Bien des gens de droite se sont sentis trahis par Nicolas
Sarkozy en 2007. Après leur avoir promis qu’on allait voir ce qu’on allait
voir, il s’est mis à pratiquer une politique d’ouverture et a pris des mesures
peu susceptibles de les satisfaire. Seulement, ce revirement s’est avéré un
échec : les Français ne se sont pas ralliés en masse à son panache
rosâtre. Aussi s’est-il vu contraint lors de la campagne de 2012 de changer son
fusil d’épaule et de reprendre des positions plus droitières. Ça a failli marcher
mais certains ne se sont pas laissés convaincre et ont continué de ne pas
croire en la sincérité de son attachement réaffirmé à la « droite dure ».
Plus de 7 ans ont passé depuis mai 2007. Le triste M.
Hollande a atteint jusque dans son propre camp des niveaux d’impopularité
inouïs, Mme Le Pen est donnée en tête d’un éventuel premier tour, on parle de
droitisation de l’opinion et M. Sarkozy revient, soutenu par l’énorme majorité
des sympathisants UMP.
Nous l’avons vu hier soir affirmer qu’il avait sinon changé
du moins évolué et qu’il éviterait désormais de blesser certains par des propos
maladroits. On a senti le gars qui allait être gentil comme tout, qui
voulait rassembler les Français, du moins ceux qui sont rassemblables par lui. Rassemblement, je veux bien mais sur quelles
bases ? La ligne droite dure ne semble pas trop dans l’air, bien qu’une
nette majorité de ses sympathisants la réclament (seuls 20% seraient pour un
recentrage).
M. Sarkozy revient pour prendre la tête de l’UMP qu’il
déclare vouloir réformer de fond en comble mais le vrai but est 2017. Et c’est
là que ça se corse car le brave M. Juppé et le bon M. Fillon risqueraient de
lui faire de l’ombre au cas où une primaire serait organisée et qu’elle serait
ouverte à tous ceux qui se déclareraient de droite et du centre (il n'est pas interdit d'imaginer dans ce cas que de zélés anti-sarkozystes de gauche y participent afin de barrer la route à l'objet de leur haine). En ce cas, il
serait nécessaire de donner des gages aux centristes afin qu’ils se rallient
mais sans pour autant faire s’éloigner ceux qui sont plus à droite. Exercice
délicat. Le mieux serait évidemment de se débarrasser de cette guignolade, mais
sera-ce possible ?
Il est donc possible qu’afin d’éviter de se voir distancé
par l’incolore Alain ou l’insipide François (on peut inverser les qualificatifs
sans qu’ils perdent de leur pertinence) M. Sarkozy se voit contraint à faire
semblant de se recentrer, histoire de passer ce cap. Une fois choisi, il sera
toujours temps de corriger la trajectoire afin de séduire ou de rassurer sa
droite et au-delà. Les centristes, surtout les plus extrémistes d’entre eux ont
la particularité de se trouver nulle part et d’être contraints pour exister à
une alliance avec la droite. On peut donc les cocufier sans qu’ils rechignent
trop. Pourquoi s’en priverait-on ?
J’entendais ce matin le brave Raffarin déclarer, reprenant
les termes de VGE, que la France devait être « gouvernée au centre ».
C’était tellement vrai que M. Giscard d’Estaing n’a pas été reconduit. Ça l’est
encore moins aujourd’hui où, qu’on le veuille ou non, les mentalités ont
évolué, que certaines positions naguère considérées extrémistes sont
communément acceptées et que grâce aux dirigeants actuels la gauche risque de
se retrouver sinon marginalisée du moins profondément divisée. Le temps semble
venu pour un virage à droite toute. Aura-t-il lieu ? Je n’ai pas de boule
de cristal…