..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

mardi 15 février 2022

And the best loser is…*

 


Il semblerait que le résultat de la présidentielle soit plié d’avance. Sauf grave accident de dernière minute (scandale sexuel particulièrement odieux, découverte de détournements massifs, assassinat de Brigitte à coups de bêche lors d’une cérémonie officielle, etc.) il est très probable que M. Macron soit réélu, plus ou moins les doigts dans le nez. A cela, il y a d’excellentes raisons : il bénéficie, va savoir pourquoi, d’une certaine popularité, le Français moyen a horreur de l’aventure et a été dressé à rejeter les extrêmes ou ce qu’on lui présente comme tel et aussi la peur du changement que l’on peut constater en tous domaines suivant le principe  qu'on ne change pas une équipe qui perd.

Les sondages sont clairs à ce sujet : quel que soit son opposant, M. Macron l’emporterait. On me dira que les sondages mentent, qu’ils sont truqués, que c’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses. Moi, je veux bien tout ce qu’on veut (c’est mon côté tolérant) mais je serais fort surpris que M. Lassalle, Mme Hidalgo ou M. Mélenchon soient élus dès le premier tour.

Nous en sommes donc réduits, à moins d’être des macronistes fervents ou résignés, à désigner celle ou celui qui perdra. Jusqu’à nouvel ordre, nous avons donc le choix entre trois candidats à l’échec : M. Zemmour, Mme Le Pen et Mme Pécresse. Pour ce qui me concerne, j’élimine cette dernière car malgré son ralliement de façade à des thèses droitières elle représente un centre droit si modéré que pour la différencier de celui qu’elle affronterait et en faveur duquel il est probable qu’elle se désisterait en cas d’échec au premier tour , il faut être du genre à disséquer, en vue d’une analyse poussée, un cheveu en quatre dans le sens de la longueur. Ce n’est pas mon cas.

Restent donc deux postulants à la défaite. Le Z, comme aiment à le désigner ses partisans et Mme Le Pen. Le premier, entre autres arguments, proclame que la deuxième ne sera jamais en position de gagner. Il semble, ce faisant, ne pas se rendre compte qu’il « bénéficie » d’un pourcentage de rejet bien supérieur à elle et qu’en cas de deuxième tour il obtiendrait un piètre score. Car s’il lui est possible de rallier les « intellos » de droite dure et quelques traîtres plus ou moins éminents de LR et du RN , son assise populaire reste faiblarde. Son opposante, quant à elle (toujours selon des sondages menteurs et truqués), recueillerait jusqu’à 45 % des suffrages, comme le fit Mitterrand face à de Gaulle en 1965. Ce n’est pas rien.

Si la défaite est inévitable, autant qu’elle soit le moins cuisante possible. Ce qui compte, c’est la progression du camp national. Présidentielle 2002 : Jean-Marie Le Pen : 17,79 %. Présidentielle 2017 : Marine Le Pen : 33,9 %. Prévisions 2022 (Toujours selon des sondages truqués autant que menteurs) : Marine Le pen : entre 43,5 et 45 % des voix. M. Zemmour pourrait-il faire mieux ?

Plutôt que le briser, il serait à mon sens plus utile d’entretenir cet élan qui finira bien un jour ou l’autre (Paris ne s’est pas fait en un jour!) à la victoire. Maintenant, si vous êtes, comme M. Zemmour, des fanatiques de Napoléon, libre à vous de le choisir.

* Et le meilleur perdant est…

samedi 12 février 2022

Je suis pour !

 


J’ai, avec les assassins, un point commun : nous sommes pour la peine de mort.

Entendons nous bien : il ne s’agit pas de l’infliger à qui aurait traversé en dehors des clous, aurait été soupçonné de mal voter, n’aurait témoigné qu’un amour modéré pour la république, aurait émis des restrictions sur l’utilité du passe vaccinal, n’aurait pas fait ses pâques ou aurait bu et mangé avant le coucher du soleil durant le Ramadan, aurait dépassé son découvert bancaire sans en référer à son conseiller, aurait dépassé un tracteur en franchissant une ligne blanche, aurait… ...mais j’arrête là vu qu’un recensement exhaustif de toutes les vilenies dont l’être humain est malheureusement capable est impossible à établir.

Je pense qu’elle devrait être réservée aux assassins et à certains meurtriers n’ayant aucune circonstances atténuantes et dont la culpabilité serait clairement avérée, l’intime conviction des jurés ne pouvant s’y substituer.

