Ça commençait par les gaulois, qui ne craignaient qu’une
chose : que le ciel leur tombe sur la tête. Ils auraient mieux fait de se
méfier des romains qui leur tombèrent sur le râble malgré l’héroïque résistance
de Vercingétorix face à César . Venaient ensuite les barbares, leurs invasions
et le bon Clovis qui ne rigolait pas avec l’appropriation arbitraire des vases. L’empereur Charlemagne récompensait
le pauvre besogneux et fustigeait le mauvais riche dans son école palatine d’Aix.
Plus tard, les Vikings venaient mettre le souk un peu partout jusqu’à ce qu’on
les transforme en pacifiques Normands.
On aurait dû commencer par là. Godefroy de Bouillon prenait Jérusalem avant que
Saint-Louis ne rende la justice sous son chêne. La guerre de Cent-Ans n’en
finissait pas mais donnait au rusé du Guesclin et la vertueuse Jeanne d’Arc l’occasion
de se distinguer. LOUIS XI, roi pas gentil, enfermait le pauvre cardinal La Balue dans une
« fillette » et non content de ça, venait le narguer dans les geôles
de son château de Plessis-lès-Tours. En plus il était superstitieux ! Heureux contraste, le suivait le bon François
1er, fait chevalier par Bayard, vainqueur à Marignan (1515), grand bâtisseur
et prince magnifique. Son fils, inventeur d’un style de buffet qui connût son
heure de gloire se faisait bêtement enfoncer une lance dans l’œil lors d’une
joute et en mourait malgré les efforts d’Ambroise Paré (Père-de-la-médecine-moderne®).
Sa veuve, bien méchante reine, prénommée
Catherine, ordonnait qu’on massacrât les protestants le jour du bon Saint-Barthélemy.
Les guerres de religion mettaient le pays à feu et à sang avant que n’arrive le
bon roi Henri, qui, bien qu’aimant ses enfants et ayant ordonné que l’on mît la
poule au pot chaque dimanche finit assassiné par l’odieux Ravaillac. Ce
personnage pour le moins douteux fut dument roué vif avant d’être écartelé à
quatre chevaux. Bien fait pour lui !
De Louis XIII, on retenait surtout son bon ministre, cardinal de
Richelieu, qui interdisait les duels
quand il n’assiégeait pas La Rochelle.
Avec le fils de ce roi falot, la France
atteint des sommets : le Roi-Soleil fait bâtir Versailles, encourage les
arts, va de victoire en victoire, passe le Rhin. La classe, quoi. Rien de bien
notable jusqu’à la Grande Révolution, sa
prise de la Bastille, son Valmy, sa batterie de guillotines, son brave petit
soldat Bara qui mourut plutôt que de crier « Vive le Roi » et l’eczémateux
Marat mort d’une overdose de poignard dans sa baignoire. Un
certain Napoléon Bonaparte conduisait le pays vers des cimes sans qu’on
insistât sur l’abîme qui suivit. Retour des Bourbons, révolution, Louis-Philippe, Roi-Bourgeois qui se
promenait dans Paris avec son parapluie
comme vous et moi (surtout vous). Re-révolution, Deuxième République, youpi !
Second empire (un peu moins youpi). Désastre de Sedan, établissement de la
troisième république et pour de bon cette fois. Une Grande Guerre engendrait le
Poilu sous la houlette de Clémenceau Père -la-victoire™. 11 novembre, grande
liesse et… Je crois que ça s’arrêtait là. Nous étions à à peine plus de
quarante ans de ce jour de liesse. Parlerait-on aujourd’hui, si on enseignait
encore l’Histoire de France, du président Pompidou ?
Voilà ce qu’était l’histoire au niveau de l’école primaire
dans les années cinquante : une suite de personnages marquants, de dates à
retenir, sans qu’existât entre eux le moindre enchaînement logique. Il serait facile de démontrer qu’un tel enseignement n’a que peu d’intérêt et ne prépare que moyennement à une
compréhension quelconque du « destin » de la France. Certes. N’empêche
que, couplés avec la frise qui faisait
le tour du plafond de la classe, ces personnages archétypaux avaient au moins l’avantage
d’établir dans les jeunes cerveaux une certaine chronologie. Un enfant de onze
ans maximum n’ayant, à l’époque du moins,
pas les capacités de comprendre les grands courants qui parcourent l’Histoire,
cet enseignement avait au moins le mérite d’éviter que l’on puisse penser que
Charlemagne avait succédé à Napoléon. Chose qui aujourd’hui n’est pas
assurée. Pas plus tard que ce matin, j’entendais
sur la RSC™ un journaliste des Inrocks parler des quatre siècles d’esclavage des Noirs États-Uniens, faisant ainsi
débuter leurs malheurs avant la
découverte de l’Amérique…
En primaire je n'ai pas eu l'impression que mes enfants apprenaient grand chose en tout cas moins qu'en voyageant en France avec leurs parents (c'est eux qui le disent). Mais pour ma fille qui a passé son bac en 2001 le programme s'arrêtait en 1981
RépondreSupprimerPasser sous silence le passage de l'ombre à la lumière eût été criminel !
