Les aventures
de M. El-Hasad me rappellent qu’il y a plus d’un an c’était le printemps arabe.
Cette merveilleuse période a amené tous les beaux résultats que l’on sait. J’avais
écrit à l’époque deux textes sur la question (parus sur Facebook). Vu que les
choses ont l’air de se compliquer bougrement pour le chef de l’état syrien, je
pense utile, afin d’édifier mes contemporains, de les soumettre à leur lecture.
Le premier traite des problèmes pas toujours faciles qui se posent à tout
dictateur.
Admettons que je sois
un dictateur sanguinaire (et corrompu, bien sûr). Comment suis-je
parvenu au pouvoir, déjà ? Disons que mon pays était en pleine anarchie
et que mes compagnons d'armes, tous bègues, suite au petit coup d'état
que nous avions organisé ensemble m'ont poussé vers le devant de la
scène parce que je causais bien dans le poste. Ou alors que mon
prédécesseur, lui même dictateur sanguinaire et dont j'étais le
chouchou, avait tourné gâteux. A moins qu'il ne se soit fait dégommer
par un exalté au cri d'Allahou akbar ! (mort au tyran!).
Bref
me voici dictateur sanguinaire. Je gouverne donc, comme il se doit, le
dos au mur, une mitraillette à la main, prêt à faire feu sur toute
velléité d'oppostion. Pour employer une métaphore. Je ne suis pas
réellement adossé à un mur, je sais simplement que si je baisse ma
garde, ce qui m'attend c'est dans le meilleur cas l'exil (si je cours
vite) et dans le pire douze balles dans la peau. Les démocrates n'aiment
pas vraiment les dictateurs sanguinaires. C'est d'ailleurs réciproque.
La mitraillette métaphorique n'est pas non plus dans mes mains. Elle
symbolise les forces de l'ordre, police et armée à qui je délègue le
maintien de l'ordre. Le tout, c'est d'éviter que les chefs de mon bras
armé ne me renversent. Et mettent celui d'entre eux qui cause bien à ma
place. Je me méfie donc. Tout boulot a ses aléas...
Pour le reste, je fais ce que je peux.
J'essaie
de faire en sorte que mon peuple (que j'aime tant et qui ne me le rend
pas toujours bien) ne crève pas trop de faim. Ventre affamé n'a pas
d'oreilles et comme j'aime à faire des discours, un peuple sourd me
frustrerait. De plus, la faim fait sortir le loup du bois comme
l'émeutier de son taudis. Bref, on se développe un peu. Au passage, je
me remplis les fouilles et j'invite mes partisans, à tous les niveaux, à
en faire autant afin qu'ils sachent bien de quel côté leurs tartines
sont beurrées.
J'organise de jolies fêtes qui célèbrent ma
révolution. Le peuple aime les jolies fêtes, les défilés. Dans les
démocraties, il en organise même spontanément sous des prétextes divers
afin de pouvoir jouir du fin plaisir de marcher ensemble en braillant
des conneries. Mes défilés sont militaires plus que revendicatifs. Ils
montrent au peuple que leur argent est sagement utilisé et les rappelle à
la plus élémentaire des prudences sachant que même intérieur l'ennemi
reste l'ennemi et n'a qu'à bien se tenir...
Bref tout
serait parfait si ne se posait la question de mon éventuel départ. Dans
les démocraties, la solution est simple: il suffit d'être battu aux
élections ou de ne pas se représenter. Mais dans une dictature... Pas
d'élections possibles ou du moins pas d'élections susceptibles de mener à
un changement quelconque. Quand à l'abandon du pouvoir, il peut mener à
l'exil comme au poteau. On peut laisser le pouvoir à son fils quand on
en a un pas trop naze. Ou à son fils "spirituel"... Ça marche parfois,
pas toujours.
Du coup, on reste. Faute de solution
valable, on s'incruste. On se fait vieux et la gachette se fait molle...
Le peuple s'impatiente... Les alliés démocrates se découvrent des
réticences... Ça branle dans le manche... Si on ne meurt pas avant, ça
se termine très mal...
Combien de dictateurs respectés et fêtés dans le monde entier on fini dans les poubelles de l'histoire ? Citez m'en UN SEUL que l'on révère en dehors d'un cercle restreint de nostalgiques fanatiques ? UN SEUL !
Le gros problème des dictateurs et des dictatures c'est : comment on (s') en sort ?
Vous avez oublié un des aléas de la vie du dictateur, et non des moindres.
RépondreSupprimerQuand le dictateur, après une longue vie de dictature, respecté et fêté dans le monde entier, est obligé de quitter le pouvoir pour raison de guerre, révolution ou tout autre, voilà que le Tribunal pénal international s'avise que, finalement, il avait été un dictateur sanguinaire, et qu'en conséquence il se doit de s'emparer de sa personne, de le juger et, évidemment, de le condamner à finir le reste de ses jours dans ses geôles.
