Tu parles, Charles ! La mer j’en reviens. Elle n’est
pas si loin. Mais mes visites se font rares. Hier, je suis allé à la pêche avec
le beau-frère de ma compagne. C’est toute une expédition. Le littoral ouest du
Cotentin connaît peu de ports. Alors quand on a un bateau, on l’amène sur la
plage monté sur une remorque que traîne un tracteur. On le mouille puis remonte le tracteur au sec. Sur la plage, c’est
un musée du tracteur agricole à ciel ouvert. Car, si les engins ne sont pas de
première jeunesse, tout propriétaire de bateau possède le sien.
Notre partie de pêche ne fut ni honteuse ni glorieuse. D’abord
nous avons relevé les casiers. Les deux premiers ne contenaient qu’un bébé homard, quelques étrilles et
araignées et un tourteau minuscule. Les
enfants furent rejetés à une mer qu’ils n’auraient jamais dû quitter et
les araignées conservées pour servir d’appât pour les casiers à bulots que nous visitâmes
après avoir dûment regarni les premiers de maquereaux pourris afin qu’il
attirent crabes et autres homards. Du bulot, il y en avait ! Seulement,
ils n’étaient pas seuls. Des milliers de petits bigorneaux pointus que l’on
nomme « perceurs » leur
tenaient compagnie. On vida donc les deux casiers dans une vaste bassine et
après avoir garni les casiers de cadavres de crabes araignées, on les rejeta et
passa au tri. Pas question de garder des bulots trop petits ni de perceurs sans
intérêt.
Commença la pêche à la ligne. En dehors d’un rouget-grondin et
d’un bar trop petits, nous finîmes tout de même par arracher à la mer seize
maquereaux qui firent, grillés, notre repas du soir.
Ce fut une matinée agréable. Pourtant, je n’avais que moyennement
envie de me rendre à la mer. Nous y allons une fois par an. Dire que fut un
temps, je rêvais de bateau !
La mer fut dès mon enfance synonyme de vacances. Mon père
était né sur la côte du Trégor où il mourut d’ailleurs. D’abord chez les
grands-parents, puis en camping, puis, l’aisance venant, dans la petite
maison de bord de mer que mes parents
firent construire au début des années soixante, nos vacances étaient côtières. Nous allions à la pêche à pied et
bravions la froidure lors de nos deux bains quotidiens…
Adulte, je continuai de fréquenter le littoral. J’eus quelques
occasions de faire, avec des amis, des parties de pêche en mer. Posséder une
coque de noix sur laquelle aller pêcher devint pour moi un de ces rêves qu’on
caresse mollement, sans trop y croire. J’aurais alors eu le temps mais pas l’argent.
Ensuite j’eus l’argent mais pas le temps. Les vaches maigres revenues, je retrouvai
le temps. Maintenant que j’ai le temps et l’argent, j’en ai perdu l’envie.
Comme quoi, la vie, hein…
Marcher dans le sable, retourner les cailloux, me baigner ou
mettre ne serait-ce que les pieds dans l’eau
froide de la Manche, ne me dit plus rien. Partir à bord d’une coque de noix
tremper du fil pour ramener quelques poissons suppose tant de frais, de savoir-faire
et de connaissances du milieu que le jeu ne me paraît plus valoir la chandelle.
Je préfère traquer le haricot vert, la tomate, le petit
pois, la patate, le poivron, la courgette, le chou ou le poireau. Je pense
toujours être un homme libre mais maintenant je préfère la campagne. Et j’emmerde
Baudelaire !
Vous avez bien raison, la mer ça bouge tout le temps et les poissons aussi. Pas les légumes.
RépondreSupprimerCela dit, si vous arrivez à vous en passer, très bien, plus de soucis, pour vous. Personnellement je ne pourrais pas. Même sans m'acharner forcément à aller dessus, la mer il faut que je la voie et que je sente sa présence, sinon je ne suis pas dans mon assiette.
Du coup, Baudelaire, forcément, je ne l'emmerde pas.
Amitiés.
Libre à vous Nouratin,libre à vous. Que ce goût m'ait passé est une chose. Qu'il demeure en autrui en est une autre...
SupprimerFinalement à bien y réfléchir, pendant les vacances chacun traque ce qu'il peut.
RépondreSupprimerPour ma part, mercredi, au marché, j'ai traqué le saucisson.
Le marchand en avait une bonne vingtaine de sortes, et même du saucisson d'âne !
J'ai acheté un saucisson porc et cerf, porc et canard, poivre, poivre vert et aux cèpes.
Cinq saucissons délicieux pour la modeste somme de dix euros !
Alors moi non plus je ne regrette pas la mer, surtout celle glacée du Trégor où ma soeur cette année a eu trois heures de soleil en trois semaines de vacances !
Méfiez vous, Mildred ! Si j'en crois certains de mes commentateurs, vous seriez en train de constituer un stock d'armes de dissuasion massive !
SupprimerMoi aussi, je préfère cultiver le saucisson et pêcher la paupiette de veau.
RépondreSupprimerCe qui ne m'empêche pas d'emmerder Baudelaire autant qu'un autre.
Vous êtes un sage !
Supprimer"Et j’emmerde Baudelaire !"
RépondreSupprimerA double titre, puisqu'il disait "je hais les légumes sanctifiés !"
Je ne suis pas d'accord avec ça, mais j'aime Baudelaire quand même.
Qui aime bien (Baudelaire), emmerde bien (Baudelaire)...
SupprimerUn certain Beau de l'air, vous aurez libéré des piérides contre la promesse de vous exiler loin en mer et certain Beau Frère aurait abordez la flûte qui vous emmenait sur le lieu de votre disgrâce et pour quelques panier de crabes mal remplis, vous a promptement rétabli dans vos fonctions de pourfendeur de piérides.
RépondreSupprimerQuant à la mer c'est sale, les poissons défèquent dedans pourtant les 40éme rugissants et les 50 éme hurlants, j' y ferais bien un tour.
Dîtes moi les deux Beau sont ils des cousins?
A propos, le lieu de votre futur ex exil,était il l' île de Serk ?