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vendredi 19 octobre 2018

Quel con ce Baudelaire !

Tel est le statut que j'écrivis sur Facebook avant hier. On ne peut pas dire qu'il ait rencontré un grand succès. L'idée m'en était venue alors que je débarrassais les murs de ce qui sera mon bureau de leur vieux papier, activité on ne peut plus propices aux méditations profondes. Il est vrai qu'à bien des yeux, il pouvait paraître pour le moins énigmatique voire sacrilège.Comment peut-on oser accoler ce terme outrancier au nom d'un de nos plus grands poètes ? Je vais vous dire pourquoi.

En fait, ce qui provoque chez moi cette réaction défavorable, c'est son fameux Albatros que je connais encore par cœur, l'ayant spontanément appris durant ma période « poète maudit ».

«Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher
. » 

Cette métaphore m'agace en ce qu'elle fait de l'esprit auto-proclamé supérieur de son auteur un être inapte à la vie ordinaire. A mon sens, ce devrait être tout le contraire. Comme dit le proverbe « Qui peut le plus peut le moins ». Il est sûr que posséder des ailes de géant peut constituer un handicap pour la marche mais n'oublions pas qu'il ne s'agit là que d'une métaphore : ayant vu plusieurs photographies de M. Baudelaire je peux vous affirmer avec une tranquille assurance qu'il n'était pourvu d'aucune aile.

Le poète se veut inadapté par son côté supérieur. En cela, il me rappelle un instituteur fou rencontré à Rufisque (Sénégal) alors que j'étais conseiller pédagogique pour une méthode de français. Ce brave garçon conduisait ses leçons de manière pour le moins étrange et peu conforme à la méthode. A la fin de notre visite, nous tentâmes, avec mon collègue, de lui signaler avec le tact que semblait requérir son état certains errements de sa manière d'enseigner. Sa réponse fut sans appel : « Dieu ne m'a pas créé pour remplir les fonctions pitoyables d'un instituteur. Dieu a de plus grands projets pour moi. » Que répondre à cela ?

A sa manière, et peut-être sans le savoir, cet enseignant était un albatros et partant l'émule du malheureux Charles. J'avoue, adolescent, avoir été tenté de partager cette illusion qu'à l'origine de mes déboires ou frustrations se trouvait un trop vaste talent. Ça m'est vite passé. J'ai croisé au cours de ma vie bien des personnages se jugeant supérieurs à leur médiocre situation sans que personne n'ait songé à réparer cette erreur de casting. Ce doit être difficile à vivre mais, à mes yeux, ça relève d'une erreur d'appréciation de ses mérites et d'un orgueil mal placé.

Plus que les jérémiades stériles d'un Baudelaire ou d'un Richepin, je fais mienne la conclusion que donne à La mort du loup Alfred de Vigny :

" Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler.
"

Mais ça ne m'empêche pas de bavarder aimablement comme je le fais ici.

21 commentaires:

  1. on ne peux bavarder après une telle démonstration qui, si elle s'appuie sur des poètes a un côté "mathématique" qui ne peut être discuté (en tous cas, c'est mon avis)

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  2. On pourra vous répondre que la différence entre Baudelaire et votre instituteur, c'est que le premier a écrit Les Fleurs du mal et le second, non. On pourrait aussi vous objecter que toute l'existence de Baudelaire a prouvé qu'il était effectivement inapte à ce qu'on appelle la "vie en société".

    Et puis, quoi : il y a eut des tas de fous qui se prenaient pour Napoléon ; mais, dans le lot, il y en eut un qui était vraiment Napoléon.

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    1. Si tout le monde se mettait à écrire "Les Fleurs du mal", on ne saurait plus où donner de l'admiration.

      Que la vie de Baudelaire ait été une longue suite de diverses déconvenues est certain. Seulement attribuer ses échecs à un trop grand génie me paraît stupide. Ce pauvre homme était doué pour vivre et écrire le malheur, c'est tout. Ce qui ne retire rien à son talent même si j'ai de plus en plus de mal à l'apprécier.

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  3. Vous en êtes la preuve la plus probante. Sterne vive de l'esprit, étoile confirmée de la clé serre-tube. Après le sort fait ici à "Mort à Crédit" on s'approche du clap final.

    Dans les plis sinueux des vieilles capitales,
    Où tout, même l’horreur, tourne aux enchantements,
    Je guette, obéissant à mes humeurs fatales
    Des êtres singuliers, décrépits et charmants.

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    1. "Sterne vive de l'esprit, étoile confirmée de la clé serre-tube." Oui, je suis cela (et bien d'autres choses) mais ce qui fait ma grande fierté c'est d'être suivi par le troll le plus talentueux de la blogosphère et de sa banlieue.

      Le passage des "Petites vieilles" que vous citez montre, si nécessaire, que ce bon Charles était d'un naturel enjoué et bénéficiait de nombreux loisirs.

