..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

mardi 13 mai 2014

Ah, Dieu que la guerre est jolie !



Hier soir, la troisième chaîne diffusait un documentaire sur les bombardements alliés qui, durant la dernière guerre, avaient frappé la France. C’est un sujet qui a souvent provoqué mes interrogations.  En effet, il y aurait eu 60 000 victimes civiles de ces largages d’engins explosifs dans notre beau pays.  Sans parler des blessés, des villes rasées et d’autres menus dégâts collatéraux comme on dit aujourd’hui.  Ça avait beau être pour la bonne cause, on est en droit de se demander si ceux dont on retrouvait les cadavres des proches sous les décombres de leur maison se réjouissaient sincèrement de ces actes héroïques  participant à leur libération du joug allemand. Surtout quand les enjeux stratégiques, quand ils existaient,  n’étaient pas immédiatement perceptibles aux yeux du non initié.

Je vis dans une région où la plupart des villes et des bourgs ont été en grande partie rasés suite au débarquement. Le but de la manœuvre étant de désorganiser les communications allemandes, qu’elles soient ferroviaires ou routières. Seulement, quand on n’est pas fin stratège et qu’on se retrouve sous les bombes, il peut arriver qu’on en conçoive une relative amertume. Surtout, quand comme à la Loupe, en Eure-et-Loir, le bombardement n’eut lieu que par erreur alors que la cible devait être Senonches à une dizaine de kilomètres de là à vol de forteresse volante (une des conséquences de cette bavure fut la mort de la quasi-totalité du conseil municipal réuni en « comité de sécurité »…)

Pourtant, de ce compréhensible ressentiment, on ne parle pratiquement jamais, comme si la libération en avait comme par magie effacé la moindre trace. Et c’est bien ce qui s’est passé. Car en vouloir aux libérateurs  ne va pas dans le sens du poil de l’Histoire tel qu’il est d’usage de le caresser. De plus, la grande majorité des 40 millions de Français n’en avait pas été directement affectée… Et puis aussi parce que, pour beaucoup, parmi les peuples qui les ont connues, les guerres sont des boucheries qui n’ont rien d’héroïque et dont on s’empresse d’effacer le souvenir afin d’aller de l’avant. La nécessité d’oubli, en quelque sorte…

Suivit un autre documentaire où était évoquée la lutte sans merci qui opposa collaborateurs et résistants durant l’occupation et surtout à la veille et au lendemain de la libération. Maquis, milice, faux-maquis, vrais fanatiques du Reich, militants sincères, crapules sans scrupules, dénonciations, épuration, furent évoquées. Encore une fois, que ce soit d’un côté ou de l’autre les acteurs ne furent que très minoritaires. Mais pour que s’instaure un climat de guerre civile point n’est besoin que tous y participent…

Tout cela laisse un goût bien amer et ne fait que me confirmer dans mon total pacifisme.

lundi 12 mai 2014

Devoir de mémoire et commémorations



En nos temps de grande repentance, il est fort bien vu que nos gouvernants assistent ou participent à des cérémonies commémoratives, sortes de rites expiatoires où sont rappelés les faits et méfaits (surtout ces derniers) qui font  de notre longue histoire une succession de crimes abominables (car même les événements heureux servent plus à souligner l’ampleur du malheur qui les a précédé que le bien qu’ils ont engendré). L’idée est que ce faisant, on ravive le souvenir de nos fautes afin d’éviter que nous ne les commettions à nouveau. Il y a deux jours, on célébrait l’abolition de l’esclavage.  Ainsi, après avoir pleuré sur le malheur des pauvres victimes de la traite au lieu de nous réjouir de sa proscription, nous voyons-nous incités à ne pas rétablir cet odieux commerce. Bien qu’à ma connaissance, peu de partis aient inscrit ce projet à leur programme, ça n’en reste pas moins méritoire car il vaut mieux prévenir que guérir.

Les commémorations et autres journées mondiales de ceci ou de cela sont censées permettre  aux descendants des coupables de se couvrir la tête de cendre tandis que les descendants des victimes  se livrent sans retenue à la délectation morose qu’entraîne l’exposition de plaies aussi anciennes qu’inguérissables.

