Les escargots peuvent voler… Supposez qu’on vous dise cela. Que faites-vous ?
Si vous êtes une personne normalement sensée vous passez votre chemin en
haussant les épaules. Si vous êtes capable de pitié, vous plaignez le pauvre
fou qui vous tient d’aussi insensés propos.
Maintenant, imaginons que vous soyez un intellectuel
moderne, bien calibré, ouvert au
dialogue, prêt à tout envisager. Que faites-vous ? Vous commencez par
exprimer vos doutes : un escargot n’a pas d’ailes, comment se mouvrait-il
dans les airs lui qui ne se traîne sur son pied gluant que par temps
pluvieux ? Eh bien, justement, vous rétorquera le fou, si l’escargot ne
vole pas, c’est que l’air est insuffisamment humide ! Il faut donc l’humidifier,
c’est une urgence, une priorité !
En personne « intelligente », vous ne pouvez que l’approuver.
Si vous n’y aviez pas pensé, c’est que des préoccupations futiles vous avaient
distrait.
Ému par la détresse de l’escargot privé de vol, vous vous
mettrez à militer en faveur d’une humidification radicale et généralisée de l’air. D’ailleurs vos élus, encore plus intelligents
que vous, ce qui n’est pas peu dire, vous montrent la voie en proposant un
texte de loi offrant à l’escargot le droit au vol. Vous ne pouvez que les
applaudir et leur offrir votre militant soutien.
Ainsi va la folie moderne : rien n’est suffisamment
absurde pour être rejeté. Tout le monde
a droit à tout. Refuser l’absurdité est rétrograde, fasciste et pour tout dire
hitlérien (en pire). Le brave bobo,
riche de son irréflexion pseudo cultivée applaudit des deux mains, en
regrettant de n’en pas avoir quatre, à toutes les plus absurdes inepties. Il
aurait même tendance à en concevoir d’autres plus osées tant est grande sa peur
d’avoir une rame de retard dans le grand RER de la folie ambiante.
Dans cette situation, argumenter pour défendre des évidences
est un piège dans lequel il ne faut pas tomber. D’habiles dialecticiens tenteront de vous noyer dans les flots agités
de leurs absurdes divagations. Refusez le débat. Opposez-lui le rire : c’est
tout ce qu’il mérite. L’évidence est l’évidence, en discuter est un manque de fermeté
et d’entrée une perte de terrain.
Toute ressemblance avec des débats actuels, futurs ou passés
serait purement fortuite.