Tous les amateurs de pensée profondes et hardies, et plus particulièrement mes fidèles lecteurs d’Oulan-Bator, se désolent du peu de fréquence de mes écrits. A cela, il y a plusieurs raisons : tout d’abord, l’actualité est bien terne ces derniers temps. Le président dégoise à tout va, on va finir par manquer de tout et se les geler quand la bise sera venue (ce qui compensera les effets déplorables de la canicule), les Chances pour la France se rappellent sans faille à notre souvenir avec cette taquinerie qui nous fait les aimer si tendrement, on ne trouve plus de profs qualifiés pour maintenir nos chères têtes blondes dans un état d’ignorance salutaire, les valeurs fondamentales de notre chère république (foot, prix des nouilles, tiercé et droits des LGBTQ) sont défendues becs et ongles par un gouvernement talentueux autant qu’efficace, le système de santé fonctionne comme sur des roulettes, bref tous les indicateurs sont au vert et, en dehors d’un éventuel conflit nucléaire généralisé, rien ne saurait perturber notre bienheureuse routine.
Ensuite il se trouve que ma paresse va croissant au fil de l’âge et que ce que j’accomplissais naguère en un clin d’œil me prend de plus en plus de temps. La moindre tâche me paraissant fastidieuse, je finis par la repousser de jour en jour, lui préférant mots croisés, belote, siestes et relectures diverses.
Il en est une cependant, qui ces derniers temps m’est apparue urgente : la réfection du plan de travail de la cuisine. Lors de la rénovation de cette pièce, j’avais repeint la carrelage dudit plan à l’aide d’une peinture spéciale. Seulement, ces peintures ne sont pas adaptées aux surfaces horizontales et se dégradent rapidement à force de se faire agresser par le dépôt de casseroles ou poêles chaudes. Dans un premier temps, je pensais repeindre le carrelage mais le décapage s’avéra difficile et vu la faible durée que connaîtrait ce pis-aller, peu utile. Je décidai d’abord de remplacer le plan par un plus moderne. Pour cela, il fallait démonter l’ancien et ce démontage ne pouvait se faire sans avoir préalablement fait sauter les carreaux. Ce que je fis. C’est alors que la paresse me saisit : découper le plan à la bonne taille, y ménager un orifice pour y encastrer la plaque de cuisson me parut demander trop d’efforts. Je décidai donc de me borner à remplacer le carrelage par un autre. Je me rendis à Vire mais de carreaux blancs et de 10 sur 10 cm, ils ne disposaient pas. Je pris ce qu’ils avaient, n’ayant nulle envie de me rendre à Saint-lô et encore moins à Caen en chercher.
Voici le résultat :
Seulement, le démontage de la plaque fut l’occasion de constater que je côtoyais inconsciemment un péril redoutable : en effet, depuis 8 mois, le flexible reliant la bouteille de gaz à la plaque aurait dû être remplacé ! Quelle aventure !
Plutôt que de remercier le ciel, dans son infinie miséricorde, de m’avoir épargné la redoutable explosion que ma coupable négligence aurait dû occasionner, je me contentai d’aller acheter un nouveau flexible et de le fixer en serrant l’écrou menant à la plaque à la main, vu que c’était de cette manière que j’avais dévissé l’ancien. Curieusement, durant l’après-midi, j’eus, comme les Français ont un sentiment d’insécurité, l’impression de sentir comme une odeur de gaz. J’attribuai cela au fait qu’en raccordant la bouteille à la plaque, un peu de gaz avait pu s’échapper. J’ouvris la porte de la cuisine donnant sur le jardin et ne sentis plus rien. En redescendant d’un sieste (plus ou moins) bien méritée, je sentis de nouveau une légère odeur de gaz. Je mis ça sur le compte de l’auto-suggestion et n’y prêtai pas attention.
C’est plus tard, quand vint l’heure de préparer mon dîner que les choses se corsèrent. Tandis que ma côte de porc grésillait de bonheur sur un feu vif, j’entendis soudain comme le petit bruit d’une faible explosion. Le témoin d’allumage de la plaque électrique, bien qu’elle ne fut pas en fonction, se mit à clignoter avant de s’éteindre. Ces deux faits éveillèrent ma curiosité. J’ouvris donc la porte du placard contenant la bouteille pour apercevoir une jolie flamme bleue dansoter autour du raccord de la plaque. Je coupai l’arrivée du gaz et continuai la cuisson de ma côte sur la plaque électrique. Pour la nuit, je débranchai électricité et gaz et remis l’examen du problème au lendemain.
Le matin venu, après le petit déjeuner, je m’attaquai à la question. Laquelle était simple : soit le tuyau était défectueux, soit le joint s’était abîmé au montage, soit c’était un problème de serrage. Le démontage me permit d’exclure la responsabilité du joint. Une série de tests me permit de constater la parfaite étanchéité du flexible. Chose dont je me réjouis, vu qu’au cas où tel n’eût pas été le cas, j’aurais considéré comme potentiellement dangereux tout tuyau de remplacement. C’était donc une question de serrage. Je serrai donc, vérifiai à l’aide d’un pinceau trempé dans un mélange d’eau et de liquide-vaisselle qu’aucune bulle n’apparaissait aux raccords et nous étions repartis pour 10 ans de tranquilité.
Là j'ai kiné, mais je lirai quand je reviendrai !