Un des arguments contre la peine de mort est qu’elles ne serait pas dissuasive. C’est l’évidence même. Bien que n’étant pas moi même criminel, je suppose que l’assassin lorsqu’il planifie son crime pense pouvoir le perpétrer sans être pris. Savoir qu’entre les XVIe et XVIIIe siècles ils risquaient d’être roués puis écartelés à quatre chevaux après avoir été dûment torturés ne semble pas avoir dissuadé les malandrins et autres bandits de grand chemin de l’époque. Je crains qu’aucune peine ne soit vraiment dissuasive. La question n’est pas là.

J’entends dire qu’en mettant à mort la société se ravalerait au rang des assassins. Et que fait-elle en emprisonnant ? Elle opère une séquestration ! Certes légale, mais la loi autorisant l’exécution des assassins rendrait ce « crime » légal. De même, les multiples amendes pour non observation de certaines injonctions ne s’apparentent-elles pas à une forme légale de racket et dans le cas de la fraude fiscale à une forme de loi du talion : tu m’as dérobé (ce que je considérais être) mon argent, je te ruine ? On m’objectera que c’est pour le plus grand bien de la société. Certes, mais la peine capitale, remède souverain contre la récidive, ne participe-t-elle pas d’une amélioration de la sécurité publique ?

L’abolitionnisme est basé sur le « Tu ne tueras pas » de la loi mosaïque, sur le principe rousseauiste que l’homme est intrinsèquement bon et surtout sur le désir d’être mignon qui pousse de plus en plus de nos contemporains à devenir végans. Tuer un animal ? Quelle horreur ! Alors, un être humain, je vous dis pas ! Quel dommage que les assassins n’aient pas ces scrupules !

Surtout qu’enfermer à vie un humain, quoi qu’il ait fait, ne me paraît pas moins cruel. De plus, ça nous coûte des sous.



mercredi 9 février 2022

Disparu des écrans


L’amitié, c’est un truc de jeunes. Ça laisse pourtant des souvenirs. L’autre jour, j’avais commencé à regarder un film de Chabrol avec Benoît Magimel. Il me sembla me souvenir que cet acteur avait joué dans le film de Philippe. Je googlai pour m’en assurer. C’était bien lui qui tenait le rôle de mon pote dans son récit autobiographique. Et, surprise, je vis qu’un article de Wikipédia lui était consacré. J’allais voir. Il était très court, une simple ébauche disant qu’il avait travaillé comme assistant réalisateur dans les années 70-80 avant de tourner un long métrage en 1992. Et puis plus rien. Disparu des écrans. Que des écrans ?

Philippe, je l’ai rencontré en 1967. Nous étions condisciples en terminale A au lycée de Rambouillet. Il m’avait tout de suite plu. Il était de ceux qui, comme moi, se demandaient ce qu’ils pouvaient bien faire là. Des jeunes un peu (beaucoup ? Passionnément?) paumés qui se cherchaient et qui mirent longtemps à se trouver. Si tant est qu’ils se trouvèrent jamais. Sur quoi peut se baser une amitié ou un amour ? Difficile à dire, surtout quand ils ont disparu, ne laissant que de vagues souvenirs et plus de questions que de réponses sur ce qui pouvait être à leur origine.

Quoi qu’il en soit, proches nous fûmes. Des années durant avant que la vie ne nous sépare. C’est en 93, alors que, de retour d’Angleterre, pas très en forme, plus enclin, suite à une de ces multiples ruptures qui ont jalonné ma vie, à ruminer le passé qu’à envisager l’avenir, que nous eûmes notre dernier contact. J’avais trouvé son numéro dans l’annuaire et mon appel fut transféré dans le Var où il se trouvait. Bien que 18 ans aient passé depuis notre dernière rencontre, la conversation fut amicale, nous parlâmes de chose et d’autres, il me déclara travailler sur un nouveau scénario après le flop total de son film, retiré des affiches après quelques jours. Je lui résumai brièvement toutes ces années sans nouvelles. Nous nous quittâmes après être convenus d’une visite qu’il me rendrait quand il se trouverait dans mon coin où sa sœur possédait une maison. Et puis plus rien. Disparu des écrans. Que des écrans ?

Pourtant que de souvenirs ! Les week-ends de bringue dans sa maison de campagne, avec les sorties au bal après un ou deux grogs au whisky (une chope, deux tiers de whisky, un tiers d’eau bouillante et en voiture pour l’aventure), les bains de minuit dans les ballastières ou personne dans la bande n’aurait été foutu de secourir qui aurait eu un malaise, les rentrées avec des filles plus attirantes le soir qu’au matin, ses visites impromptues autant que tardives suivies de parties de chasse en voiture dans la forêt de Rambouillet ou d’une virée à Orléans, histoire d’y prendre un pot (comme s’il n’y avait aucun troquet d’ouvert à moins de 100 kilomètres), les longues missives échangées lors de mes séjours au Sénégal ou en Angleterre, ses dernières visites à Tours où le cœur n’y était plus vraiment, vu qu’y ayant trouvé l’amour je tendais à me ranger des voitures. Huit ans de fâcheries passagères, de retrouvailles, d’éclipses… Une amitié de jeunesse où il m’arriva de le considérer comme mon mauvais ange (comme si j’avais eu besoin d’un mauvais ange pour déconner!) et où il arriva que mes folies le lassent.

