L’époque est venue où, secouant
l’intolérable joug du patriarcat, les femmes peuvent enfin
échapper à la domination masculine et ceci grâce à l’infatigable
combat des militantes féministes. Dans bien des domaines des
victoires éclatantes ont été remportées. Il reste pourtant
beaucoup à faire et certaines réformes, si elles offrent une place
à la féminisation n’en sont pas moins timides, incomplètes et
pour tout dire ne font que perpétuer la domination masculine. J’en
veux pour exemple l’écriture inclusive. Je m’étonne que
personne ne semble avoir été choqué par ce fait : quand on
écrit : « Les éboueur.e.s et les grutier.e.s sont en
général.e satisfait.e.s de leur.e sort.e », le e censé
représenter la forme féminine du mot arrive APRÈS la forme
masculine ce qui laisse, c’est évident, penser que les grutières
sont en position d’infériorité par rapport aux grutiers. C’est
proprement intolérable !
Seulement
existe-t-il une autre solution ? Je pense que oui. Les langues
romanes ont pour origine
principale la langue latine où existaient trois genres :
féminin, masculin et neutre. L’évolution
a fait que le neutre a disparu. Notons au passage que suivant les
langues le neutre a pu laisser place au masculin ou au féminin.
Ainsi en espagnol dit on « el flor » et « el mar »
tandis que nous parlons de la mer ou de la fleur. La
forme masculine prit le rôle de terme générique ce qui fait que
quand je dis que l’homme est un être vraiment
mignon cette qualité
s’applique également à la
femme. Parfois ce rôle est tenu par le féminin ainsi une souris ou
une araignée peuvent être mâles. Une estafette ou une sentinelle,
avant la féminisation des armées étaient des hommes. Par ailleurs,
en dehors de l’opposition homme/femme, il existe des espèces
animales ou mâle et femelle sont nommés différemment :
coq/poule, sanglier/laie, lièvre/hase, bélier/brebis,
etc. Quelle pagaille !
C’est pour remettre de l’ordre à tout ça que m’est venue
une idée toute simple et de nature à réparer les injustes brimades
faites aux femmes : donner à tous
les noms communs ou propres ainsi qu’à tous les autres mots une
seule et même forme, les rendre épicènes. Il va de soi que leur
donner la forme masculine serait inconcevable et,en l’absence de
neutre, il ne reste qu’une alternative : la forme féminine.
Ainsi,
quel que soit leur sexe ou leur genre, tous les anciens humains
deviendraient des femmes et
tous les moutons des brebis. On
pourrait, en cas d’ambiguïté préciser qu’on parle d’une
poule masculine ou d’une souris féminine. Par l’adjonction d’un
e (quand ils n’ont pas de forme féminine) tous les autres mots
(pronoms, adverbes, conjonctions, verbes, etc) seraient également
féminisés.
Exemple :
Incipit du Voyage au bout de la nuit (Voyage à la boute de la
nuite)
Ça
a débuté comme ça. Moi, j’avais jamais rien dit. Rien. C’est
Arthur Ganate qui m’a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin
lui aussi, un camarade. On se rencontre donc place Clichy. C’était
après le déjeuner. Il veut me parler. Je l’écoute. « Restons
pas dehors ! qu’il me dit. Rentrons ! » Je rentre avec lui. Voilà.
« Cette terrasse, qu’il commence, c’est pour les œufs à la
coque ! Viens par ici ! » Alors, on remarque encore qu’il n’y
avait personne dans les rues, à cause de la chaleur ; pas de
voitures, rien.
Ça
a débutée comme ça. Moie, j’avaise jamaise rienne dite. Rienne.
C’este Arthure Ganate quie m’a faite parlère. Arthure, une
étudiante, une carabine elle aussie, une camarade. One se rencontre
donque place Clichie. C’était après la déjeunère. Elle veut me
parlère. Je l’écoute. « Restonse passe dehorse, qu’elle
me dite.
Rentronnes ! »Je
rentre avec elle. Voilà. « Cette terrasse, qu’elle commence,
c’este poure les œuves
à la coque ! Viennes pare icie ! » Alorse one
remarque encore qu’elle n’ye avaite personne danse les rues, à
cause de la chaleure ; passe
de voitures, rienne.
Simple
comme toutes les grandes idées, non ?