Je dois le reconnaître, je suis atteint d’américanophobie. Entendons-nous
bien, ce ne sont pas tous les habitants du continent américain (nord et sud)
qui provoquent en moi cette crainte excessive, maladive et irraisonnée. D’ailleurs
ne s’agirait-il pas davantage d’une répulsion que d’une peur ? Non, ma
phobie ne concerne que les Étasuniens. L’Amérique latine ou le Canada ne
provoquent en moi aucun rejet spécial. Entendre parler un Québécois, lire les
romans de Garcia Marquez de Vargas Llosa ne provoque chez moi aucune éruption
cutanée. J’y prends même un certain plaisir.
Dans un sens, j’ai de la chance : à la différence de
bien d’autres, cette aversion est socialement acceptable et même largement
partagée au sein des milieux gauchistes les plus vigilants. En l’avouant, je risque
de froisser quelques lecteurs dont je connais les tristes penchants mais mes
chances de me retrouver au banc d’infamie sont faibles voire inexistantes. Pouvoir se
vautrer impunément dans un quelconque rejet est une joie rare par les temps qui
se traînent.
En quoi consiste au juste mon américanophobie ? Le plus
visible de ses symptômes est mon refus de regarder tout film ou série provenant
des USA. Ce qui ne va pas sans inconvénients car nos petits écrans en sont
littéralement envahis. Du coup, je me vois réduit à ne voir que des longs métrages
français, anglais ou italiens que j’ai souvent déjà regardés à maintes
reprises. De plus, en admettant que j’en ai le désir et l’occasion, il me
serait difficile de suivre une conversation concernant les stars
hollywoodiennes actuelles dont je suis incapable de rapprocher les noms,
parfois entendus ou lus de ci-de là, du moindre visage. Je fais de temps en
temps des tentatives de vaincre ma répulsion première mais ça ne fait que la
confirmer : soit je n’y comprends rien (Matrix) soit je trouve qu’il s’agit là des productions d’un grand
malade (Tarantino).
Pour la littérature, c’est pareil. Contrairement à la nôtre
(si tant est que nous en ayons une aujourd’hui) qui sentirait le renfermé et
souffrirait de nombrilisme, elle est censée être parcourue par le vent des
plaines soufflant sur de grands espaces. A mon dam tout à fait mesuré, je la
trouve ennuyeuse. J’ai pourtant beaucoup aimé les deux romans de Steve Tesich (Price et Karoo) mais ça ne compte pas, vu qu’arrivé aux USA de sa Serbie
natale à 15 ans, cet auteur me semble plus Européen qu’autre chose.
Ce qui m’agace le plus dans le message subliminal que
transmettent les « œuvres » Étasuniennes,
c’est son côté niaisement optimiste et lourdement moralisateur quand elles ne font
pas dans la provocation gratuite. Parce qu’à mes yeux les USA tendent à
exporter les ferments de la désintégration de nos sociétés européennes :
multiculturalisme, communautarisme, junk food, repentance, angélisme,
sensiblerie, matérialisme exacerbé, consumérisme débridé, etc.
On me taxera d’antiaméricanisme primaire, on me donnera
mille exemples des merveilles que ce pays a développées, on pointera les
contradictions qu’il y a à fréquenter certain réseau social à commercer grâce à
certains sites, à passer tant de temps sur le Net, invention américaine, etc.
Rien n’y fera. C’est une influence culturelle largement nocive que je refuse.
Avec mauvaise foi (peut-être) mais vigueur.
Moi qui me délecte de séries américaines (surtout celles d'HBO), de films américains (un peu anciens...), des romans de Tom Wolfe etc. etc. que ne pourrais-je répondre, mais ne le ferai pas (c'est l'heure de la sieste).
RépondreSupprimerJe n'aurai que deux mots : bonne sieste !
SupprimerPS. ...le dernier film américain que j'ai vu est Atlas shrugged, part III (d'aprés Ayn Rand), admirable dénonciation du socialisme et du collectivisme..., et à la gloire de l'effort individuel...
