Deux personnages de notre modernité télévisuelle me laissent
particulièrement pantois : l’Approbateur
et le Ricaneur niais. J’ai récemment évoqué
mon quiproquo au sujet de l’homme de la rue. Ils en sont les nouveaux avatars.
Quel que soit le sujet qu’on soumet à son appréciation, l’Approbateur
trouve que c’est très bien. Le
gouvernement annonce-t-il qu’il compte bien piquer tous leurs sous à ceux qui
gagnent plus de 800 Euros par mois, il trouve l’initiative judicieuse. Lui
annonce-t-on qu’en mangeant plus de quatre kilos de rutabagas par jour on
divise par deux ses risques de souffrir de l’amollissement du genou, il se
montre intéressé et se déclare prêt à suivre
ce régime au plus vite. Lui demande-t-on son avis sur la prochaine interdiction d’interroger les
imbéciles sur des questions ineptes, il y adhère.
Ce personnage doit traverser l’existence sourire aux lèvres,
ravi de tout.
Le Ricaneur niais se caractérise par un penchant
irrésistible à ponctuer ses phrases d’un petit rire ridicule, vu que ce qu’il
dit n’a rien de particulièrement drôle. Prenons
un exemple : le reporter nous annonce qu’avec le temps chaud, les affaires
des marchands de glaces, aussi surprenant que ça paraisse, reprennent. Une affirmation si audacieuse se
doit d’être corroborée par des témoignages. C’est là qu’intervient le Ricaneur
niais. Interrogé sur ce curieux phénomène, il confirme: « Quand il fait
très chaud, c’est bien agréable de manger une glace, hi hi hi ! ».
Annonce-t-on que le beau temps pousse inexplicablement plus de gens à s’exhiber
en maillot sur la plage que la pluie ? Le Ricaneur niais confirme : « C’est
bien agréable, ce beau temps ! On en profite pour aller bronzer sur la
plage, hi hi hi ! » On voit à travers ces deux exemples que l’on peut
être à la fois Approbateur et Ricaneur. C’est possible mais pas nécessaire. D’accord ou pas d’accord, le
ricaneur ricane. Ainsi il peut se déclarer réticent au régime rutabaga : « Ah,
non, je n’aime pas le rutabaga, tant pis pour mes genoux, hi hi hi ! »
ou préférer aller à la plage quand il pleut : « Il y a quand même
moins de monde, hi hi hi ! »
Le Ricaneur trouve matière à hilarité en toute circonstance.
Ces deux personnages incontournables des journaux télévisés
tendent à laisser une image peu
reluisante de la population française comme des
journalistes, les questions ne présentant pas plus d’intérêt que les
réponses qu’on y apporte. Mais après
tout, la mode n’est-elle pas à la télé réalité ?