Et me voilà, des décennies plus tard, ne me reconnaissant plus dans nos frasques passées, conscient cependant que sans elles , sans cette amitié, je ne serais pas ce que je suis devenu.



 

lundi 7 février 2022

La vie me gâte !

 


Je ne sais pourquoi mais il se trouve que pour la deuxième soirée de dimanche consécutive j’ai la chance de pouvoir regarder un de mes films préférés. Si on ajoute à ça de bonnes lectures, ce serait me montrer particulièrement ingrat de ne pas remercier la vie pour les somptueux présents qu’elle m’offre sans que je ne lui aie rien demandé.

Comme la regrettable Juliette Gréco, je ne suis pas un fanatique des dimanches ne serait-ce que parce que Mme Kelly et M. Praud, ces fainéants, ne travaillent pas et me privent égoïstement de plusieurs heures d’agréables loisirs. Mes démêlés avec une imprimante récalcitrante et des systèmes de paiement sur le Net peu accommodants eussent fait de celui d’hier une bien morne journée si l’appel de ma fille n’était venu ensoleiller sa grisaille. Et puis, le soir, une bonne surprise me fut faite par M. C 8 : la programmation d’un de mes films favoris, Les Galettes de Pont-Aven ! Un régal !

Bien installé dans un confortable fauteuil club Chesterfield, je pus pour la énième fois me réjouir à la vision des aventures D’Henri Serin, VRP en parapluies de son état avant de tout envoyer balader pour devenir rapin-ivrogne dans la cité des peintres et des galettes au beurre. Un film que seule la France des « swinging seventies » pouvait produire en ces temps de liberté et d’humeur polissonne qui virent ma jeunesse, « [temps]auquel j’ai plus qu’autre galé jusqu’à l’entrée de vieillesse qui son partement m’a celé », comme disait l’autre*. Aux côtés d’un Jean-Pierre plus excellent encore qu’à son accoutumée, une pléiade d’acteurs de qualité y incarnent des caricatures de stéréotypes particulièrement réjouissantes. La pulpeuse Andréa Ferréol dont la prestation dans La Grande bouffe nous fit découvrir les charmes y est parfaite en boutiquière ; Claude Piéplu, pèlerin invétéré que l’on retrouve en fin de film, met sa truculence au service d’une foi profonde qu’il souhaiterait faire partager ; Bernard Fresson en peintre cynique et paillard se surpasse et est à l’origine d’une passion pour le cul de d’une belle Québecoise dont la désertion plongera le pauvre Henri dans la soûlographie ; Romain Bouteille campe avec sobriété un curé plus vrai que nature ; quant à Dominique Lavanant il fallait penser à faire d’elle une improbable prostituée en costume bigouden d’apparat ; enfin, la charmante et douce Jeanne Goupil et son apparence quasi-virginale vient opérer la rédemption du bon Henri et en faire un virevoltant serveur de plage.

Je ne m’appesantirai pas sur toutes les scènes remarquables du film. J’en retiendrai deux, pour des raisons familiales. Le personnage créé par Mme Lavanant m’a rappelé ma mère. Entendons nous bien : ma génitrice, pour des raisons évidentes de religiosité et d’austérité morale n’aurait à aucun prix accepté de se livrer au commerce de la chair, activité dont je doute qu’elle eût d’ailleurs tiré grand profit. Seulement, nées à une vingtaine de kilomètres l’une de l’autre, en Basse-Bretagne, elles avaient en commun l’accent et émaillaient leur discours des mêmes mots bretons. L’autre est celle où, remplaçant au pied levé un chanteur victime d’un accident de Solex, Henri Serin interprète en duo avec Marie le Kenavo (Au revoir en Français) de Théodore Botrel. Il se trouve que cette chanson d’un marin quittant sa promise pour une lointaine mission était celle que mes parents chantaient ensemble lors des banquets de communions, fiançailles et autres mariages comme le voulait la coutume que j’évoquais ici il y a plus de dix ans déjà.

Pour ces raisons (sauf les familiales, bien entendu), je recommanderais à qui ne le connaîtrait pas ou n’en garderait qu’un lointain souvenir de regarder ce joli film.

