Il m’arrive régulièrement d’aller faire un tour chez un blogueur de gauche. Un blogueur d’élite, s’entend. Un qui est bien classé dans les classements. Il paraîtrait même qu’il serait le N° 1. Et ce n’est pas rien. L’homme est intelligent. Si, si ! Il lui arrive d’être extrêmement raisonnable. Je dois même dire que parfois j’apprécie ses analyses. Ayant horreur des villes grandes ou petites et plus encore de leurs banlieues, n’étant pas amateur de traînage dans les bistros et m’abstenant de bière quand je ne suis pas en Angleterre, je ne le fréquenterais pas assidument mais si d’aventure il se trouvait qu’il passe par chez moi, c’est avec plaisir que je l’inviterais à partager mon repas et quelques verres.
Seulement, il est arrivé à ce personnage quelque chose d’inquiétant : il s’est pris à vibrer pour Flamby ! Et ne voilà-t-il pas que non seulement il le soutient mais qu’il tombe en quasi-pâmoison devant la moindre déclaration de son idole. C’est bien simple, il reprend dans son blog les moindres propos et « arguments » du Batave comme si c’était révélation républicaine (dans d’autres cas, j’aurais dit divine, mais le lascar me semble peu croyant) !
Ça peut paraître incroyable, mais il semble penser vraiment que son champion va redresser la France, réduire la dette, soulager la misère. Pour lui, la gôche si merveilleusement incarnée, c’est la bonne gestion, l’équilibre des comptes, la « justice sociale », et bien évidemment la fraternité, l’égalité voire même la liberté !
Accordons-lui l’excuse de la jeunesse. Il devait être tout gamin lors du fiasco de la politique du premier mandat de Mitterrand et de ses trois dévaluations rapprochées. Tout ce dont il se souvient, de son âge d’homme, c’est du merveilleux bilan du recalé Jospin qui était parvenu, lors d’un boom économique, à ramener la France un peu moins dans le rouge tandis que le reste de l’Europe s’envolait. Si c’est pas de l’excellente gestion, ça, je vous demande ce qu’il vous faut !
Et puis il marche à un autre carburant : la haine de l’hôte actuel de l’Élysée. Rien de ce qu’a pu faire M. Sarkozy n’a grâce à ses yeux. Son bilan est bien simple : en cinq ans, il a ruiné la France ! Que l’’Espagne, La Grèce, L’Italie, l’Islande, l’Irlande, et d’autres pays soient bien plus mal lotis, il n’en a cure : tous nos malheurs viennent du « président des riches » de sa mauvaise gestion, de sa totale incompétence !
Tant d’ingénuité émeut.
Une autre chose amuse : après tout, il ne se « bat » comme il dit, que pour un second couteau, un remplaçant de la dernière heure. Le candidat « naturel » c’était DSK. Je suppose que, sans les regrettables peccadilles du Sofitel de New-York et du Carlton de Lille, en ce moment il guerroierait avec autant d’enthousiasme pour lui, tant il est essentiel d’être cocu et accessoire de savoir par qui on l’est.
Les militants ont quelque chose de pathétique. Ils projettent sur ceux qui ne sont que froid calcul et ne briguent que places, honneurs et avantages divers la vertu et la foi qui les animent. Il est vrai que sans cet aveuglement des simples le « débat politique » perdrait en intensité : c’est le badaud qui fait le bateleur !
N.B. : Il ne s’agit pas uniquement de la gôche. Tout militant aveugle, de quelque bord qu’il soit pratique psittacisme, admiration béate et adhésion sans réserve.