RépondreSupprimerJe ne suis même pas certain de partager leur forme de libéralisme. Mais je dois admettre ma mauvaise foi : quand on a une tête de turc ou un bouc émissaire, on se doit de lui trouver tous les défauts et aucun mérite. C'est parfois difficile mais on y parvient.
SupprimerJe ne chercherai pas à vous convaincre, pourrant certaones oeuvres littéraires ou cinématographiques ne versent pas la mièvrerie la plus degoulinante. Pour Tarentino et Matrix, je partage votre avis.
RépondreSupprimerJe n'aime pas la façon dont ils ne sont pas mièvres !
SupprimerTiens, nouvelle formule! Il faut doublonner ses commentaires.
RépondreSupprimerjard
Tiens, nouvelle formule! Il faut faire deux commentaires à la suite.
RépondreSupprimerjard
C'est une spécialité de Grandpas. Je supprime consciencieusement le deuxième. Il y a eu une période d'accalmie mais depuis quelque temps ça a repris.
SupprimerComment "refuser de regarder tout film ou série provenant des USA", rejeter en bloc la littérature américaine, (tiens, rien sur la musique ?) et en même temps dénoncer un prétendu message subliminal que par définition, vous ne pouvez pas capter ?
RépondreSupprimerPar ailleurs, éprouver "un certain plaisir à entendre parler un Québécois" montre une résistance à la torture tout à fait remarquable.
Il se trouve qu'un temps je les regardais et que ça m'a dégoûté. Pour la musique, je n'en écoute pratiquement jamais.
SupprimerMa résistance à la torture est phénoménale : j'ai été marié (2 fois).
Bien qu'heureusement mariée (une seule fois), j'ai éclaté de rire à votre dernière phrase. Pour revenir au sujet, dans un billet précédent, n'admîtes-vous point apprécier Erskine Cadwell ?
SupprimerBen oui, j'ai consacré mon mémoire de maîtrise d'anglais à Tobacco road et God's little acre. J'ai également lu avec plaisir Faulkner, Dos Passos, Steinbeck, Mc Coy et d'autres. Mais ces gens-là appartiennent à une Amérique qui a largement disparu...
SupprimerOscar Wilde :
RépondreSupprimer- « Il faut bien dire que les Américains ont le culte des héros, et qu’ils les choisissent toujours parmi les classes criminelles »
- « Les États-Unis d’Amérique forment un pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence, sans jamais avoir connu la civilisation. »
Vive Oscar ! Dire qu'ils ont donné son prénom à la statuette qui vient récompenser leurs images qui bougent !
SupprimerJ'ai essayé à deux reprises d'attirer votre attention sur deux-trois bricoles que vous nommez: le cinéma américain, pour vous dire qu'il y a un monde culturel sorti d'Hollywood; un peu comme il y aurait des français, sorti de Paris, ou des anglais sorti de Londres...
RépondreSupprimerLa dernière fois, c'était sous votre billet du 25 janvier dernier (je m'étais même cassé le cul à vous faire des liens renvoyant vers des bandes d'annonce...). Disons que le dernier paragraphe du billet de ce jour vient de me convaincre de lâcher l'affaire.
Vous jetez bien vite l'éponge !
SupprimerQue voulez vous, contre une phobie on ne peut rien, nul ne saurait donc vous en blâmer.
RépondreSupprimerJe reconnais d'ailleurs bien volontiers que leur façon pernicieuse de nous imposer leurs
mœurs et leur philosophie lourdasse se révèle parfois bien pesante, sans parler de leur
patois infâme autant qu'incompréhensible qui oblige les distributeurs d’œuvres plus ou
moins cinématographiques à des doublages hasardeux voire atroces.
Cela dit, que voulez vous, l'honnêteté oblige à leur reconnaître pas mal de qualités que,
bien entendu, la phobie parvient aisément à dissimuler.
