souvenir des Rougon-Macquart à l'exception de "La faute de l'abbé Mouret" où les descriptions du Paradou m'ont paru très lassantes.
SupprimerIl y en a d'autres, des "ratés" : Le Rêve, Une page d'amour, L'Argent… À côté de splendides réussites, qui compensent largement. Mais il me semble me souvenir que nous avons déjà parlé de Zola, une fois et de vive voix… en attendant que cuise un certain gigot…
SupprimerOh que si, j'ai lu Rigodon. On pourrait attribuer son illisibilité au fait que Céline ne l'avait pas terminé mais d'Un château l'autre et Nord ne valent guère mieux.
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