Leonard Cohen est mort. Dire que j'en
éprouve une douleur intense serait faux. Je ne suis pas doué pour
le deuil. Et puis quand vous avez 82 ans, que vous êtes très malade
et que, dans une lettre poignante, vous l'avez annoncée prochaine,
comment votre mort pourrait-elle surprendre ?
J'ai un temps été un fan, un
inconditionnel. J'écoutais ses disques en boucle, attendais le
nouveau avec impatience, apprenais ses chants par cœur. J'étais
jeune. Ça m'est passé. La jeunesse comme le goût de la mélancolie.
Que reste-t-il de nos vingt ans ? Pas grand chose ! Vu
qu'on n'est pas amnésique, on se souvient mais ces remembrances sont
des cadavres. Un peu comme à ces femmes qu'on croyait aimer à
jamais, le temps fait qu'on se demande ce qu'on pouvait bien trouver
à ses idoles de jeunesse. Brel m'emmerde, Barbara me laisse froid.
Seul surnage le bon Brassens dont ma perception s'est transformée
avec l'âge sans perdre en intensité.
La fascination qu'opéraient le
mélancolique Leonard, le tonitruant Jacques, l'étrange Monique
s'est muée en indifférence à mesure que s'éloignaient mon goût
de la délectation morose, de la véhémence et du mystère. Le vieil
homme d'aujourd'hui a du mal à se reconnaître dans le jeune qu'il
fut sans pourtant le renier. D'ailleurs, hormis les « very
best » d'Elton John et de Cat Stevens (et encore, tous les
trente-six du mois), il n'écoute plus de disques, il en entend à la
radio.
Leonard Cohen a physiquement disparu
longtemps après qu'il eut quitté mon univers affectif. Restent
présentes à ma mémoire certaines paroles de ses chansons. « I
have tried in my way to be free* », moi aussi. Et j'y suis plus
ou moins parvenu. Ce qui implique que se rompent des liens. Comme
ceux qui m'attachaient aux chanteurs de ma jeunesse. Ma mémoire est
peuplée de spectres. Un vrai cimetière. Ce n'est ni triste ni gai.
C'est comme ça.
So long Leonard !
* « J'ai tenté, à ma
manière, d'être libre »
so long:
RépondreSupprimerhttps://66.media.tumblr.com/fd112a3ed2fcb3b88fe22453d8829431/tumblr_oggi7mkXd41qearaqo1_540.jpg
Léonard Cohen et Joni Mitchell ( env. 1968 )
Il n'était pas très beau...
SupprimerPas beau ! C'est vrai que sur cette image il a un faux air de Dustin Hoffman et qu'il est (à mon goût) un peu petit, mais de là à dire qu'il n'est pas beau, je vous trouve bien injuste (ou bien jaloup).
SupprimerVoilà un Québécois qui n'a jamais fait partie de mon petit univers personnel. Cela dit, comme j'ai connu quelques filles qui ne juraient que par lui, il a bien fallu, certains soirs, que je fasse semblant de l'aimer…
RépondreSupprimer(Sinon, plutôt que « Ça m'est passé », il me semble que j'aurais écrit : « Ça m'a passé ».)
Je n'arrive pas à me décider pour l'auxiliaire. Pour le reste, je ne peux que louer votre esprit accommodant...
SupprimerJacques et Didier, vous me remettez en mémoire cette petite scène qui se passait dans un service de traumatologie à l'hôpital où un interne originaire de Saint-Etienne, planchait au cours de la visite du patron et de sa suite, l'observation d'une malade, disant : "Elle s'est tombée !" Le patron le reprenant : "Elle est tombée!" Et l'interne de rétorquer : "Peut-être, mais de toutes les façons elle s'est fait mal !"
SupprimerY'a pas de mal à faire du bien ou y'a pas de mal à se faire du bien ?
SupprimerEt autre question perfide y'a t'il des O(r)L stéphanois ?
J'attends le commentaire de Suzanne ...
RépondreSupprimerShe must be at her place near the river (et où on ne capte pas l'Internet).
SupprimerSerait-ce la même Suzanne qui t'emmène écouter les six reines du port d'Alexandrie et chantant encore la même mélodie ?...