Amitiés.
Pas mal de qualités, je veux bien mais j'ai du mal à les percevoir.
SupprimerJe suis très mal placée pour commenter parce que je suis encore sous le charme de Benjamin Button dont je viens de revoir l'étrange histoire il y a quelques jours.
RépondreSupprimerConnais pas.
SupprimerQuoiiiiiii??? Pas le moindre petit "grand" western, pas de "Rio Bravo", ni de "Chevauchée fantastique"?
RépondreSupprimerPas le plus petit Hemingway? Exit "Le Vieil homme et la mer", au feu "l'adieu aux armes"? Edgar Poe, Faulkner, Steinbeck, à la poubelle???
Et la musique, hein la musique, Jacques Etienne? Armstrong, Ella Fitzerald, Gershwin, Bernstein...aux oubliettes???
Et les chanteurs: Sinatra, Springsteen, Ray Charles....voués au silence???
Snif, la vie est trop injuste!.....
Vous parlez de films et d'auteurs anciens que j'ai pu apprécier. Je parlais de ceux d'aujourd'hui.
SupprimerLa musique et moi, ça fait deux. Quand au jazz : hermétique je suis.
Séchez vos yeux ! Vous rencontrerez d'autres épreuves encore plus rudes !
Je suis un antiaméricain primaire, sauf pour la littérature et l'art en général. Il faut bien avoir quelques contradictions.
RépondreSupprimerJ'ajoute qu'on ne fait pas plus antiaméricain que les Américains eux-mêmes. Je pense à Ezra Pound, qui détestait son pays, lequel le lui a bien rendu.
La plupart des Américains sont fiers de l'être, cependant.
SupprimerDes exceptions, chacun en trouvera, et de merveilleuses parfois, mais anciennes pour la plupart, datées, tel livre, tel film...ce qui demeure - et en quoi le constat est juste - c'est le contraste entre l'immense puissance et la très inégale qualité. Si l'on compare les moyens en œuvre et l'"œuvre" par ces moyens obtenue, je ne peux que souscrire au bilan final: "Much ado about nothing".
RépondreSupprimerNous sommes bien d'accord !
SupprimerJe partage d'autant plus votre phobie étatsunienne qu'elle fut, pour ma part, le fruit d'une lente évolution. Les plus vigilants, mais aussi les plus paranos, peuvent remonter à la 1ere guerre du Golfe. J'aimerais qu'on me donne les bonnes raisons pour lesquelles Bush senior, après une victoire sans appel, renonça à forcer Sadam Hussein au départ.
RépondreSupprimerSi Clinton fit illusion en son temps, on découvre aujourd'hui toute la toxicité de son action, notamment en initiant la crise des subprimes à travers les crédits illimités accordés à Fannie mae et Fredy Mac.
Bush junior franchit une étape décisive dans la confiscation du pouvoir de l'Empire au profit de l'enrichissement de l'élite mondialisée. Quant à Barrack Ussein, inutile d'épiloguer...
Les poisons les plus toxiques pour notre civilisation, ceux qui la condamnent au déclin et à l'effacement, viennent tous d'outre atlantique : politiquement correct, féminisme outrancier et suicidaire, néo-conservatisme conçu et propagé par d'anciens trotskistes US, multiculturalisme décérébré...
L'Empire est menacé d'effondrement et veut bien sûr nous entraîner dans sa chute, alors, il est nécessaire de couper les ponts au plus vite. C'est pourquoi je trouve passionnant ce qui se noue en Grèce en ce moment : rien n'est joué mais une porte vers la sortie de l'Empire vient de s'entrouvrir.
Je n'ai pas d'avis sur la question, car j'ai la conviction bien arrêté que l'Amérique n'existe pas : c'est un hoax, un canular. A l'ouest de notre continent, il n'y a que l'île d'Avalon où la fée Morgane soigne le roi Arthur. Au delà, on atteint le bord du monde et on tombe. Tout le monde sait cela.
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