Je l’ai déjà dit et répété, je ne regarde que des films
français (ou à la rigueur italiens ou anglais) et à la condition expresse qu’il
s’agisse de comédies. Évidemment, ça réduit le choix, surtout qu’en dehors de quelques
films cultes, regarder sans cesse les mêmes cesse d’être amusant. Aussi
comprendrez vous ma joie lorsque j’aperçus en consultant le programme qui me
sert principalement à éviter d’allumer le poste, une comédie inconnue se voyant
attribuer trois étoiles (=Très bon) et diffusée par Arte, la chaîne où l’on
rit. Qualifiée de « comédie dramatique », nommée « Copacabana »,
cette œuvre de Marc Fitoussi fut tournée en 2010 et mettait en scène Madame
Isabelle Huppert.
Il faut croire qu’en l’an de grâce 2010, la belle Isabelle
avait des problèmes avec la toiture de sa maison de campagne car le chef-d’œuvre
annoncé s’avéra être un navet dégoulinant de « bons sentiments ».
Figurez-vous que Babou (c’est le surnom d’Isabelle) est
venue s’installer à Tourcoing (il n’y avait rien de libre à Roubaix) afin de se
rapprocher de sa fille en passe de se marier. Malheureusement, cette dernière ne
tient pas à ce que sa baba-cool de mère qui lui a offert une enfance ballottée
de pays exotique en contrée lointaine assiste à son union. Elle a même dit à sa
belle-famille qu’elle résidait au Brésil. Babou, chômeuse sans le sou, est vexée
d’inspirer la honte. Elle va réagir, car, comme toute marginale d’âge mûr, elle
déborde d’énergie et de talent. Après une tentative infructueuse (elle se
pointe à l’entretien très en retard et, devant l’incompréhension de sa potentielle
patronne, en vraie rebelle, casse tout en partant), grâce à un ami, elle
postule pour un emploi dans la vente d’appartements en multi-propriété à… …Ostende ! Bien entendu, elle l’obtient
(pour des boulots de merde pareils, les candidats se font rares). Étant
parvenue à emprunter la voiture d’une ex-copine qui a appris avec le temps à la
mépriser (on se demande pourquoi elle cède à sa requête), la voici partie pour
cet Eden nordique. Bien entendu, quand elle arrive sur son lieu de travail où
on doit la loger, personne ne l’attend (critique du mépris des employeurs pour
le petit personnel) et elle apprend qu’elle devra partager un appartement avec une
vieille aigrie pas sympathique du tout (qui selon toute logique devrait voter à
droite, voire même pire). Peu satisfaite par cette compagnie, Babou décide
daller se payer un restau (au cinéma, même dans la pire dèche, ça ne pose pas
problème alors que dans la vraie vie…). Excellente idée car un groupe de joyeux
et sympathiques Flamands (cheveux longs et coolement vêtus) l’invite à sa
table. Après ces agapes, elle rentre à son immeuble pour constater que sa clé n’ouvre
pas la porte (drame !). Elle retourne donc vers ses nouveaux amis et l’un
d’entre eux (un docker au cœur tendre nommé Bart), après une tentative
infructueuse d’ouverture (on lui a donné une mauvaise clé, preuve
supplémentaire du peu de cas qu’on fait des employés subalternes), lui propose
de l’accueillir chez lui et la saute* (Ostende : La station où l’on se
fait des amis et baise dès l’arrivée. Un tel slogan devrait booster le
tourisme). Le lendemain commence le boulot. La chef explique aux nouveaux
arrivés que leur rôle ne consistera pas à vendre mais à rabattre d’éventuels
acquéreurs vers les vendeurs en distribuant des dépliants aux passants. La
coloc de Babou n’est pas contente du tout (normal, elle est mauvaise de
nature). Nous retrouvons notre héroïne dehors, sous la pluie, en train d’essuyer
rebuffade sur rebuffade (drame). Mais le destin veille sur elle : une de
ses copines de la veille lui donne ce conseil dont l’intelligence continuera d’émerveiller
les esprits dans les siècles des siècles : plutôt que de perdre son temps
en ville, pourquoi n’irait-elle pas plutôt à l’arrivée des ferries à Zeebrugge ?
C’est là qu’arrivent les touristes ! Elle l’y emmène et là ça baigne dans
l’huile. Le lendemain, en réunion, la
chef annonce dix-sept retours pour Babou et rien pour les autres (qui
commencent à la haïr). Le soir, alors qu’elle est à son balcon, elle aperçoit
un couple de jeunes SDF munis du chien règlementaire. Elle descend et leur
offre les restes de son repas (Babou est généreuse !). Le gars se fait un
peu tirer l’oreille (normal, on a sa fierté) mais la fille est contente. Le lendemain, elle leur proposera de les
héberger dans un des nombreux logements vacants de son immeuble, à condition qu’ils
rangent tout avant de partir à huit heures. Et ils le font, car ce sont des
punks à chiens tout ce qu’il y a de correct et propres sur eux, pas du tout le
genre à dégueuler partout pendant que le chien dévore les coussins du sofa). Une des vendeuses s’étant malencontreusement
cassé la jambe, Babou se voit proposé de la remplacer. Sa montée fulgurante
dans la hiérarchie entraîne celle de la haine chez ses collègues. Elle invite sa
fille à venir la voir et, avec l’avance qu’elle a obtenu de sa chef, lui paye le meilleur restau de la ville (soit
il n'y a que des bouibouis à Ostende, soit l’avance était pharaonique). Hélas, elle a
également convié ses clodos de protégés. Sa gamine n’est pas contente du tout
et s’en va (préjugés sociaux quand vous nous tenez !). Les SDF la quittent
pour prendre le ferry d’Angleterre où ils vont se faire des couilles en or en
jouant du djembé comme tout le monde fait là-bas. Hélas ils se feront refouler à cause du chien qui n’a pas les
papiers nécessaires (métaphore de l'anti-immigationnisme britannique ?). Et c’est là que le parcours sans faute de Babou va tourner
au cauchemar : n’écoutant que son bon cœur, elle les introduit de nouveau
dans l’immeuble et, alors qu’après une soirée bien arrosée avec sa chef (elles
sont devenues copines comme cochon) les deux filles font du vélo rigolo sur le
front de mer, Lydie (c’est le prénom de sa chef) aperçoit de la lumière dans un
studio de leur immeuble. Babou (bonne fille mais quand même un peu con) lui
avoue y avoir recueilli des SDF. La perfide Lydie semble approuver sa démarche
car comment laisser des gens dans la rue quand tant de logements sont vides (hein, franchement, comment ?) ? Et le lendemain notre brave héroïne est
convoquée par le chef de la chef et est virée (les chefs sont aussi fourbes qu’impitoyables).
Avec son solde de tout compte, Babou se rend au casino et place tout sur le 4,
se ravise, met tout sur le 14 et, croyez-le ou pas, le 14 sort et lui rapporte
une fortune avec laquelle elle monte une troupe de danseurs brésiliens qui
viennent animer le mariage de sa fille (qu’elle a, à un autre moment,
rabibochée avec son futur gendre et qui maintenant l’accepte). Ils remontent
dans leur car et c’est fini. Ouf.
*Hélas ça ne durera pas : Bart est un sentimental alors
que Babou tient mieux sur le dos qu’une bique sur ses cornes. Lassé d’être traité
en objet sexuel, le docker la plaquera.