Ayant très mauvais esprit, j’ai cependant l’impression que mis à part quelques politiciens qui feignent de ressentir une tristesse de commande, quelques associations qui espèrent en tirer quelque avantage et une poignée de gauchistes qui ne sauraient vivre sans leur dose quotidienne d’auto-flagellation, tout le monde s’en fout. Et c’est bien naturel car pas plus qu’un individu, une nation ne peut aller de l’avant en regardant sa vie dans le rétroviseur.  Tirer des leçons de ses erreurs passées est une chose, se passer la rate au court-bouillon à cause d’elles en est une autre. Regretter ses égarements est admissible, se repentir de ceux de lointains ancêtres alors même que les circonstances ne se prêtent aucunement à leur reproduction est  absurde (si Simon IV de Montfort, dont je ne pense pas être un descendant direct, se montra un peu rude avec les Albigeois, les chances qu’une croisade en pays Cathare soit bientôt prêchée me semblent bien  minces).

Si de telles manifestations nationales avaient une utilité quelconque, ne pourrait-on pas envisager que chaque individu les imite en dédiant un jour spécifique de l’année à la commémoration des moments marquants de sa propre vie ? Jours de liesse ou de tristesse ? Cela existe déjà : on fête son anniversaire comme celui de son mariage, événements réputés heureux.  Mais peu instaurent des jours de deuil consacrés au souvenir de tristes périodes où selon qu’ils en soient les victimes ou les responsables  ils inviteraient leurs tourmenteurs au repentir ou iraient s’excuser auprès de ceux auxquels ils ont nui. Une telle idée ne viendrait pas à  l’esprit du pire ressasseur de malheurs, tant on est bien conscient que le conjoint infidèle se fout comme de l’an quarante du jour où il quitta le foyer pour vivre de nouvelles aventures ou que le gars de l’URSSAF ou des impôts qui précipita une entreprise dans  la faillite s’en bat le coquillard. C’est peut-être triste, mais c’est comme ça. Personnelle ou nationale l’histoire n’est pas un livre de morale à méditer mais une série de faits, heureux ou pas, qu’aucun regret ou remord ne saurait changer pas plus que sa connaissance ne saurait éviter qu’on retombe dans les mêmes ornières si des circonstances similaires se présentaient à nouveau.

C’est sur l’avenir qu’il faut s’efforcer de faire porter ses attentes ou ses principes. Porter sur le passé des jugements anachroniques est stérile.

dimanche 11 mai 2014

En territoire ami





Je termine En territoire ennemi,  le beau livre de M. Didier Goux. Si j’ai mis tant de temps  à le lire, c’est que c’est plus un livre de chevet dont on lit avec plaisir quelques pages avant de s’endormir d’un sommeil apaisé qu’un thriller  que l’impatience pousse à dévorer afin d’en connaître le dénouement. C’est un ouvrage  qui se déguste, qui se sirote doucement,  comme un cognac hors d’âge. Pour ceux qui l’ignoreraient encore, il s’agit d’un recueil de billets de ce blog sans lequel la réacosphère perdrait en style comme en narquoise profondeur.

Faire l’inventaire des sujets traités serait impossible. Il en va de ce livre comme de la Grèce de Kharlampy Spiridonovitch Dymba, personnage de  La Noce, farce en un  acte de Tchékhov, à qui le maître de maison tente vainement  de faire avouer que certaines choses ne se voient pas en son pays : on y trouve TOUT. Du moins, tout ce qui compte. Vous aimez qu’on évoque les cocus, les zombis, les clowns, les gitanes, la lettre X, les morts, le désert, les guillemets, les discours, l’adjectif, le kebab, le communisme, les médecins ? C’est votre livre ! Vous aimez la musique, les films, les romans ? C’est votre livre !  Vous ne tombez pas raide d’admiration dès qu’un « progressiste » émet une ânerie ? C’est votre livre ! Vous pensez que tout n’était pas pire avant ? C’est votre livre !

Il ne suffit pas cependant de traiter des sujets qui réjouissent l’âme réactionnaire, encore faut-il le faire avec talent. Et de talent, M. Goux est éminemment pourvu : un style impeccable au service d’une langue alerte, riche et sure, un humour léger, un flair infaillible  pour dénicher  le ridicule d’un discours ou d’une situation, une vaste culture, une sensibilité que tente maladroitement de masquer un cynisme affecté sont, entre autres, les ingrédients qui concourent à son excellence.