RépondreSupprimer@ Ftrdi : Mon ambition n'est pas la longévité mais quand quelque chose m'agace, je tente d'y remédier, c'est tout.
SupprimerC'est vrai, Fredi, que vous avez failli me tuer d'ennui avec votre description de l'érotisme vite fait bien fait sur le bureau !
RépondreSupprimerVous croyez vraiment, Tonton Jacquot, qu'un "conflit nucléaire généralisé" perturberait tant que cela notre routine ? Vous croyez que nos dirigeants ne seraient pas capables de nous faire admettre qu'il nous arrive enfin ce qu'ils nous promettent depuis si longtemps ? J'avoue que j'ai comme un doute.
RépondreSupprimerEh bien voilà, une chose est désormais sûre, nombreux sont ceux qui mourront encore avant la grande déflagration, puisque même vous, vous arrivez avec toute votre science du bricolage, à vous mettre en danger de mort !
Un conflit nucléaire généralisé ne m'effraie nulement. Je souhaiterais en être victime car, comme on dit, le plus dur serait pour ceux qui resteraient, dépourvus que sont devenus les homme ocidentaux des ressources morales ou techniques pour y survivre.
SupprimerMe "mettre en danger de mort" , n'exagérons rien...
Deux remarques sur cet admirable billet : "La moindre tâche me paraissant fastidieuse, je finis par la repousser de jour en jour". Vous auriez pu dire "La moindre tâche me paraissant fastidieuse, je procrastinais"... Pour économiser des lettres (pensons à la planète). "nous étions repartis pour 10 ans de tranquilité" D. Goux, orfèvre de la langue française, va vous signaler que tranquillité prend 2 "l"... Sinon, on attend le prochain billet avec impatience (c'est vrai qu'ils se font rares).
RépondreSupprimerDans le même esprit, vous auriez pu ne rien écrire et m'épargner mon inutile commentaire. Un moment de lucidité Léon ? On n'est jamais mieux servi...
Supprimer@ Anonyme : Procrastiner c'est remettre à demain. En Utilisant "repousser de jour en jour" j'ai voulu signaler que non seulement je remettais au lendemain mais que le lendemain venu je remettais de nouveau avec pour conséquence de retarder l'action de plusieurs semaines, voire plusieurs mois
Supprimer@ Léon : Ilme sembe que votre commentaire est mal pacé : Vous sembez répondre à M. Anonyme alors qu'il s'adresserait logiquement à votre serviteur.
Ajoutez donc à cela que le verbe procrastiner n'a jamais existé en français (en bas-normand non plus, d'ailleurs, si mes renseignements sont exacts).
SupprimerDidier Goux, anonymisé par Blogger
Un aussi beau texte sur une toute petite chose, une minuscule fuite de gaz, c'est admirable ! C'est la magie de l'écriture, la grande écriture, et du bel artiste, que de faire autant avec si peu. Dans cette littérature du rien, je ne vois guère que Régis Jauffret (Microfictions) et surtout le grand Flaubert avec qui vous comparer. Encore un effort et vous serez au rang de l'ermite de Croisset.
RépondreSupprimer"Encore un effort et vous serez au rang de l'ermite de Croisset" Je suppose qu'à vos yeux, la proximité que vous m'attribuez avec Faubert est flatteuse. Aux miens, il n'en est rien vu que la lecture de ce prétentieux scribouilard et, notamment de son "Éducation sentimentale" m'a plongé dans un profond ennui comme l'avait fait le "Lys dans la vallée" du parfois regrtettable Balzac qui l'avait inspiré.
SupprimerJe n'ai aucunement l'ambition d'égaler, de dépasser ni même de comparer à qui que ce soit. Comme disait le vieil Aragon, j'écris ( de moins en moins) "pour passer le temps petit qu'il me reste de vivre" entre un bricolage, une sieste, une récolte de haricots verts et toutes choses importantissimes que font le sel de ma vie. Avec pour seul espoir de provoquer chez certains, de temps à autres, un sourire.
Effectivement Flaubert n'est pas à votre hauteur ; j'aurais dû choisir Homère... Vous restez toutefois digne de figurer dans Bouvard et Pécuchet ou dans une fable de La Fontaine : devinez laquelle !
SupprimerJe me demande si Holliwood ne se jetterai pas sur un scénard d'une aussi excitante intensité
RépondreSupprimerC'est vrai, ça ! Il y a là matière à un film catastrophe à gros budget : planète en danger, spectaculaires effets spéciaux, suspense,intervention miraculeuse de super-héros, happy ending, tout y est...
SupprimerJe tiens à prévenir les éventuels producteursque je serai très cher et que je n'accepterai que les paiements en fioul domestique ou, à l'extrême rigueur en pots de moutarde.
Il faut noter la continuité dans vos articles:
RépondreSupprimer- la semaine dernière : "je suis de ceux qui obtempèrent"
- cette semaine: " je me tiens à carreau"
Seriez-pas un peu conformiste?
Le Page.
Vous savez, quand on préfère couler ses vieux jours dans le confort de sa maison putôt que dans un cul-de-basse-fosse, il faut l'être un peu.
SupprimerAu prix où va devenir le gaz (russe ou algérien), il vaut effectivement mieux éviter les fuites de serrage...!
RépondreSupprimerC'est un aspect du problème auquel je n'avais pas songé !
SupprimerJ'avais relayé un excellent commentaire (pas de moi) sur BHL, il a disparu!
RépondreSupprimerOrage