* En l'occurrence François Villon


jeudi 3 février 2022

Deux bons livres

 

Au joli temps de leur amitié

Il est assez rares que je parle de mes lectures. Car il m’arrive de lire ! Pas de manière compulsive mais quelques dizaines d’ouvrages par an parfois. Seulement, peu méritent qu’on s’y attarde. Il se trouve que j’ai eu la chance d’en relire deux à la suite qui m’ont bien plu. Les deux sont d’auteurs Sud-Américains. De pays où il semble qu’on se livre encore à cet acte périlleux qu’est la vie. Mais venons en au fait :

La Tante Julia et le scribouillard, de Mario Vargas Llosa :

Un livre réjouissant et plus ou moins autobiographique où le prix Nobel péruvien nous narre ses amours compliquées avec sa tante Julia (en fait, la sœur de l’épouse d’un de ses oncles, désolé pour les amateurs d’inceste !) et sa fréquentation du scribouillard, auteur bolivien de feuilletons radiophoniques hanté par l’écriture et la haine des Argentins. La structure du roman est originale : Vargas Llosa y fait alterner ses récits autobiographiques et ceux relatant divers épisodes des feuilletons de son ami. Au départ, j’avais pensé qu’il s’agissait, comme le faisait Dos Passos, d’histoires parallèles dont les différents personnages finiraient par se rencontrer. Il n’en est rien. S’il y a bien rencontres, c’est qu’au fil de l’évolution de la folie du scribouillard ses histoires finissent par se mélanger : les noms s’échangent, des éléments biographiques de l’un sont attribués à l’autre et avant qu’il ne perde sa place et finisse en psychiatrie, ses feuilletons se font incompréhensibles et perdent leur audience. Si l’histoire d’amour d’un Mario de dix-huit ans et de sa « tante » plus âgée n’est pas sans rebondissement croquignolesques, notamment lorsqu’ils parcourent le pays à la recherche d’un maire suffisamment irrespectueux des lois pour les marier, ce sont les passages consacrés au graphomane et à des feuilletons qui sont les plus réjouissants. Avant de s’enfoncer dans les délires sus-mentionnés, l’auteur parsème ses récits d’allusions fielleuses aux nombreuses tares qu’il attribue aux Argentins, accusés, entre autres, d’être des assassins par nature, d’ignorer tout de l’hygiène la plus élémentaire, et d’avoir pour femmes d’infâmes putains. Je pense qu’en écrivant ce récit, Vargas Llosa s’est régalé. C’est ce que j’ai fait à le lire.

Le Général dans son labyrinthe, de Gabriel Garcia Marquez :

L’auteur de Cent Ans de solitude nous narre les derniers jours de Simon Bolivar, entre son départ de Santa Fé, quartier de Bogotá, qu’il fuit sous les quolibets après avoir démissionné de la présidence et son ultime exil, la mort. Le « Libertador » qui a vu son rêve d’une Amérique du Sud unie sombrer dans les rivalités locales est malade, très malade. Il connaîtra des rémissions avant de replonger puis, pour un temps, de sembler renaître. Le lecteur risque, lui aussi, de se sentir dans un labyrinthe, tant les palanquées de généraux et de colonels créent la confusion à la manière des princes et des comtes de La Guerre et la paix. Les références à des événements historiques de l’épopée du Général qui ne nous sont pas familières participent à son égarement. Mais qu’importe ? Au fil des étapes du voyage, des rencontres, prétextes au rappel d’épisodes passés, se dessine le portrait d’un grand homme sur sa fin, de ses colères, de sa versatilité, de ses amours tumultueuses, de sa prodigalité, de sa bravoure, de sa rouerie, de sa complexité se dessine un portait. Portrait sans complaisance ni cruauté, aux antipodes de l’hagiographie, brossé par un Garcia Marquez au meilleur de son art. Un livre impossible à résumer comme peut l'être le parcours du prisonnier d’un labyrinthe. Un livre riche.

En guise de « bonus » :

Ces deux prix Nobel de littérature furent neuf ans durant copains comme cochons. Jusqu’au jour où, dans le hall d’un cinéma de Mexico, le 12 février 1976 pour être précis, Le bon Mario mit brutalement fin à cette belle amitié par un direct en pleine face du vaillant Gabriel. Problème conjugal ? Différend politique ? Nul ne le sait, les deux ex-amis ayant promis d’en tenir la raison secrète. Garcia Marquez mourut sans rien en dire et Vargas Llosa décida d’en faire autant et de laisser aux historiens le soin de faire la lumière sur l’affaire. On dira ce qu’on voudra, mais ces Latinos ont su conserver un certain art de vivre.

Triste fin d'une amitié