En France, nous avons de la chance et
même de plus en plus de chance. Mon ex-pharmacien me le disait :
« Il n'y a qu'en France qu'existe un journal comme Le Canard
enchaîné ! » Quelle chance ! Je n'allais
pas me mettre à dos ce brave homme en lui disant qu'à 20 ans
j'avais cessé de lire ce torchon parce que ses formidables
révélations sur les dessous de la politique française me
semblaient avoir l'importance d'un pet sur une toile cirée. Portant
notre chance à son comble, depuis quelques années est venu
s'adjoindre à ce merveilleux media un autre, presque aussi
intéressant, sous la bienveillante houlette de M. Edwy Plenel, un
personnage qui a réussi à reléguer M. Noël Mamère à la seconde
place de mon hit-parade des gauchistes répugnants.
Mediapart, journal d'information en
ligne payant, vient de lancer une nouvelle affaire, propre à faire
vaciller notre démocratie déjà chancelante : le scandale des
homards, Figurez-vous qu'un personnage important de la république
aurait régalé ses amis de ce précieux crustacé arrosé de couteux
vins fins ! Le tout-media s'en émeut, le tout-Landerneau politique
lui emboîte le pas, et le bon peuple s'en indigne.
Eh bien, quitte à choquer certains de
mes lecteurs, de l'affaire de Rugy, comme de l'affaire Benalla, comme
de l'affaire Trucmuche ou de l'affaire Machin, je me foutrais
complètement si le retentissement qu'on leur donne n'était, parmi
tant d'autres, un signe de la décadence de notre pays.
Il semble de plus en plus que la
première chose que l'on demande aux politiques est d'être des
modèles de vertu. La république exemplaire devrait se hisser au
niveau d'éthique des monarchies scandinaves. Ce n'est pas ma façon
de voir les choses. Politique et sainteté n'ont rien à voir
ensemble. Le rôle des dirigeants est de s'attaquer efficacement aux
problèmes du pays. Je préfère, et de loin, un « corrompu »
efficace à un incapable vertueux. Le train de vie, si fastueux
soit-il, de nos gouvernants ne me dérange aucunement. Mais, me
dira-t-on, c'est tes impôts qui financent ce luxe ! Et alors ?
Ces mêmes impôts financent nombre d'actions extrêmement plus
coûteuses qui, elles, me scandalisent.
Toutes ces pseudo-affaires sont certes
distrayantes à tous les sens du terme. Seulement elles sont basées
sur l'exploitation du fervent désir d'égalitarisme qui continue
d'animer bien des gens. Comme si les tentatives d'égalitarisme
avaient mené à autre chose qu'au totalitarisme et à la misère.