Il y a une chose qui, si j'étais du genre à me laisser chiffonner, me chiffonnerait dans la pub pour les Restos du cœur qui passe à la télévision en ce moment.
On y voit des gens faire la queue. Toto attend le Père Noël, Titine attend la retraite, Rigobert attend le Messie, Léonie attend la fin de la grève à la SNCF, puis vient une kyrielle d'autres qui attendent également. Et qu'attend la kyrielle ? Elle s'écarte, apparaît le mâle visage de Michel Colucci, accessoirement comique et fondateur des Restos du cœur. La kyrielle attend vos dons afin de pouvoir continuer à fréquenter lesdits restos.
Et alors ? Ben, alors, il y a quelque chose qui cloche dans la liste des prénoms : mis à part celui d'une femme, aucun n'est DIVERS ! Ceux qui attendent votre générosité sont des Albert, des Ginette, des Robert. Pas de Mamadou, point de Fatoumata, Mouloud est aux abonnés absent quant à Cherifa, elle doit être au Fouquet's.
C'est un peu curieux, non ? Moi qui croyais innocemment que les multiples discriminations dont souffrent nos amis divers avaient pour conséquence de les plonger dans la misère. On s'attendrait donc à ce que parmi ceux qui attendent les subsides des généreux donateurs ils se trouvent en nombre. Eh bien non : ils sont bien blancs, ceux qui espèrent.
La diversité serait-elle trop digne pour accepter la charité ? Les Restos la discrimineraient-ils ? Ou bien, du fait que les donateurs (toujours généreux) sont dans leur immense majorité des Français de souche et qu'il est nécessaire qu'ils puissent s'identifier un minimum aux bénéficiaires de leurs largesses, l'escamoterait-on ?
Je crois, comme je l'évoquais dans un précédent billet que c'est du côté de la troisième hypothèse que nicherait la vérité. Ce doit être un crève-cœur , pour des âmes généreuses, de devoir se soumettre aux impératifs du marketing, surtout quand il vous pousse dans un sens opposé à vos inclinations.
Mais ce qui importe c'est que les disparus des files d'attente publicitaires réapparaissent miraculeusement et en nombre lors des distributions, non ?