..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

dimanche 4 août 2019

Promenade (s)

Jeudi dernier, en compagnie de ma fille, nous allâmes visiter la collégiale Saint-Évroult de Mortain avant de visiter, à Gers, le musée régional de la poterie. Visites intéressantes s'il en fut. La collégiale est magnifique. Fondée en 1082 par Robert, Comte de Mortain et frère de Guillaume qui cessa d'être surnommé le Bâtard en conquérant l'Angleterre. Tout en visitant l'église, nous extasier sur sa beauté ne nous empêcha pas de deviser. C'est alors, que, me trompant de Robert, je dis à ma fille que ce brave homme avait combattu son frère à la bataille de Tinchebray. Colossale erreur !

Notre Comte de Mortain ne fut vaincu par aucun de ses frères, c'est son neveu, fils de Guillaume et surnommé Courteheuse (courte botte car, petit il portait des bottes à sa taille) que son frère, roi d'Angleterre, Henri 1er Beauclerc défit dans cette bourgade voisine d'où je vis avant de le garder prisonnier jusqu'à son trépas survenu à l'âge canonique de 8o ans passés.

Il faut dire que ce Robert était un peu turbulent. Très jeune il se révolta contre son papa et aurait même blessé Guillaume lors d'une bataille. Peut-être est-ce pour cela que le Conquérant, préféra que son frère cadet Guillaume le Roux lui succédât. Mais Robert ne se résigna pas à n'être que Duc de Normandie, occupation pourtant prenante vu qu'à la mort de son père, les barons normands eurent le front de contester son autorité et qu'il lui fut pour le moins difficile de la rétablir et d'empêcher les guerres privées. Il se trouve que Guillaume le Roux convoitait autant le duché de son frère que ce dernier désirait son royaume.

Une révolte de barons échoua à renverser Guillaume II et, mauvais coucheur, il débarqua avec son armée en Normandie. Mais parce qu'une bonne alliance vaut mieux qu'une mauvaise guerre, les frères se réconcilièrent, se désignèrent héritier l'un de l'autre par le traité de Caen et s'entendirent pour tenter de récupérer les terres que leur benjamin Henri Beauclerc possédait en Normandie. L'alliance ne dura pas. Robert dénonça le traité. La guerre reprit. Nous étions en 1096. Un légat du pape parvint à calmer le jeu : moyennant une forte somme lui permettant de lever une armée pour aller délivrer le tombeau du Christ, Robert partit pour la Palestine, laissant l'usufruit du duché à Guillaume. Ce n'est qu'en 1100 que le duc revint.

Un mois auparavant, Guillaume avait cessé de vivre, ne laissant aucun héritier. Henri, en fourbe qu'il était, s'était empressé de se faire couronner. Cela n'eut pas l'heur de plaire à Robert qui débarqua à Portsmouth avec son armée. Henri se porta à sa rencontre mais la bataille n'eut pas lieu. On lui préféra un traité par lequel Henri abandonna à son frère ses terres normandes, lui concéda une rente annuelle de 3 000 mille livres moyennant quoi Robert renonça à la couronne. Évidemment, ce traité ne fut pas respecté, les actes belliqueux alternèrent avec des réconciliations sans lendemain jusqu'en 1105 où Henri Beauclerc, débarqua en Normandie avant de livrer le 28 septembre1106 la bataille décisive de Tinchebray qui lui permit de s'approprier le duché et, accessoirement de capturer son frère qu'il garda prisonnier 28 ans durant avant que la mort ne le délivre.

J'ai pris un vif plaisir à me promener dans la vie de ces trois frères. Je ne vous en livre qu'un résumé. L'existence de chacun d'eux est passionnante, riche en rebondissements. Y apparaissent une foule de personnages secondaires, cupides, intrigants ou débauchés (quand ils ne sont pas les trois) qui montrent si nécessaire que la politique d'aujourd'hui est bien terne comparée à celle des XIe et XIIe siècles et que les conflits familiaux ne datent pas d'hier.

M. Georges

Contrairement à ce que certains pourraient penser, je ne vais pas ici parler d'un patron de boxon mais d'un mien professeur. Un de ceux qui vous aident à ne pas trop penser. 

