La mort de tant de célébrités
d'un âge souvent canonique a suscité chez beaucoup un sentiment
de surprise attristée. Cerné par les oraisons funèbres, j'ai à
mon tour été la proie d'un souvenir morbide.
Le bon empereur Napoléon (mort comme
chacun sait à Sainte-Hélène peu avant que son fils Léon ne lui
crevât le bidon et qu'on ne le retrouvât assis sur une baleine en
train de manger des arêtes de poisson), afin d'éviter que ses
soldats ne s'épuisassent sous la chaleur des canicules, décida en
sa grande sagesse que l'on plantât au long des grandes routes des
platanes dont l'ombre éviterait le syndromes de la SDF (Surchauffe
Du Fantassin). Mesure prudente dont on ne saurait que le louer.
Il n'empêche qu'un platane, c'est con.
Même quand ça reste à ne rien faire au bord des routes. Ça
devient beaucoup plus con quand ça croise le chemin d'une automobile
ayant quitté la route. D'autant plus con que dans cette automobile
se trouvent des jeunes gens qui ont bien d'autres choses à faire que
de perdre leur vie. Le summum de la connerie platanière est atteint
quand parmi les victimes se trouve un être cher.
Et pourtant... Il y a plus de trente
ans, un platane, qui peut-être vit encore, a eu raison, sur la route
de Bédarieux, d'un gamin que j'aimais bien . 18 ans, beau comme un
astre, il était le frère de ma femme. Tout juste bachelier. Une vie
de succès devant lui, car il avait tout. Sauf une résistance
suffisante au choc contre un con de platane.
Il avait de l'humour, était
intelligent, et curieusement doué pour le sport. Bien que son
entraînement consistât à manger des bananes vautré devant la
télé, il avait des barres de chocolat sur le ventre et, en dépit
que le sport lui eût été interdit suite à je-ne-sais-quel souffle
au cœur, il était parvenu, en cachette, à se glisser jusqu'au
niveau national en plusieurs disciplines.
Nous nous entendions bien. Il aurait la
cinquantaine aujourd'hui. Encore un peu jeune pour faire un mort.
Notre amitié aurait-elle résisté au divorce ? Les hasards de
la vie nous auraient-ils séparés avant ? Aurions-nous de
conserve repeint nos cuisines respectives comme la tradition l'exige
des beaux-frères ? Questions vaines.
Car dans la vie il y a des platanes.
Quand j'y pense, je les trouve bien cons.
Hélas, le tableau de chasse de ces enfoirés de platanes ferait rêver n'importe quel djihadiste de nos banlieues. A noter toutefois que la sage décision de s'abstenir de planter de telles cochonneries au bord des autoroutes a considérablement limité leurs capacités de nuisance depuis la fin des années soixante. Comme quoi il y a plus de sagesse chez Vinci que chez feu Napoléon.
RépondreSupprimerAmitiés compatissantes.
J'ai lu quelque part que les arbres des bords de routes(ou du moins les collisions avec eux ) seraient en effet responsables de 450 morts par ans en France, ce qui est bien plus que le terrorisme. Curieusement, lorsqu'il est question d'en supprimer des voix bien intentionnées s'élèvent pour tenter d'empêcher ces "massacres"...
SupprimerEh bien, tout en compatissant pour la perte que vous avez subie dans le passé, permettez-moi d'être en complet désaccord avec vous. Les arbres de bords de routes ne sont en aucun cas responsables de 450 morts par an, ni même d'une seule. En revanche, on pourrait examiner la responsabilité des gens (qui ne sont pas toujours les morts, d'ailleurs) qui laissent leurs voitures sortir violemment des routes en question et foncer droit sur les arbres qui les bordent.
SupprimerSinon, dans le cas où l'on tiendrait les platanes pour responsables, et donc "méritant" d'être arrachés, il faudrait aussi songer à abattre les murs, les pylônes, combler les ravins, assécher les rivières, etc., puisque aussi bien ils sont tous, eux aussi, "responsables" de la mort d'un certain nombre d'automobilistes.
Dans un deuxième temps, il faudra penser à supprimer les poutres des maisons et des granges, responsables d'un nombre bien trop élevé de pendaisons.