Rêver, quoi de plus beau ? Mais
aussi quoi de pus vain quand on ne passe
pas à la réalisation ?
Se dire d’une envie ou d’une
ambition qu’elle n’est
qu’un rêve inaccessible c’est se résigner voire s’enfoncer
dans le ressentiment et l’aigreur. Il est évident que certains
rêves sont irréalisables (se voir pousser des ailes, se convertir
au macronisme, rallier l’Amérique à la nage en quelques heures,
manger cinquante kilos de
boudin en moins de cinq minutes et remporter le premier prix à la
foire de Mortagne, etc.). Tant qu’à rêver, autant le faire en
s’assignant des objectifs à sa portée.
Lorsque
je fais le bilan de ma vie (on s’occupe comme on peut!), en dehors
de quelques remords, je le trouve globalement positif, pour
paraphraser M. Marchais quand il évoquait celui de l’URSS. J’ai
en effet réussi à réaliser mes rêves qu’ils soient petits,
moyens ou grands. Je ne parle pas de vagues velléités mais d’envies
récurrentes.
Adolescent,
je rêvais de passions amoureuses avec, de préférence, de jeunes et
jolies femmes. J’étais alors un petit gros. Ça ne semblait pas
gagné d’avance… Et pourtant, quand j’y repense, je peux dire
que la vie m’a plutôt gâté
de ce point de vue.
Une
ex m’ayant fait ressentir mon infériorité en matière de
diplômes, grâce à des concours, je me mis à les collectionner.
J’avais
envie de gagner de l’argent, et beaucoup si possible. J’y suis,
un temps, parvenu et ai pu goûter aux
avantages comme aux
limites des grandes tables, des
beaux hôtels et des grosses
voitures.
Mon
second beau-père m’ayant initié au bricolage, je me lançai dans
la transformation de taudis en demeures agréables. J’en suis à la
cinquième.
Il
y a trente ans de cela, la mort dans l’âme, je quittai la Corrèze
dont j’étais tombé amoureux pour Londres. Depuis quatre ans, j’y
possède une maison.
Plus
que d’un emploi stable et d’un lieu où m’enraciner, je rêvais
de changements de lieux et d’activités.
J’ai vécu en nomade.
En
gros, j’ai fait ce que je voulais.
Et j’en ai tiré la leçon : ce qui compte,
pour moi, plus
que le lieu à atteindre, c’est le chemin. Bien
sûr, sans désir de connaître le premier pourquoi se mettrait-on en
route ? Il faut aller voir, satisfaire sa curiosité et celle-ci
satisfaite passer à autre chose. Ça met à l’abri des regrets,
des envies, des frustrations.Ça permet surtout, le rêve réalisé
de relativiser son importance.
Peut-être
pour cela faut-il une certaine forme d’esprit, un goût certain du
risque. Mais si la sédentarité ne dit rien au nomade, pourquoi le
sédentaire rêverait-il de mouvement ? Chacun son destin et les
vaches seront bien gardées !