L’autre jour j’entendis les messages laissés par ses
auditeurs sur le répondeur de Là-bas si j’y
suis de l’inénarrable Daniel Mermet. Ça me laissa perplexe : tous ces
braves gauchos semblaient persuadés que la révolution était au coin de la rue (un
peu comme la fille de joie de L’Accordéoniste,
chantée par Mme Piaf). Le problème est que ce coin de rue a des airs d’horizon :
plus on avance, plus il recule, comment voulez-vous qu’on l’atteigne ? Il y a
quarante-sept ans (j’étais alors en classe de première) elle y était déjà, au
coin de la rue cette fameuse révolution, c’est du moins ce que n’arrêtait pas
de me seriner une militante de je ne
sais quel mouvement trotskiste qui s’était mis en tête de m’endoctriner…
Depuis : pas grand-chose.
De l’autre côté de l’échiquier politique, certains s’attendent
également à un bouleversement imminent. Qui n’irait pas dans le même sens que
celui voulu par les marxistes. Quoique, par certains côtés…
Un gars se crame devant Pôle emploi, deux autres font les
guignols au sommet d’une grue, si ce ne sont pas là des signes certains de l’imminence
des orages désirés, je ne sais pas ce qu’il vous faut.
Si on accepte donc l’idée que dans un avenir proche vont se
déchaîner des troubles inouïs, que faire en les attendant ? Faut-il continuer de payer les traites de ses
emprunts ? Est-il utile d’envisager de repeindre la grille d’entrée ?
A quoi bon s’inscrire au club Macramé et Bilboquet ? Pourquoi faire un
loto si la révolution se déclenche avant le jour du tirage ?
Je serais pourtant prêt à parier que les plus fervents
partisans des inévitables troubles continuent de mener leur petite routine.
Comme s’ils n’y croyaient pas vraiment.