Il sera difficile à quiconque de citer un seul dictateur en fonction dont le TPI se soit saisi, sa spécialité étant de ne s'occuper que des dictateurs déchus.
Oui, c'est vrai, j'avais oublié ce détail. Surtout qu'en pays arabe, depuis le printemps dernier, il y a de moins en moins de collègues chez qui aller finir ses jours. Ça fait une raison de plus pour s'accrocher au pouvoir. Tout ça fait des martyrs en plus...
SupprimerMon cher Jacques, j'attire votre attention sur le fait que dans bien des cas il s'agit de tyrans et non de dictateurs.
RépondreSupprimerLa dictature est une bien belle chose en vérité. Lorsque le pouvoir légal n'arrive pas à juguler une crise intérieure avec les moyens légaux dont ils dispose, il confie alors les pleins pouvoirs à un homme pour une période donnée. Même notre belle démocratie une, indivisible et bientôt populaire possède sa version de la dictature avec l'article 16 de la constitution.
Le problème étant que les dictateurs modernes se font généralement tirer l'oreille pour rendre le pouvoir. Mais comment leur en tenir rigueur lorsqu'on voit dans quel état ils ont laissé le pays à leurs successeurs ? Franco a rendu l'Espagne à la monarchie et Pinochet a fait du Chili un des pays les plus sains d'Amérique latine.
Et puis le dictateur est économe de la vie humaine. Comparons le bilan humain de Pinochet et de Castro, ou celui de Franco avec celui de n'importe quel grand libérateur humaniste. Mais il a toujours tort et est un monstre parce qu'il est de droite. C'est certainement là sa plus grande faute.
En partie d'accord avec vous mais j'avais bien spécifié que je parlais de dictateurs SANGUINAIRE lesquels ressemblent aux tyrans comme Hollande à un sous-chef de bureau.
SupprimerCher Jacques, je vous sens mûr à point pour rédiger la Déclaration Universelle des Droits du Dictateur. D'ailleurs, le Dictateur n'est il pas un homme comme les autres ? ("Visez les couilles" répondrait une mienne amie si elle venait à passer par là.)
RépondreSupprimerC'est vrai que les droits des dictateurs sont souvent bafoués. Je note que ceux de leurs opposants, si sanguinaires soient-ils le sont.
SupprimerTrès beau plaidoyer cher Jacques,
RépondreSupprimerMais pourquoi sanguinaire, si les dictateurs sont sanguinaires, la faute en revient à leurs opposants qui au lieu de fermer leur grande gueule l'ouvre en défilant par groupes de 100.
Faut y pas être con comme un opposant pour exciter un gars achement sympa qui ne veut que leur bonheur même si c'est avec des matraques électriques.
Tiendez , du temps des gentils dictateurs africains, ils étaient réélus avec 99,99 % des voix, le 0,01 % était ou envoyé dans des " Center-parc" où on leurs expliquait le vilain geste qu'ils commettaient en votant mal, ou partaient à toutes jambes dans des pays démocratiques ou ils manifestaient leur mécontentement devant l' ambassade de leur pays de naissance et en plus ils pourrissaient la vie des hôtes en les fustigeant de racistes et autre colonisateur tout vivant gracement des subsides que leurs donne le pays de ces sales colonisateurs ou autres qui ont vidé leur terre des richesses de leurs sous-sol.
Voilà,voilà, c'est bon j'ai diplôme d'humaniste.
C'est certain que l'opposant est à la source de tous les maux. Surtout quand il s'arme pacifiquement...
SupprimerMildred a raison. Les tyrans et autres "dictateurs" d'aujourd'hui sont avant tout des victimes ! Ces pauvres gens ne peuvent pas prendre leur retraite. Ils sont donc contraints à leur corps défendant d'être complices, simples exécutants, de nouveaux donneurs d'ordres génocidaires. cf.
RépondreSupprimerhttp://leplouc-emissaire.blogspot.fr/2011/05/criminels-de-paix.html
Je vous relis et approuve de nouveau.
SupprimerJ'ai toujours eu un faible pour Idi Amin Dada, il est vrai qu'il n'a pas laissé que des bons souvenirs en Ouganda, mais dans l'ensemble, on l'a laissé vivre et mourir tranquille.
RépondreSupprimerCoach Berny
Lisez le billet du Plouc. Vous verrez que la solution retenue pour Amin Dada est plus humaine et moins coûteuse
SupprimerParfaitement, Staline, tiens, au hasard.
RépondreSupprimerAmitiés.