Le ciel bas et lourd y a peut-être une très légère tendance à peser comme un couvercle sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis mais pas sur l’esprit guilleret en proie à la franche rigolade. Novembre a évité de justesse la dernière place dans le classement des mois, ce qui, selon moi, est un peu sévère pour un mois qui, sans être le meilleur, a tout de même quelques mérites.
Son premier jour est la Toussaint, fête souvent confondue avec le second, fête des morts où tout un chacun s’empresse d’aller offrir des chrysanthèmes à ses défunts même à ceux dont ce n’était pas la fleur favorite. Le neuvième voit tout ce que le pays compte de leaders politiques se rendre dans un coin perdu de Lorraine afin de se recueillir sur la tombe d’un général que tous ont appris à aimer après son décès. Deux jours plus tard, on honore nos vaillants poilus. Le 15, un groupe plus restreint célèbre l’anniversaire de ma fille. Il nous reste alors 15 jours pour nous remettre de tout cela.
Novembre est le mois où le Corrézien se régale des derniers cèpes, grille des châtaignes et évite de se promener dans les bois déguisé en sanglier. C’est aussi le temps des premiers frimas où le cuisinier avisé que je suis renoue avec des plats roboratifs, peu coûteux et délicieux comme le civet de lapin, la poule au riz, le pot au feu ou le bourguignon qu’il alterne avec sa production charcutière.
C’est aussi le temps des ultimes travaux au jardin : taille des haies et arbres, dernière tonte de pelouse, récolte des derniers artichauts, confection des derniers bouquets de dahlias, labour d’automne démontage de la mini-serre avant que les forts vents d’hiver ne la démantibulent complètement et grand toilettage des planches où, le printemps revenu tenteront de pousser haricots, tomates, patates, fraises et courgettes qui feront le bonheur des escargots, limaces, cloportes, oiseaux divers et mildiou.
Quoi qu’en pensent les esprits chagrins comme M. Baudelaire dont la réputation d’infatigable boute-en-train était largement usurpée, novembre nous réserve moult joies et occupations . Du moins bien plus que les tristes mois qui le suivent.