SupprimerOn n'enseigne plus la chronologie à l'école et on l'a remplacée par des "réflexions" sur des documents..
RépondreSupprimerLire le très bon ouvrage de Vincent Badré : "L'Histoire fabriquée ?" C'est édifiant...
Vos guillemets sont un euphémisme. N'importe comment, l'histoire est devenue un lieu de distillation de la moraline. Foutaise !
SupprimerLe château de nostre bon Roy Louis le onzième n'est pas situé à Joué mais au Plessis-lèz-Tours
RépondreSupprimerJe suis d'autant plus coupable que j'ai étudié 6 ans durant à l'Université François Rabelais de Tours à deux pas de La riche! Dieu merci, je ne l'ai pas situé à Chambray (également lès-Tours)...
SupprimerJe cours effacer ma honte mais j'en conserverai la douleur.
Ayant l'immense honneur de vivre dans la commune où le petit Joseph bara serait né et aurait vécu jusqu'au moment de son engagement dans les armées de la gueuse pour, selon la légende, envoyer sa solde à sa gentille maman qui avait du mal à finir les moi, je puis vous affirmer que ce n'est qu'une légende. Tout comme celle du jeune Joseph Agricol Viala d'ailleurs dont la carrière militaire fut également courte.
RépondreSupprimerLa réalité est légèrement différente. Joseph Bara est le neuvième enfant d’un garde-chasse du prince de Condé. Né à Palaiseau le 30 juillet 1779, il était le domestique d’un officier, l’adjudant-général Desmarres, cantonné à Bressuire. Alors qu’il promenait des chevaux, Bara fut assailli par des voleurs qui le tuèrent. Desmarres signala le fait au Ministre de la Guerre et sollicita une pension pour la mère. La suite, on la connait, c'est ni plus ni moins que de la fiction républicaine à deux sous, larmoyante à souhait pour émouvoir la lavandière de moins de cinquante ans de l'époque.
En fait, ce besoin pour un gouvernement tyrannique et aux abois de créer de toutes pièces de jeunes figures héroïques a été repris par ses suivants dans l'histoire européenne. Les soviétiques eurent leur Pavel Morozov, les nazis leur Horst Wessel, et les communistes leur Guy Môquet dont le seul fait d'arme fut de distribuer des tracts.
"das ist propaganda" aurait dit herr Doktor Goebbels.
L'histoire me semble, bien qu'elle l'ait toujours plus ou moins été, de plus en plus prétexte à propagande depuis qu'on porte sur elle des jugements à partir de valeurs supposées être celles de notre époque.
SupprimerCourant juillet, j'ai pu lire un article à propos de je ne sais plus quel obscur historien de gauche dont j'ai oublié le nom et qui se présentait comme un "historien engagé". A ce compte, il est clair que pour ce genre de zozo la recherche de la vérité passe au millième plan.
SupprimerBonne mise au point de Koltchak.
RépondreSupprimerEt Louis XIII fut un grand Roi.
Pour le reste, comme Vu des collines a raison !
J'ai eu la chance d'apprendre très tôt les grandes étapes de l'histoire de France à travers une série d'albums édités par FR3 dans les années 70 (L'Histoire de France en Bandes Dessinées), une époque où la démagogie et le consumérisme n'avaient pas encore totalement envahi le monde de la presse enfantine. Ceci m'a beaucoup servi par la suite et j'ai d'ailleurs choisi d'étudier l'histoire à l'université. Et tous les ans, qu'il s'agisse d'entamer l'étude du monde grec des guerres médiques à Alexandre, ou de l'Europe du début du XIIIème siècle à la Renaissance, nos vénérables professeurs nous faisaient réaliser des frises chronologiques à apprendre par cœur en nous expliquant que nous ne comprendrions rien au cours sans une maîtrise impeccable de la chronologie. La Nouvelle Histoire et l'étude du temps long des sociétés, c'était pour après, à partir de la maîtrise.
RépondreSupprimerVous aviez de bons professeurs !
SupprimerC'étaient des profs de fac, des historiens, dont une bonne partie avaient déjà largement dépassé la cinquantaine, voire la soixantaine à cette époque. J'ai récemment appris le décès de l'un d'entre eux à l'âge de 88 ans. Bref, une autre génération. Ceci étant dit, je ne suis pas sûr que l'apprentissage de la chronologie ait été abandonné au niveau universitaire: je ne vois pas trop comment on peut faire de l'histoire sans connaître ses dates sur le bout des doigts.