Alors que je suivais des cours au CFPEG de Tours, je l'aperçus sous le préau. Il était grand, un peu voûte comme ceux qu'une rapide croissance a voûtés. Je m'approchai de lui et, pensant que le flatter sur son enseignement lui plairait, je lui adressai la parole. A ma surprise, mon enthousiasme le laissa de marbre. De sa voix douce et un peu lasse, il me déclara : « Voyez-vous, nous approchons des vacances et, quand on y réfléchit, des vacances, on n'en a pas tellement dans une vie... » Mes louanges en furent douchées mais se créa entre nous une sorte d'amitié.

Je me souviens que, lui demandant pourquoi il s'était donné la peine d'être agrégé, il me répondit que, sa femme étant promise à sortir majeure de sa promotion de Normale Sup, il n'avait pas le choix. Une autre fois, il se déclara l'agrégé le plus ignare de France. Toutefois, je me souviens de l'entendre me dire que s'il avait à emporter des livres sur une île sans espoir de retour il emporterait des classiques grecs et latins. On ne se refait pas...

Avec mes meilleurs copines, nous fûmes invités dans son beau studio du vieux Tours, il nous invita dans des restaurants classieux et nous l'invitâmes chez moi.

Quand j'épousai Nelly, je l'invitai. Il assista à la cérémonie mais, plutôt que de participer aux agapes, il préféra nous inviter le lendemain à l'Hostellerie du Roi à Guingamp où nous nous régalâmes d'une araignée magnifique.

Nous nous revîmes un peu plus tard dans sa maison de bord de mer où son épouse encouragea Nelly à me pousser à préparer l'agrégation comme si ç'avait été une chose capitale. Il n'empêche que c'était gentil de sa part.

Quelques années pus tard, je l'aperçus dans un supermarché de Lannion. Il avait l'air bien affaibli. Il m'apprit qu'il avait subi une opération à cœur ouvert. Il nous convia à dîner. Les choses avaient bien changé. Arrivant en Mercedes, sa villa de bord de mer me parut une bicoque. Nous dînâmes autour d'un feu, buvant du Four Roses puis de bons vins. Il me rappela qu'un temps fut il m'arrivait de tenir des propos cryptocommunistes. Eh oui, les temps changent et j'avais bien changé...

Plusieurs années passèrent. Mes heures de « gloire » aussi. Me trouvant dans la panade, j'essayai de le contacter des fois qu'il eût pu me conseiller. Sa femme me répondit qu'il était hospitalisé pour des problèmes cardiaques. Ce furent les dernières nouvelles que j'eus de lui.

Je suppose qu'il est mort aujourd'hui, ce serait de son âge... Peu importe au fond, ce qui reste, M. Somerville, c'est que vous fûtes pour moi un maître.

PS : Je rouvre les commentaires de manière à ce que les sous-merdes qui viennent déposer ici leurs anémiques étrons puissent exposer à qui veut les lire l'incommensurable néant de leurs tentatives d'expression.

lundi 22 juillet 2019

Conquête de la lune

Le vingt-et-un juillet 1969, j'eus une surprise en arrivant au bureau de poste où je remplaçais un facteur en congé. Avant d'être d'une ponctualité exemplaire, j'avais une forte tendance à être en retard. Ce fut le cas ce matin-là. La receveuse, une femme dont l'extraordinaire laideur pouvait expliquer le caractère aigri, m'adressa d'agressifs reproches. A ma grande surprise, une employée prit ma défense, arguant qu'en un tel jour, un retard était excusable. J'appréciai ce soutien inattendu. Cependant, je m'interrogeai sur son origine. Qu'est-ce que ce jour pouvait bien avoir de si spécial pour qu'il justifiât mes errances ?

