Je l’avoue à ma courte honte, le traitement médiatique des
manifestations d’hier m’a fortement perturbé. D’ordinaire, je prends les choses
avec une certaine distance amusée mais là ça dépassait de loin ce que ma
résistance était capable d’encaisser. Peut-être plus que l’imbécilité de ces
gens brandissant leurs ineptes affichettes, ce sont les commentaires hyperboliques
des journaleux qui m’ont mis hors de moi. Il n’était question que d’unanimité,
de résistance, de Paris capitale du monde. On n’avait pas vu ça depuis la
Libération (comme si la France dans son ensemble avait été libérée le même jour !).
Pour couronner le tout, on nous dégottait des vieillards, des enfants de la
maternelle, des mères de famille, des
juifs, des Musulmans, des copocléphiles, des adorateurs du Saint Potimarron pour les convier à expliquer leurs
motivations à participer à un événement marquant le début d’une nouvelle ère. Tous
étaient partisans de la liberté d’expression comme des fous. Ils n’allaient
pas jusqu’à préciser ce qu’ils entendaient par là, ça allait de soi : la liberté d’expression c’était Charlie et
Charlie, c’était eux, c’était la France, c’était… c’était… bref, c’était un peu tout et de préférence n’importe
quoi.
Or comme le développe si bien M. Hseize (je suppose qu’il s’agit
là d’un pseudo) ici et là,
« [le] concept même de liberté
d’expression n’a pas été conçu pour protéger les gens qui pensent et
s’expriment comme tout le monde, qui évoquent la météo et le temps qui passe,
mais bien pour ceux qui disent des choses qui dérangent, qui choquent ou qui
remettent en cause l’ordre établi. ». Parmi les millions de promeneurs
d’hier combien réalisaient clairement les implications du « combat »
qu’ils étaient censés mener ?
Combien parmi eux vont dès aujourd’hui réclamer que se taisent les voix
qui les dérangent et qu’ils n’ont, même au plus fort de leur crise libertéd’expressionnophilique,
jamais cessé de rendre responsables des drames
récents ? N’eût-il pas mieux valu
qu’avant de défiler une définition de ce concept soit au moins esquissée ?
Bien que mon aversion pour la foule m’y rende totalement
hermétique, force m’est de constater qu’il existe chez une frange de mes
contemporains une forte tendance au grégarisme. Plus on est de fous, plus on rigole,
plus on est nombreux, plus on est fort,
etc. On attribue au nombre des vertus magiques. Comme si contrairement à ce qu’en
disait Brassens, le pluriel magnifiait l’homme. Comme si se grouper fortifiait une conviction. Comme si son ampleur garantissait
l’unanimité d’un rassemblement.
Il faut dire que les politiques de tout bord (rejoints
par nombre de leurs collègues étrangers) ont participé sans exception notable*à
la création d’un sentiment d’unanimité. C’est grand, c’est beau c’est
magnifique mais qu’en restera-t-il demain ? Est-on bien certain qu’ici ou là bien des voix
discordantes ne seraient venues gâcher la fête si un micro leur avait été tendu ?
Point de danger qu’on le fît ! L’heure était à l’émotion, aux bons
sentiments, à l’illusion réconfortante.
Bientôt, d’autres événements viendront estomper voir effacer
chez ses participants le souvenir de cet "inoubliable" journée… N’empêche, elle offrit
à qui n’a pas besoin de foule pour être ennemi de tout fanatisme et de tout
terrorisme un bien pitoyable spectacle…
*Le fait qu’elle soit allée faire sa Charlie ailleurs qu’à
Paris ne fait pas de Mme Le Pen une exception.
Je suis en plein accord avec votre premier paragraphe : j'ai noté à peu près la même chose dans mon journal ce matin. Quand la bêtise auto-satisfaite atteint de telles proportions, il devient difficile de rester de bonne humeur…
RépondreSupprimerJe ne m'étais pas senti si mal depuis bien longtemps et les dernières fois, ça n'avait rien à voir avec la politique.
SupprimerJe pense que vous ne prenez pas la mesure de ce qui s'est passé hier.