SupprimerQuand on aime le bel canto, les voix ensoleillées, celles qui vous mettent la pêche, Leonard Cohen, c'était pas ça !
RépondreSupprimerPas vraiment, non.
SupprimerJ'aurais été incapable de citer une chanson de ce monsieur, je ne savais même pas qu'il était canadien.
RépondreSupprimerDonc , pas de pleurs pour ce chanteur.
Vous êtes trop jeune pour avoir connu sa grande époque...
SupprimerMerci pour le mot jeune, mais quand vous aurez la canne, je prendrais le parapluie.
SupprimerUn "vieil ami" architecte, ayant par ailleurs "transité" par la Sénégal, disait déjà à son propos en 1982/1983 à Douala:
RépondreSupprimerchacun de ses nouveaux disques est tellement mélancolique (ou lugubre ...), qu'au suivant on s'étonne qu'il soit encore vivant ...
Mon meilleur ami disait qu'avec chacun de ses disques on aurait dû fournir un révolver (pour en finir avec cette vie de merde).
SupprimerUne dose de curare eût créé moins de soucis de rangement aux disquaires ...
SupprimerJe ne sais plus qui l'appelait monsieur 1,5 volt
RépondreSupprimerEt pourtant ses disques se présentaient par piles lors de leurs sorties !...
RépondreSupprimer"L'hésitation, soit dit en passant, tient ici à la particularité du verbe passer qui, employé à la forme intransitive (c'est-à-dire sans complément d'objet), peut en principe se conjuguer avec avoir ou être selon que l'on insiste sur l'action ou sur le fait accompli : l'hiver a passé bien vite, l'hiver est maintenant passé. Force est toutefois de constater avec le Dictionnaire de l'Académie que « l'usage actuel tend à faire prévaloir l'auxiliaire être dans les deux cas » − avoir restant possible pour exprimer l'action, mais pouvant être senti comme vieilli −, alors que passer se construit toujours avec l'auxiliaire avoir quand il est suivi d'un complément d'objet direct. Comparez : il est passé par là (plus couramment que il a passé par là), l'envie lui est passée (ou lui a passé), un an est passé (ou a passé), mais nous avons passé de bonnes vacances, il a passé la rivière. Être s'impose encore quand le sens est « devenir » : Il est passé maître dans l'art de plaire".
RépondreSupprimerAutre Ex : « Les six rennes du porc d’Alexandrie » est un ouvrage qui a bercé ma genèse. Mais c’était avant. Mon âme était encore neuve et point encore souillée. Depuis, ça m’est/m’a passé ! A présent, je préfère -et de loin- voyager avec l’inimitable, que dis-je, le prodigieux Louis Ferdinand C. méprisé par tout le monde sauf par vous et moi, bien entendu, et pour lequel je ne résiste pas à vous livrer un passage que je trouve irrésistible : « Par exemple à présent c’est facile de nous raconter des choses à propos de Jésus Christ. Est-ce qu’il allait aux cabinets devant tout le monde Jésus Christ ? J’ai l’idée que ça n’aurait pas duré longtemps son truc s’il avait fait caca devant tout le monde ».
SupprimerVotre démonstration sur les auxiliaires est imparable mais il nous est permis de nous demander si le cher Louis Ferdinand n'était pas dans l'erreur ?
https://www.youtube.com/watch?v=pNFefkstbpU
"Le voyage au bout de la nuit" n'a pas la même signification pour les inuits et lapons que pour les pygmées et autres équatoriens ...
Supprimer... mais "Mort à crédit" si !
SupprimerHélas, il convient de se faire une raison, nos mémoires regorgent de spectres, vous le dites justement. Moi, Léonard je ne le connaissais même pas mais j'ai plein d'autres fantômes domestiques dans ma besace mémorielle, je crois que c'est le sort commun.
RépondreSupprimerAmitiés.
Cher Nouratin !
SupprimerPréfèreriez vous Courcouronnes (laquelle devrait logiquement abriter le siège du Conseil de l'Ordre des Dentistes) en Ile-de-France ou Mont-Laurier (où ne poussent point de mauvaises herbes) au Québec ?