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  4. Vous tombez mal avec moi, Oncle Jacques : le Baudelaire œuvres complètes de Bouquins est toujours sur ma table de salon.
    Didier vous a fort bien répondu. Et moi j'ouvre mon livre au hasard pour vous :

    "... Un homme de génie, misanthrope, et voulant se venger de l'injustice de son siècle, jette au feu toutes ses œuvres encore manuscrites. Et comme on lui reprochait cet effroyable holocauste fait à la haine…, il répondit : "Qu'importe ? Ce qui était important, c'est que ces choses fussent créées, donc elle sont." Il prêtait à toute chose créée un caractère indestructible..."
    Paradis artificiels - Un mangeur d'opium - VIII Visions d'Oxford - Le palimpseste


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    1. Voyez vous, chère Mildred, j'ai, au temps de ma lointaine jeunesse été enthousiasmé par ce brave Charles mais, avec le temps, mon goût du malheur s'est érodé et je ne supporte plus que le guilleret, le futile, l'amusant.

      "Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
      Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
      Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
      Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

      Quand la terre est changée en un cachot humide,
      Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
      S'en va battant les murs de son aile timide
      Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

      Quand la pluie étalant ses immenses traînées
      D'une vaste prison imite les barreaux"

      je prends mon parapluie pour aller faire les courses...

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  5. Eh bien, moi, c'est Verlaine que je vais citer, pour la peine ! (Sans la ponctuation, que je ne sais où mettre ; et ayant la flemme de chercher…) Voici :

    Fuis du plus loin la pointe assassine
    L'esprit cruel et le rire impur
    Qui font pleurer les yeux de l'azur
    Et tout cet ail de basse cuisine.

    Et toc !

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    1. Sacré Paul ! Encore un qui a tout réussi ! Ce qui ne l'a pas empêché d'écrire de bien jolies choses. N'empêche que je lui préfère Rimbaud. Pas le poème, mais l'homme, l'aventurier à la poursuite d'une réussite financière qu'il n'atteindra jamais vraiment.

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  6. "N'en serait-il pas plutôt empêché par ses pattes de nain ?" (Maurras)

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  7. Leçon d'humilité.

    Les Anglo-saxons ont une devise qui peut résumer la conclusion d'Alfred de Vigny: "Never complain,never explain".

    C'est notre époque de déballage intime qui le veut aussi: tous ces génies incompris qui veulent faire partager aux téléspectateurs ou aux internautes,sur les plateaux de talk show et les réseaux sociaux,les souffrances d'un misérable petit moi,sans aucun intérêt.

    Vendémiaire.

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    1. Excellente devise qu'on a souvent du mal à appliquer.

      Il n'arrive probablement jamais aux incompris d'envisager que souvent ils ne sont que trop bien compris.

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  8. Réponses
    1. Si votre remarque m'est adressée, je vous en remercie bien qu'incertain de la mériter.

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  9. J'espère pour lui que Dieu lui a permis de réaliser quelque chose de grandiose !

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  10. Quel con ce Jacques Etienne !
    Il n'a rien compris à mon poème !

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    1. Heureux d'apprendre votre résurrection. Un peu triste que vous soyez resté aussi con.

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  11. Merde
    En haut la tête, en bas les pieds.
    Mais au milan du singulier
    Quel obscur prodige on promène
    Emballé doux dans l'abdomen?
    Sa merde, hélas, léger fardeau
    Toujours porté incognito
    On l'emmène aux fêtes, aux travaux
    Du premier lait jusqu'au tombeau.
    On veille et on dort avec elle.
    A notre corps elle est fidèle
    Et reste enlacée dans nos flancs
    Au-delà du fatal instant
    Quand tous et tout nous abandonne

    Robert Vigneau

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  12. Après 5 ans de relation avec mon petit ami, il a soudainement changé et a cessé de me contacter régulièrement. Il proposait des excuses pour ne pas me voir tout le temps. Il a cessé de répondre à mes appels et à mes sms et il a cessé de me voir régulièrement. J'ai ensuite commencé à le rencontrer avec différentes amies de filles, mais à chaque fois, il disait qu'il m'aimait et qu'il avait besoin de temps pour réfléchir à notre relation. Mais après que j’ai contacté (padmanlovespell@yahoo.com), Dr.Padman du temple des sorts jeté un sortilège d’amour et après un jour, mon petit ami a commencé à me contacter régulièrement et nous avons emménagé ensemble au bout de quelques mois et il était plus ouvert à moi. qu’avant et il a commencé à passer plus de temps avec moi que ses amis. Nous nous sommes finalement mariés et nous sommes maintenant mariés avec bonheur depuis 2 ans avec un fils. Depuis que le Dr. Padman de padmanlovespell@yahoo.com m'a aidé, mon partenaire est très stable, fidèle et plus proche de moi qu'auparavant

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