RépondreSupprimerVous raillez. Qu'en restera-t-il demain ? On verra bien, mais il n'y a pas eu rien hier.
Grégarisme, dites-vous ? C'est le grégarisme des grandes célébrations et des pèlerinages.
Je ne m'étonne pas de vous retrouver, vous, Didier et quelques autres, en contempteurs, mais je trouve cela dommage. Je pense que vous vous trompez.
Hélas, je prends la mesure de ce qui s'est passé hier : une pantalonnade d'une ampleur inédite ! Les Bisounours en fête dans Cordicopolis ! Ce n'est donc pas rien.
SupprimerLe grégarisme, quel que soit son motif, est un des aspects de l'humain qui me désole le plus.
Il se peut que je me trompe, pourtant, enfant, on ne m'a jamais fait croire au Père Noël : ça m'a évité des désillusions.
Je n'envie pas votre fraîcheur d'esprit et je dis tout cela en toute amitié.
« Agiter le peuple avant de s'en servir, sage maxime. »
SupprimerTalleyrand
André
Freud et Hitler dans deux genres différents avaient bien compris la force des grandes foules réconciliatrices ; et vous pendant ce temps là vous vous goinfrez de boeuf bourguignon, honte sur vous !
RépondreSupprimerPour Freud, je ne sais pas. Mais Hitler, Staline, Mao, Mussolini (et d'autres) ont su tirer le meilleur des foules imbéciles...
SupprimerBonjour maestro , heureusement qu'il existe des gens de votre trempe, des gens qui ne craignent pas de remettre les pendules à l'heure. Tout comme vous l'ampleur de ces manifestations m'a fortement perturbé car cet immense cortège grince de par toutes ses articulations. L'accent est porté sur la liberté et on interdit madame Lepen , on va intenter une poursuite contre l'humoriste Dieudonné ! etc etc .C 'est vraiment désarmant ... sommes nous si facilement manipulables ? Tout cela frise l'hypocrisie . J'aimerai que les choses correspondent à la perception de madame Suzanne mais j'en doute.
RépondreSupprimer.
Pierre alias pc2....
S'il existait vraiment un unanimisme national, on se demande contre qui ou quoi on pourrait bien lutter !
SupprimerIl y a une espèce de jouissance naïve, chez la plupart des êtres humains à participer aux processions.
RépondreSupprimerCela doit remonter à très loin dans la préhistoire, lorsqu'il fallait se déplacer en groupe dans les savanes
ou les steppes infestées d'autres animaux plus ou moins hostiles. L'apparition de bêtes féroces genre
Kouachi et Coulibaly, réveille sans doute ces vieux instincts enfouis au plus profond de notre cerveau
reptilien. Culbuto et ses sbires ont su en jouer et ils ont obtenu un franc succès, un modèle du genre
dans l'ordre panurgique.
Les lendemains seront probablement moins réconfortants pour eux...pour nous aussi, hélas.
Amitiés
C'est peut-être même dans les gènes, allez savoir...
Supprimerje ne sais pas pourquoi il m'est venu brutalement hier en voyant la foule, le souvenir du tableau que j'ai revu récemment sur la fête de la fédération en 1790 , certes, ils ne chantaient pas charlie t'iras pas au paradis, mais ah ça ira, ça ira....la même foule enthousiaste croyant aux jours meilleurs, ils ont eu la rapidement la guillotine et la terreur, nous aurons aussi la terreur et la kalach, c'est plus moderne et plus rapide mais le résultat sera le même
RépondreSupprimerVous êtes une pessimiste, Boutfil, c'est à dire un optimiste qui a de l'expérience.
SupprimerTout pareil, cher Jacques. J'ai cependant pu éviter le spectacle. Seul le Masque, enregistré le funeste mercredi (donc sans les interférences bien-pensantes) a apporté un peu de fraîcheur à ce triste dimanche.
RépondreSupprimerCette capacité de la foule à se regrouper sur elle-même comme un banc de sardines sur Thalassa me laisse cependant pantois.
Ma compagne étant amateur (e?) de télé, je n'ai pu y couper totalement et ça m'a mis en colère.
