Avant de répondre à cette
poignante question qui m’est venue à l’esprit suite à un débat chez M.
Goux et afin de déblayer le terrain, je vous conterai une blague qui
circulait en Angleterre dans les années soixante-dix. Elle concernait la presse
quotidienne.
« Le Financial Times (quotidien financier) est lu par ceux qui gouvernent le pays
Le Times (conservateur) est lu
par ceux qui croient gouverner le pays
Le Guardian (gauche) est lu par
ceux qui pensent qu’ils devraient gouverner le pays
Le Morning Star (communiste) est
lu par ceux qui pensent que c’est un autre pays que devrait gouverner le pays
Le Sun (gutter press) est lu par
ceux qui se foutent bien de qui peut gouverner le pays du moment qu’elle a de
gros nibards » (Pour ceux qui l’ignoreraient, en dehors de titres-chocs et d’un
goût marqué pour le French bashing, la grande spécialité du Sun est la photo d’une
belle fille dénudée en page 3)
Évidemment, et de très loin, c’est
le Sun qui était (et demeure) le plus lu… Quel rapport me direz-vous avec Thomas
More ? Nous y viendrons. Mais auparavant, pour les rares lecteurs à qui ce
nom ne dirait rien, je signalerai qu’il s’agit d’un humaniste britannique du
XVIe siècle, juriste, théologien, historien, philosophe (il fut élève puis ami
d’Érasme), Bref d’un homme de culture que la faveur du roi Henri VIII éleva à
la plus haute charge du royaume avant que, tombé en disgrâce, il ne se trouve
condamné à mort et décapité pour « trahison ». Catholique fervent, il
fut béatifié puis canonisé. Un homme complet (sauf à l’extrême fin) en quelque
sorte. Il fut un temps où, pour ministre, le roi d’Angleterre n’hésitait pas à
choisir un grand humaniste, quitte à le faire raccourcir en cas de contrariété.
Certains se plaignent qu’une telle
pratique ait disparu (le choix d’un dirigeant cultivé, pas nécessairement sa décapitation). C’est
du moins ce qu’il m’a semblé en lisant certains commentaires chez le bon
Didier. Il semblerait qu’à leurs yeux seul un homme de profonde culture
(littéraire, ça va sans dire) ait sa place à la tête d’un pays. D’où ma
question. Seulement, les temps ont changé. Que le peuple ait été largement
aussi inculte au XVIe siècle que maintenant, je n’en doute pas un seul instant.
Seulement, à la différence des lecteurs du Sun, il n’avait pas le droit de
vote. Point n’était besoin de le séduire.
De nos jours, pour être élu, il
faut soit séduire le peuple soit s’opposer à un adversaire que ce dernier
rejette pour des raisons bonnes ou mauvaises. Je doute qu’une culture
encyclopédique puisse être le principal atout de séduction de nos modernes
politiques. Je doute également que ce soit suite à une étude profonde de la
littérature et de l’histoire que l’on devienne un « animal politique »
ou qu'on soit capable de gouverner un pays. Être un honnête homme (au sens classique
du terme) compte moins qu’une bonne maîtrise du jeu politique et que l’art de
la démagogie. Si le plus habile politicien que nous ait fourni l’actuelle république
avait un goût certain pour la culture, c’est plutôt sa rouerie et sa pratique
du système qui l’ont amené à être si souvent ministre sous la quatrième avant
de devenir président suite à une interminable quête de pouvoir.
En fait, il me semble que seule
une poignée de gens seraient séduite par un homme de pouvoir lettré. Malgré leur
exigence en ce domaine, je crains que nombre de mes amis « réacs » en
soient (de la poignée, bien entendu), ne serait-ce qu’à cause d’une haine viscérale de tout homme politique (corrompu
jusqu’à l’os par définition), de l’extrême diversité et de l'intransigeance de leurs opinions…
Au risque de me répéter, ce que
je demande à un politique, c’est d’avoir un programme en accord avec mes
aspirations et de le mettre en œuvre. Qu’il partage ou non mes centres d’intérêt
est secondaire.
Les humanités affinent l'intelligence et ouvrent l'esprit.
RépondreSupprimerJe n'en doute pas mais elles ne sont pas seules à le permettre.
SupprimerLa conclusion me paraît donc s'imposer d'elle-même : mettons fin à la démocratie.
RépondreSupprimerC'est en effet une des conclusions possibles.
SupprimerUn Pinochet ou un Franco me sembleraient plus appropriés. Rien de bon ne peut sortir des urnes, sinon ça se saurait.
RépondreSupprimerToujours aussi démocrate à ce que je vois !
SupprimerOn ne se refait pas !
SupprimerEt puis quand on voit ce qu'ils en font de la démocratie, tous ceux qui s'en réclament à grands cris, je me dis qu'on ne perdrait pas au change.
Moi je vote pour Reagan (acteur) ou Thatcher (chimiste).
RépondreSupprimerHalte à l'insupportable dictature des rats de bibliothèque.
Mme Thatcher a toujours eu ma sympathie, sauf quand elle a institué la "Poll tax".
Supprimerje trouve que ces mœurs du temps passé où l'on raccourcissait joliment un ministre, fût-il lettré, avait tout de même quelques avantages pour la suite, et je serai assez pour rétablir cette mesure, nous pourrions faire l'économie de la large retraite et de tous les avantages payés à vie à tous ces anciens ministres et députés, et nous n'aurions même pas le regret d'avoir raccourci un intellectuel brillant, vu le niveau des nos élus et en plus, la certitude de ne pas les voir revenir plus tard
RépondreSupprimerC'est frappé au coin du bon sens, tout ça, Boutfil !
SupprimerJacques, ne pourrions-nous pas constituer un comité de soutien Boutfil Présidente ? Nous la tenons, notre Maggie. Boutfil Présidente !
Ça me paraît être une bonne idée. Seulement, pourquoi diable quitterait-elle ses chères broderies pour une tâche si ingrate ?
SupprimerJ'ignore s'il nous faudrait un Thomas More mais je suis certaine qu'il nous faudrait un Président Plus !
RépondreSupprimer(Oui, je sais, mais bon, c'est la fin de la semaine !)
Vous êtes pardonnée!
SupprimerIl nous faudrait Renaud Camus président, pardi !
RépondreSupprimerMat, anonyme car sur ordinateur d'emprunt.
Bien qu'ignorant presque tout du lascar (je doute que ce terme, accolé à son auguste personne lui plaise) le peu que j'en connais me pousse à douter que votre suggestion soit bonne.
SupprimerPour raccourcir un ministre , je propose la hache, l'épée serait bien trop noble pour ces ruffians.
SupprimerPour sortir ce pays de la chienlit, un homme comme Rodrigo Díaz de Vivar aussi connu sous le nom" El Cid Campeador " serait parfait mais le méritons nous ?
Bien sûr, vous avez tout à fait raison d'autant plus que le lettré fleurit de moins en moins sur
RépondreSupprimerles bancs des hautes écoles de la République. Maintenant c'est la communication qui tient le
haut du pavé...il s'agit de bien autre chose!