Qu’est-ce que l’Islande sinon une petite Mongolie maritime
peuplée de Scandinaves ? Située au
milieu de nulle part, ou de l’Atlantique-Nord ce qui revient au même, ce pays fait
tout pour rebuter d’éventuels immigrants ou visiteurs. S’appeler « Terre
de glace » alors qu’à Reykjavik la température maximale atteint allègrement
les 13° C en juillet est rusé ! Une autre astuce employée pour éloigner les
importuns est de donner aux villes des noms absolument imprononçables et difficilement
lisibles. Ainsi lorsque vous essayez de vous renseigner sur les attraits de Seydisfjördur,
bourgade qui, il faut bien le reconnaître n’en présente aucun, après quelques
tentatives infructueuses de taper son nom dans un moteur de recherches vous
vous dites qu’en fait vous passeriez de meilleures vacances à la Grande-Motte.
Et vous feriez bien. Car le pays est
volcanique en diable, son point culminant est le Hvannadalshnjúkur (2109 m.), volcan
dont il faut probablement plus de temps pour prononcer correctement le nom que
pour en escalader les pentes. Seulement dix pour cent du territoire est couvert
de glaciers (ce qui prouve, si nécessaire, la mauvaise foi des « Terre de
Glaçais »). Les geysers, sources jaillissantes et intermittentes d’eau
chaude sont supposés être une autre « attraction »
du pays. Si vous aimez les jets d’eaux, allez plutôt voir celui de Genève qui
a le mérite d’être constant et de ne pas ébouillanter. Pour évacuer l’eau des incessantes
précipitations, de nombreux fleuves parcourent les paysages arides du pays
avant de se jeter via des fjords dans l’Océan.
Presque deux-tiers des 320 000 Islandais vivraient dans la capitale,
Reykjavik, et son agglomération, pratiquement tout le reste réside dans des
bleds de mort qui donneraient à Romorantin ou Châteauroux des airs de
mégalopoles. Avec pour conséquence de faire du reste du pays un quasi-désert.
La colonisation de l’île par les Scandinaves débuta à la fin
du IXe siècle. L’histoire de ce pays est une longue suite de catastrophes. Guerres
intestines, épidémies (peste noire (1402-1404 et de nouveau en 1494-1495),
variole au XVIIIe siècle), famine suite, en 1783, à l’explosion d’un volcan qui
causa la mort de la moitié du bétail et d’un quart de la population : que
des misères ! Du point de vue
politique, ce ne fut pas mieux, rattaché en 1262 au royaume de Norvège, l’Islande
finit, suite aux vicissitudes des unions et désunions scandinaves, par tomber
dans l’escarcelle du Danemark avant de devenir en 1918 un royaume lié à son
ancien protecteur. En 1944, la république fut finalement proclamée après que l’île
eut été occupée pendant la guerre par les Britanniques puis les Étatsuniens.
Elle entama alors, grâce au plan Marshall et à l’industrialisation de la pêche,
une période de prospérité qui allait la mener à devenir un des pays les plus
riches du monde en matière de PNB par tête. Comme quoi, dans la vie d’un
peuple, il faut savoir être patient… Hélas, ayant un peu forcé sur la spéculation
financière, la crise de 2008 la toucha cruellement. Comme quoi, rien n’est
jamais acquis à l’homme…
L’économie Islandaise est basée sur la pêche et l’industrie
de l’aluminium. La géothermie autorise l’Islandais et à l’islandaise à ne pas
trop se cailler les miches lors de leurs ébats et est utilisée pour la
production d’une électricité qui leur permet de voir ce qu’ils font (en plus de
fondre l’alu). L’élevage séculaire du
mouton a eu pour conséquences une déforestation massive et une aridité des
sols. Toutefois, la rumeur selon laquelle le mouton islandais serait muni de
lunettes vertes lui permettant de brouter les cailloux serait infondée. La
toison de ces aimables ruminants permet la confection et l’exportation de
tricots plutôt rigolos d’aspect.
Du point de vue culturel, les Islandais parlent une langue
que l’isolement a conservée proche du vieux norrois ce qui leur permettrait de
discuter sans problèmes avec les habitants des Îles Féroé si ces derniers ne
manquaient totalement de conversation et étaient un peu plus près. L’Islandais
ne porte pas de nom de famille mais le prénom de son père suivi de –son, ce qui
est inadmissible au XXIe siècle. La littérature islandaise fut prospère au Moyen-âge
ou nombre de poèmes et sagas furent écrites. Depuis, pas grand-chose à signaler
à part Halldór
Laxness (prix Nobel de littérature 1955) que ceux qui l’ont lu connaissent.
Ce serait bien le diable cependant que n’aient pas été écrits quelques poèmes,
romans ou traités consacrés à la morue, au mouton, à la géothermie, à l’aluminium
ou aux tricots… Pour ce qui est de la peinture, elle est surtout composée de faux.
Pour le reste…
De tout ça, il ressort qu’un voyage en Islande demande au
touriste d’avoir des goûts un peu particuliers. Mais quand on raffole des
fjords, qu’on est transporté à la vue de geysers, de glaciers, de terres arides
et de volcans, qu’on rêve de visiter des usines de congélation de poisson, des
fonderies d’aluminium ou des centrales géothermiques, que la seule vue d’un mouton
vous ravit, qu’on a bien envie de perfectionner le norrois qu’on a acquis aux
Îles Féroé, ça peut être tentant… Attention toutefois à ce que l’éruption
catastrophique d’un des nombreux volcans aux noms improbables ne vous retienne
pas trop longtemps : vous pourriez vous en lasser.