A la demande générale de trois commentateurs, je vais évoquer
de nouveau Jock, ce chien de choc que nous rencontrâmes alors qu’il donnait
libre cours à son côté joueur avec les poules
du regrettable Père Milien.
S’il fallait définir en quelques qualificatifs cette
calamité faite chien, les plus appropriés seraient goinfre, farceur, affectueux
et épris de liberté.
La goinfrerie de
Jock était sans bornes. Alors qu’il n’était encore qu’un chiot, nous allâmes
dans la Vienne tuer le cochon. Peu
méfiants, nous fîmes l’erreur au retour de ne pas l’attacher hors de portée des
sacs contenant la viande et la charcuterie tirées du suidé. Le malheureux,
probablement tenaillé par la faim, vu qu’il ne venait de dévorer qu’une seule
énorme gamelle de pâtée parvint, avec discrétion à extraire du boudin d’un sac
et à en engloutir un morceau de presque un mètre. Nous en fûmes plus sidérés
que chagrins.
Un jour que notre voisin attendait sa famille pour le déjeuner,
il mit son rosbif à refroidir sur le rebord de sa fenêtre. Mal lui en prit car
Jock avisant la pièce de viande décida d’ajouter ce supplément carné à son
régime et nul n’en trouva trace.
Il arriva qu’ayant trouvé
une odeur bizarre à un canard ayant trop longtemps séjourné dans le
congélateur, je décidai d’en faire cadeau au chien après l’avoir fait bouillir dans
une marmite à l’extérieur afin d’éviter
que ses arômes n’empuantissent la maison. C’est alors que j’assistai à une
scène étonnante : Jock, impatient,
les larmes aux yeux, entamait son repas
en arrachant des lambeaux de chair au canard toujours plongé dans l’eau
bouillant à gros bouillons.
Lors d’une fugue (car il fuguait, le bougre mais nous y
reviendrons) ceux qui le recueillirent nous racontèrent qu’une
fois dominée la crainte que leur inspira la présence du molosse mollement
allongé sur le pas de leur porte, le voyant affectueux et inoffensif, ils lui
proposèrent une bonne gamelle. Il l’engloutit avec un appétit qui rendait
difficile d’imaginer qu’il venait d’en dévorer une avant de s’enfuir de chez
nous. Craignant que la pauvre bête abandonnée ne souffre de famine après une
longue errance, ils lui en offrirent une autre, plus grande qu’il s’empressa de
faire disparaître avec la même célérité, ce qui les confirma dans l’idée que
Jock avait dû connaître une longue période de privations.
Facétieux en diable, il l’était, ainsi lors d’une de ses
nombreuses escapades, s’empara-t-il du bâton dont s’aidait pour marcher une
pauvre vieille, laissant celle-ci, incapable de se déplacer, au milieu d’un
chemin peu fréquenté jusqu’à ce qu’un passant vint à son aide…
Bien que nous le sortions afin qu’il fit ses besoins, M.
Jock, à notre insu, avait trouvé un autre moyen de se soulager. De la terrasse
de l’appartement que nous occupions alors à Amboise, il sautait prestement sur
le toit du voisin, et y déposait ses énormes étrons qui de là roulaient dans la gouttière et
finirent par la boucher. Nous apprîmes ce manège lorsque nous vîmes un homme
outré sonner à notre porte, un seau à la main.
Il nous expliqua, le visage empourpré de rage, qu’inquiet de voir des
infiltrations de liquide brun souiller la blancheur immaculée du plafond de son
couloir, il était allé inspecter ses gouttière et qu’horreur il en avait
extrait DEUX PLEINS GRANDS SEAUX de merde de chien. Il avait tenu à nous en
apporter un comme preuve de la véracité de ses dires. Je dois avouer que j’eus
bien du mal à dominer le fou-rire que me provoqua la scène. J’y parvins
cependant et lui proposai de l’indemniser,
de clore d’un haut grillage l’accès à son toit. Sa rage tomba ainsi et
il repartit avec son seau sans pour autant m'en restituer le contenu …
Notre voisin dont les talents de rôtisseur furent évoqués
plus haut, aimait beaucoup Jock, il lui apprenait des tours et avait une relative
autorité sur lui. Certains soirs, ce célibataire arrivait, bouteilles sous les
bras, pour nous offrir l’apéro. Nous le gardions à dîner et lorsqu’il y avait
des frites au menu, il s’amusait à s’en mettre une dans la bouche et invitait
le chien à venir s’en emparer. Tout se passait très bien à la plus grande
satisfaction de Jock et du voisin jusqu’au jour où, emporté par l’enthousiasme,
le chien mordit non seulement la frite mais le nez de notre bon voisin qui se
mit à saigner abondamment….
On n'a pas le temps de s'ennuyer avec un chien comme celui-là.
RépondreSupprimerOn peut voir sa photo?
Pas de temps morts, en effet ! Je n'ai pas de photos de lui, mais je vais tâcher d'en trouver une ressemblante...
SupprimerIl y avait les aventures de Huckleberry Finn , nous aurons la joie de lire celles de Jock the dog par oncle Jack.
RépondreSupprimerSi ça peut divertir...
SupprimerPrenez un koala. Ca ne bouffe pas le nez quand on l'embrasse, ça mange uniquement de l'eucalyptus et ça ne boit qu'en cas de grande sécheresse.
RépondreSupprimerOu alors, un loir. C'est discret, un loir. Ca ne vous fâchera pas avec vos voisins et ça laissera le boudin tranquille. D'ailleurs, ça roupille la plus grande partie de l'année.
Vous savez, j'ai déjà des lombrics...
SupprimerComme quoi il faut se méfier de tout le monde, même des clébards les plus sympas.
RépondreSupprimerAmitiés.
En effet !
SupprimerLa suite, la suite !
RépondreSupprimerElle arrive !
SupprimerLire ou relire "Mon chien stupide" de John Fante: on est dans la même veine, bravo!
RépondreSupprimerMerci du conseil !
SupprimerJ'avais un chien qui, après avoir dûment mangé chez nous, allait farfouiller dans la poubelle des voisins, lesquels, ignorant les us et coutumes des chiens, étaient persuadés que nous ne le nourrissions pas assez et nous regardaient d'un sale oeil.
RépondreSupprimerLe voisin est l'ennemi de l'homme !
SupprimerIl est vrai qu'après un épisode pareil, on ne se sent pas du tout embarrassé et que votre réputation s'améliore...
RépondreSupprimerSuper la vidéo. Je n'imaginais pas le koala si dynamique !
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