Ce fut un beau mariage. Les youyous fusèrent. Les drapeaux
exotiques furent dument brandis et énergiquement agités. Les époux étaient
peut-être un peu mal assortis mais la diversité n’est-elle pas une valeur en
soi ?
Presque deux ans plus tard, il semblerait qu’il y ait comme
de l’eau dans le gaz. La carpe ne veut plus du clapier, le lapin renâcle devant
la mare.
M. Hollande est bel et bien dans le caca noir. Après une
défaite heureusement tempérée par le côté local de l’élection (on n’ose penser
à ce qu’elle eût été si les seules considérations nationales étaient entrées en
jeu), il se voit contraint à changer de gouvernement. Le problème est qu’il lui
faut satisfaire le bondissant lapin gauchiste et la placide carpe
sociale-démocrate. Et que c’est malheureusement impossible.
Il est amusant de constater que si les diverses composantes
de la majorité qui a amené M. Hollande au pouvoir, si elles reconnaissent
toutes une défaite, n’en tirent pas les mêmes leçons. Pour le FDG, les Verts et
les plus rabiques du PS, si ça n’a pas marché, c’est parce que le gouvernement
n’est pas assez à gauche (le fait que les électeurs ne se soient pas en masse
tournés vers eux, ne semblant pas les inquiéter). Ils veulent plus de la
relance (avec quel argent ?). Pour
les modérés, c’est que les gens n’ont pas saisi à quel point la politique menée
était bonne, même si ses magnifiques résultats tardaient à se concrétiser.
Alors on va remanier. Pour faire comme si on avait compris
ce qui se passait. Ayrault qui reste ? Valls qui arrive ? Qu’importe ?
Dans l’un comme l’autre cas, la politique ne changera pas. Le désamour
continuera donc entre la carpe et le lapin.
Car M. Hollande n’a pas le choix. La France est sous surveillance
rapprochée de la part de l’Europe. Le déficit s’est creusé. La dette explose. L’austérité
s’impose. Les tenants de la relance ne peuvent l’emporter.
Il semblerait que l’on aille vers un ministère Valls. A part
peut-être quelques points éphémères de remontée (ce qui reste à prouver, vu que
ce qu’il gagnerait à droite il risquerait fort de le perdre à gauche) et un peu
moins de bazar dans le gouvernement, qu’est-ce que ça changerait ? Le chômage continuera d’augmenter, les Français ne tarderont pas à le rejeter autant que son prédécesseur,
l’ex-ministre de l’intérieur verra ses projets pour 2017 carbonisés, la gauche
dure se radicalisera, M. Hollande poursuivra sa descente aux enfers…
Pouvait-il en aller autrement ? Quand on arrive de
justesse au pouvoir grâce à une hétérogène coalition de mécontentements et à
des promesses qu’on savait ne pas pouvoir tenir, quand on fait preuve d’incohérence
et d’indécision, comment ne pas échouer ?
Au-delà de la présence de M. Hollande à un poste pour lequel
il n’était pas apte, le problème de la France me paraît bien plus grave. Le
pays est extrêmement divisé et, en dehors du mécontentement, aucune ligne
claire ne s’y dessine. Même si la plupart des Français sont d’accord pour
admettre que nous fonçons dans le mur,
personne n’est prêt à payer le prix des nécessaires réformes.
Nous somme mal partis.
PS : Un divorce entre la carpe et le lapin serait cependant hautement improbable : il faut penser à la gamelle. Une rupture franche amenant à une dissolution équivaudrait pour beaucoup à se retrouver au chômedu...
PS : Un divorce entre la carpe et le lapin serait cependant hautement improbable : il faut penser à la gamelle. Une rupture franche amenant à une dissolution équivaudrait pour beaucoup à se retrouver au chômedu...