Car il se trouve que, si j'avais entendu parler d'une expédition lunaire des Étasuniens, vu le peu d'intérêt que j'y trouvai, je ne savais pas que ce grand pas pour l'humanité s'était produit quelques heures avant que j'embauche. La personne qui m'avait défendu pensait donc que comme 500 millions de terriens j'avais passé ma nuit les yeux rivés sur mon écran de télévision. Ce n'était évidemment pas le cas car même si j'avais été au courant de l'événement, je ne serais pas resté éveillé pour y assister. Je dois confesser ma totale indifférence à la conquête spatiale. Je ne saurais expliquer pourquoi. Toutefois, je ne vois pas en quoi le petit pas de M. Armstrong a pu changer ma vie.

Sa phrase historique, probablement aussi spontanée que la récitation d'un écolier, avait de la gueule. Enfin beaucoup plus que n'en aurait eu l'exclamation « Ah, putain, encore une merde de chien ! » si son pied s'était posé sur une de ces déjection qui font l'attrait des trottoirs de nos cités. Dieu merci, la lune étant aussi dépourvue de ces canins que de vertes prairies, le risque d’occurrence de cette phrase était nul.

jeudi 18 juillet 2019

La grosse arnaque !

Les gilets jaunes se sont révoltés contre la hausse de certaines taxes. Pas de toutes. Celles sur le tabac, bien que connaissant une croissance exponentielle, semblent ne susciter de protestations que chez les buralistes alors qu'environ un tiers des Français fumeraient quotidiennement. Ça paraît surprenant, non ? En fait, l'explication est simple : grâce à des décennies de campagnes anti-tabac, on est parvenu à transformer la plupart des fumeurs en coupables qui ne doivent qu'à leur manque de volonté de ne pas avoir arrêté. Tout coupable mérite une sanction. Et la sanction tombe sous la forme de nouvelles taxes dont nul ne saurait s'indigner. Le but final serait grâce à des prix prohibitifs d'éradiquer le tabagisme. On ne peut pas dire que ça marche vraiment. Bien sûr, on vend moins de tabac en France. Seulement, les achats ans les pays limitrophes aux tarifs moins exorbitants augmentent considérablement de même que la contrebande.

Le fumeur est accro, et il est difficile de le dissuader de se suicider. Il sait depuis longtemps que le tabac lui fait perdre 9 ans de vie (dont une ou deux d'EHPAD), qu'il risque la cécité, l'infécondité, l'impuissance, un cancer pas gentil du tout, plus de problèmes cardiaques qu'un curé ne saurait en bénir, l'amputation de plusieurs membres, etc. Et malgré ça, il continue, le bougre. Malgré les risques, le coût, la culpabilité, il continue.

S'il a un minimum de sens civique, il souffre en plus du tort qu'il fait à la collectivité. Car le fumeur coûte bien plus qu'il ne rapporte ! Si on en croit M. Pierre Kopp et l'étude que cet éminent professeur a consacré à la question en 2015, c'est à plus de 120 milliards que s'élèverait le coût social du tabagisme. Cependant, l'essentiel de ce coût social est constitué par celui des vies perdues, de la perte de qualité de vie et de celui des pertes de production. Car une année de vie a un prix : 115 000 € selon l'étude ! Avouez que vous ne pensiez pas valoir autant ! Sans compter que la mort « prématurée » du fumeur se produit en moyenne à 71 ans et qu'il est rare qu'entre ce bel âge et les 80 ans « normaux » on soit très productif.

Quel que soit le coût réel du tabagisme, il n'en demeure pas moins que l'état a besoin des 15 milliards qu'il lui rapporte. D'autre part, en admettant que les fumeurs cessent tous de fumer, les économies sur les dépenses de santé ne se feraient sentir qu'à plus ou moins long terme et qu'en attendant ces beaux jours, il faudrait prendre dans la poche des contribuables le manque à gagner. Environ 400 € par an et par foyer fiscal ! Les gens en seraient-ils satisfaits ?

Le gouvernement se trouve donc dans une position délicate : pour des raisons de santé publique, il se doit de prôner la fin du tabagisme tout en priant le bon Dieu que celle-ci soit TRÈS progressive. Il faut donc s'attendre à ce que les taxes sur le tabac continuent de compenser la baisse du volume des ventes. Ça a bien marché l'an dernier : 750 millions de francs de rentrées supplémentaires dans l'indifférence générale !