SupprimerAh, ces royalistes, c'était mieux avant, peut être comme peut être pas mais comme tout système humain, ce régime avait certainement ces défauts comme ces qualités
RépondreSupprimerDe toute façon, l'histoire est écrite par les vainqueurs
Pour l'étude de l'histoire, je suis consterné quand je regarde les manuels d'histoire de mes enfants,c'est n'importe quoi!
Je n'évoque pas la géographie, là aussi c'est désastre
On pourrait résumer l'histoire de ce pays ainsi, avant les français étaient tous méchants et racistes et c'est pour cela que nous devons marcher le dos courbé pour supporter le poids des erreurs de nos ancêtres
Il est donc inutile d'enseigner l'histoire
Il n'y a pas que le problème de la chronologie, il y a aussi l'importance qu'on donne ou ne donne pas à certains événements par rapport à certains autres.
RépondreSupprimerAinsi je me souviens que ma fille en classe de 5ème avait passé des semaines et des semaines sur la condition des paysans au Moyen-Age.
Et quand on lisait le cours, on avait l'impression de lire des tracts de la CGT !
Et puisque j'y suis j'ajouterai qu'en Français ce n'était guère mieux.
Six mois pour étudier "Printemps au parking" de la grande écrivaine - puisque c'est comme cela qu'elle veulent se faire appeler - Christiane Rochefort.
Petite précision d'importance : concernant les Angot, Despentes, et consoeurs, on écrira de préférence "écrit vaines".
SupprimerEt pour ceux qui n'auraient jamais entendu parler de cette auteuse, je ne résiste pas au plaisir de vous copier comment, en 1969, Grasset présentait ce livre.
RépondreSupprimer"Il était une fois un taurillon, qu'on opérait, sous anesthésie pour le transformer en veau comme on fait à tous ses pareils afin de leur mettre un joug. Mais, soit qu'on l'eût mal endormi, soit qu'il fût très sensible, soudain pris de panique, il brisa sa clôture et, sans bien savoir ce qu'il faisait, fonça au hasard dans les ries.Au coin de l'une d'elles, il rencontra un Merdier occidental, sorte de lion local assez féroce, mais atteint d'une horrible maladie, le virus paludis occidentalis, qui sépare la tête de la queue et ne laisse que les yeux pour pleurer et la langue pour causer. Instruit pas son propre malheur, le Merdier Occidental reconnut aussitôt une bête échappée du zoo, et, bouleversé de tendresse, prit le taurillon perdu sous sa protection. Bien sûr ils ne parlaient pas la même langue. Mais ils portaient la même blessure, infligée par les mêmes maîtres. Ils purent se comprendre en léchant leurs plaies.
La passion est le plus court chemin d'une question à sa réponse.
Le lion guérit, rassembla ses morceaux, et comprenant le sort auquel on le destinait, le taurillon vit rouge et devint furieux selon sa loi naturelle, et joyeusement ils retournèrent à l'état sauvage."
Je vous demande de m'excuser pour les fautes de frappe, mais comme dirait sûrement Lénine, on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs !
SupprimerJe me souviens avoir lu ce roman il y a une quarantaine d'année et je l'ai toujours dans ma bibliothèque. Il m'avait bien plu mais la présentation que vous citez ne me semble pas refléter ce que j'avais lu. Il faut dire qu'avec mon amnésie totale des choses lues...
Supprimer"le Petit Bara est mort HEROÏQUEMENT en criant Vive la République !"
RépondreSupprimerleçon d'histoire CM1 1963
école communale de S. (Eure - Maîtresse : Mme Roussel)
50 ans plus tard je m'en souviens encore....
Comme quoi les mensonges se retiennent mieux que la vérité.
SupprimerQue peut la lettre de l’adjudant-général Desmarres qui avait Bara sous son commandement et qui a relaté sa mort à l'état-major, face aux manuels de la république ?
J'ai également appris cette connerie dans les manuels d'histoire de mon enfance. Fort heureusement, passionné d'histoire et peu enclin à gober tout et n'importe quoi, j'ai lu de nombreux livres d'histoire sérieux écrits par de vrais historiens. Il fallait avoir l'aplomb d'un Robespierre pour dépeindre ce garçon, domestique d'un officier, sous les traits d'un hussard qui chargeait les vendéens (discours du 8 nivôse).
Les légendes se créent en dépit de toute évidence. Rappelons-nous l'"affaire" Méric...
SupprimerLe problème, c'est que ce sont souvent les légendes qui restent.
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