On n’est pas obligé de partager l’idée, pas toujours subliminale, qui sous-tend ces textes à savoir  que nous vivons les derniers instants d’une civilisation moribonde. Ou que tout était mieux avant. Le regard que Didier Goux pose sur notre temps est souvent nostalgique, rarement, et c’est là un  euphémisme, optimiste quant à l’avenir mais il est lucide et l’humour vient toujours tempérer l’amertume de son constat. Plus que désespéré, M. Goux est désabusé : il se refuse  à prendre pour argent comptant la fausse-monnaie « modernoeuse » qu’on essaie abusivement de nous fourguer à longueur d’ondes, d’images et de discours. On ne saurait lui en vouloir…

Je conseillerai donc ce livre à tout lecteur lucide. Je n’irai pas jusqu’à prôner sa lecture aux  progressistes rabiques que trop de préjugés font condamner toute voix discordante dans un concert qu’ils ne supportent qu’unanime…

samedi 10 mai 2014

Sous le signe de l’eau !


Photo du coupable


Décidément ma semaine aura été placée sous le signe de l’eau ! Je ne reviendrai pas sur la pluie qui au moment où j’écris frappe, obstinée, à mes carreaux comme qui insisterait pour qu’on la prie d’entrer ni sur la légère fuite qui me fit passer tant d’heures inoubliables agenouillé sous l’escalier mais évoquerai  un triste corollaire de mon installation d’eau au jardin.

Avant-hier, après avoir fixé au nez de mon nouveau robinet extérieur un tuyau d’arrosage, je me mis  en devoir d’abreuver les plants de tomates et de courgettes qui venaient de trouver leur place sous la serre. J’avais pour ce faire acheté un pistolet d’arrosage multi-jets. Mes plants dûment arrosés, je regagnai mon humble logis puis dinai. C’est ensuite que se produisit un phénomène étrange : alors que je nettoyais des casseroles que le lave-vaisselle déjà plein n’aurait su accueillir, je notai qu’au lieu du jet vigoureux et abondant qui s’échappe d’ordinaire du mitigeur, ne s’en écoulait plus qu’un timide filet d’eau. Baisse de pression dans le réseau diagnostiquai-je. Je constatai ensuite que le lave-vaisselle, du fait du manque de pression, se montrait rétif  à accomplir sa tâche. Pensant à quelque facétie de sa part (il a ce côté farceur de l’Allemand que nos aînés ont peu apprécier lors des trois derniers conflits), j’avançai d’un cran le programmateur  qui s’entêta ensuite à demeurer immobile. « Qu’importe me dis-je, la nuit portera conseil tant au réseau qu’à l’appareil ménager, allons nous reposer… »  

La nuit passa. Au matin, lorsque je fis couler de l’eau pour mon café, ce ne fut encore qu’un filet d’eau qui condescendit à s’écouler. « Mazette, m’écriai-je (in petto, cependant), ça sent la grosse panne ! »  A tout problème sa solution : j’allais en ce week-end de pont tenter l’inconcevable : contacter le syndicat des eaux. Je composai donc, sans grand espoir, le numéro dudit bureau  lequel ne tient que deux journées de permanence et jamais le vendredi. Je tombai bien sur un répondeur, mais au lieu de me conseiller de rappeler aux heures d’ouverture, il m’annonça que j’allais être redirigé vers un service d’accueil. La musique d’attente passée, une charmante dame décrocha. Je lui décrivis mon calvaire. Elle s’enquit du département où se trouvait ma demeure : j’étais arrivé à une plate-forme au moins régionale et non au service cantonal de l’eau. Je donnai toutes les coordonnées nécessaires après quoi la gentille personne m’assura qu’elle transmettait mon appel au secours au service compétent et qu’un zélé employé viendrait sous peu mettre un terme à mes misères.

C’est alors que me vint une idée : je ne pouvais être le seul à manquer de pression. Mon voisinage devait partager l’épreuve. Saisissant à nouveau mon plus beau téléphone j’appelai cet enfoiré de mon voisin. Sa femme me répondit qu’ils n’avaient aucun problème et que son mari venait de prendre une bonne douche avant de partir au travail. J’en conclus que le problème trouvait son origine chez moi. Au cours des récents travaux de terrassement, ma conduite se serait-elle trouvée endommagée par la pelleteuse ? Je me ruai tremblant vers le compteur, en ôtai le couvercle et vis à mon grand dam que l’aiguille du coquin jouait au ventilateur tandis que le tuyau tremblait au passage d’un flot continue de liquide. L’âme en proie au désespoir, je fermai le compteur afin que les frais s’arrêtassent.  Il y avait donc fuite et même grande fuite. C’est alors que je me souvins de mon arrosage de la veille. Avais-je dûment coupé le robinet ma tâche accomplie ? J’allai voir.  Le doute fut dissipé : sous la pression, le collier qui maintenait le tuyau au nez du robinet avait cédé, des traces incontestables montraient qu’un puissant flot s’en était échappé. Mon étourderie (jointe à la faiblesse de la fixation) était à l’origine de mes malheurs. Je recontactai  le service des eaux pour signaler que j’avais résolu mon problème (il n’aurait plus manqué à la perfection du tableau qu’un déplacement intempestif d’une équipe me fût facturé !).  Puis, je relevai le compteur. Confrontant ce relevé à ma précédente facture, je vis que ma consommation sur la même période avait plus que doublé et qu’au cours de la nuit et dans la matinée plus de vingt mètres cubes étaient allés abreuver une terre pourtant déjà détrempée…

Qu’importe, je pouvais prendre ma douche avant de descende faire mes courses et mettre en marche le lave-vaisselle.  Ce que je fis. De retour du village, je trouvai qu’en se vidangeant l’appareil ménager  produisait de curieux borborygmes. Puis vint le son caractéristique de l’eau tombant sur le carrelage, accompagné d’une mare s’épanchant dans la cuisine. Je désencastrai la bête, démontai le siphon que je croyais bouché : rien. Je remis le siphon en place, fis couler de l’eau dans le conduit qui la laissa s’écouler sans problème. Comment alors expliquer ce débordement intempestif ? Mystère. Après avoir épongé, profondément enfoncé le tuyau d’évacuation, je remis l’animal en place. Ainsi s’achevèrent (du moins je l’espère) mes mésaventure aquatiques d’une semaine incontestablement placée sous le signe de l’eau….

vendredi 9 mai 2014

L’heureux homme libre a-t-il besoin de vacances ?



C’est bien connu, l’homme heureux n’a pas de chemise. Reste à savoir s’il prend des vacances. On serait tenté de répondre par l’affirmative, vu que sa tenue le prédispose à la plage bien que pour les sports d’hiver elle ne soit pas idéale.  Maintenant qu’est-ce au juste que des vacances ?

Il semblerait que ce soit un temps de liberté et de loisir durant lequel on  peut se livrer à des activités différentes de celles que l’on exerce d’ordinaire ou tout simplement ne rien faire. Cette dernière possibilité est difficile à mettre en œuvre : en effet, dormir, lire, se promener, visiter un monument, se dorer au soleil n’est pas rien  et ne dispense pas de s’alimenter d’entretenir son hygiène corporelle, etc. Si peu énergiques que soient nos actions, on fait toujours quelque chose. 

Ces vacances peuvent se passer chez soi ou ailleurs. Il est rare que quand on choisit la seconde solution ce soit pour trouver un hébergement bien meilleur. On quitte souvent un logement confortable pour des locaux  plus spartiates, inconvénient censé être compensé par un climat meilleur ou un environnement  plus reposant. Il est d’ailleurs remarquable qu’en été on va rechercher le beau temps alors qu’en général c’est le moment où ce dernier est le plus agréable dans son lieu habituel de résidence. On se prive donc des meilleurs moments qu’on pourrait passer chez soi pour une quête d’un ailleurs à l'ensoleillement aléatoire.

Il est très concevable que quand on vit dans un environnement désagréable où on se livre à d’ennuyeuses activités professionnelles, on ait envie de s’en évader et d’occuper son temps différemment ou le moins possible.

Mais qu’en est-il de l’heureux homme libre, celui qui est en mesure de choisir aussi bien son lieu de vie que des activités, professionnelles ou non, qui le satisfont ? On peut imaginer que son désir de vacances soit motivé par la curiosité, l’envie de découvertes. Là encore on pourrait se demander si ce désir de changement n’est pas dû au fait que la satisfaction que l’on retire de sa vie n’est que partielle.  Va-t-on visiter la voisine quand on est vraiment heureux en ménage ? A moins encore que la migration saisonnière soit ressentie comme faisant partie intégrante du mode de vie : mer, campagne ou montagne quand la saison s’y prête…

Personnellement, je suis totalement dépourvu de ce genre de curiosité. Je me plais à l’endroit où je suis, je passe mon temps à l’améliorer et je ne m’en éloigne qu’à regret même pour d’agréables rencontres ou de belles visites. Je pars (rarement) avec l’impatience du retour.