La culpabilisation est donc efficace. Elle permet de taxer à tour de bras sans soulever de protestations. Ne serait-il pas bon pour tout gouvernement de lancer de longues campagnes de sensibilisation aux terribles méfaits du diesel, du sucre ou des topinambours afin de pouvoir à terme augmenter sensiblement les rentrées de l'État ?

mardi 16 juillet 2019

Dieu que l'amour est triste !

Une grande vague de paresse m'ayant récemment submergé suite à de petits ennuis de santé, plutôt que de faire un ménage depuis trop longtemps délaissé ou mettre en ordre le jardin , je me contente du minimum syndical. Je cueille des haricots, je cuisine, je fais mes courses et la vaisselle (c'est à dire que je remplis puis vide tour à tour le lave-vaisselle). Cela me laisse des loisirs que j'occupe à croiser les mots, lire ou regarder la télé. Ainsi, cet après-midi ai-je regardé deux Maigret avec dans le rôle principal M. Cremer. Il y avait bien longtemps que je ne m'étais pas replongé dans le monde de Simenon...

Dès la sixième, j'avais commencé à lire ses romans. Je me demande ce que je pouvais à cet âge y comprendre mais il faut croire que j'y trouvais mon compte. Je l'ai dit et redit, mes lectures ne me laissent peu voire aucun souvenir. Pourtant j'ai beaucoup lu. Simenon fut un de mes auteurs favoris. J'ai usé et abusé de ses œuvres. J'ai lu des tas de Maigret mais aussi d'autres romans, ses derniers ouvrages autobiographique ainsi que des livres à lui consacrés. Jusqu'à l’indigestion. Ça m'est souvent arrivé : je m'entiche d'un auteur, je lis parfois des dizaines de ses livres et puis, allez savoir pour quoi, je n'en peux plus et l'idée même de les relire un jour m'apparaît improbable. La liste de ces désamours est longue, elle comprend Balzac, Zola, Mauriac, Modiano, Faulkner, Caldwell, Dickens, Pratchett, Rankin, Vaugh, Wodehouse, et bien d'autres dont le nom a rejoint leurs œuvres dans mon total oubli.

Simenon est un cas spécial. Disons qu'il y avait une raison à mon désamour. Plus que la lassitude, c'est l’écœurement, qui m'a fait le quitter. Je n'en pouvais plus de son univers glauque, étouffant presque désespérant. Avec un talent indéniable, il a su décrire un monde disparu, celui des années trente à cinquante voire soixante. Seulement, il nous en a donné une image terrible : quel que soit le milieu où se déroulent ses intrigues y règne une atmosphère pesante, ça sent le renfermé et la tristesse. Les familles y ont tant de secrets qu'on se demande si ce ne sont pas plutôt les secrets qui y ont des familles. De tous les éléments qui participent à l'établissement d'un climat délétère, le sexe est probablement le plus actif. Il n'est pas source de joie ou de plaisir. On le subit. Il est compulsif ou passif. Les femmes n'ont souvent le choix qu'entre la frigidité et la nymphomanie (ce qui, selon Gary, ne sont que deux symptômes du même mal être). Les hommes n'y trouvent qu'un soulagement à leurs pulsions.

Un autre élément récurrent est l'alcool. Pas festif non plus. On boit pour oublier problèmes, échecs et malheurs. On boit histoire de boire comme dans certains Maigret où on se demande dans quel état le commissaire va finir la journée.

A cela rien d'étonnant quand on connaît un peu la vie de l'auteur, son penchant pour la boisson, sa sexualité envahissante (n'a-t-il pas déclaré avoir « honoré » 10 000 femmes, en général prostituées ?) comme la constance avec laquelle le malheur frappait les siens. La description à peine masquée que fait de lui et de son entourage Alphonse Boudard dans Cinoche en 1974 est édifiante à cet égard. On pourrait même se demander comment les intéressés ne l'ont pas poursuivi pour diffamation si on oubliait que déclarer se reconnaître dans ces tristes clowns eût été peu glorieux.

Tout cela dit, il n'en reste pas moins que Simenon est un grand, un très grand écrivain. Dont il ne faut peut-être pas abuser...