SupprimerCher Jacques !
RépondreSupprimerVous faites allusion à Georges Brassens, et troublante coïncidence reprenez un peu plus loin quasi in extenso un vers de son "Bulletin de santé" ...
"C'est beau, c'est généreux, c'est grand, c'est magnifique !"
Il ne s'agit pas d'une coïncidence. J'utilise souvent ces mots de Brassens, comme un clin d’œil à son talent, en tant qu'antiphrase pour qualifier certains ridicules
RépondreSupprimerEt pourquoi manque-t'il alors le "c'est généreux" ?
SupprimerDans un premier temps, j'avais lu : "Liberté d'expression, gargarisme et unanimisme", eh bien, ça marche aussi !
RépondreSupprimerEn effet, mais soignez votre dyslexie.
SupprimerJe crois qu'il fallait tout simplement ne pas allumer sa télé aujourd'hui! JE commence à ne plus en pouvoir moi non plus! Le pire ce sont les discours contradictoires du gouvernement: nous sommes en guerre dans une marche pour la paix, nous accusons dieudonné d'apologie de crime tout en prônant la liberté de parole... J'y comprend plus rien moi...
RépondreSupprimer"Aemi, remplis mon verre
SupprimerEncore un et je vas
Encore un et je vais
Non, je ne pleure pas
Je chante et je suis gai
Mais j´ai mal d´être moi
Aemi, remplis mon verre
Aemi, remplis mon verre
Buvons à ta santé
Toi qui sais si bien dire
Que tout peut s´arranger
Qu´elle va revenir
Tant pis si tu es menteur
Tavernier sans tendresse
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans tristesse
Buvons à la santé
Des amis et des rires
Que je vais retrouver
Qui vont me revenir
Tant pis si ces seigneurs
Me laissent à terre
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans colère
{au Refrain}
Buvons à ma santé
Que l´on boive avec moi
Que l´on vienne danser
Qu´on partage ma joie
Tant pis si les danseurs
Me laissent sous la lune
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans rancune
Buvons aux jeunes filles
Qu´il me reste à aimer
Buvons déjà aux filles
Que je vais faire pleurer
Et tant pis pour les fleurs
Qu´elles me refuseront
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans passion
{au Refrain}
Buvons à la putain
Qui m´a tordu le cœur
Buvons à plein chagrin
Buvons à pleines pleurs
Et tant pis pour les pleurs
Qui me pleuvent ce soir
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans mémoire
Buvons nuit après nuit
Puisque je serai trop laid
Pour la moindre Sylvie
Pour le moindre regret
Buvons puisqu´il est l´heure
Buvons rien que pour boire
Je serai bien dans une heure
Je serai sans espoir
{Refrain:}
Aemi, remplis mon verre
Encore un et je vas
Encore un et je vais
Non, je ne pleure pas
Je chante et je suis gai
Tout s´arrange déjà
Aemi, remplis mon verre
Aemi, remplis mon verre
Aemi, remplis mon verre
"Aemi, entends-tu le vol noir du corbeau sur nos plaines?
RépondreSupprimerAemi, entends-tu les cris sourds du pays qu'on Enchaîne?
Ohé! Partisans, ouvriers et paysans c'est l'alarme.
Ce soir, l'ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes.
Montez de la mine, descendez des collines camarades!
Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades.
Ohé! Les tueurs à la balle et au couteau tirez vite!
Ohé! Saboteur, attention à ton fardeau, dynamite!
C'est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frères!
La haine à nos trousses et la faim qui nous pousse la misère!
Il est des pays où les gens aux creux des lits font des rêves!
Ici, nous vois-tu, nous on marche, nous on tue nous on crève.
Ici chacun sait ce qu'il veut, ce qu'il fait quand il passe.
Aemi si tu tombes, un ami sort de l'ombre a ta place.
Demain du sang noir séchera au grand soleil sur les routes.
Chantez compagnons dans la nuit la liberté vous écoute.
Aemi, entends-tu ces cris sourds du pays qu'on enchaîne?
Aemi, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
Oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh...