La quasi-victoire du Front National dans le Doubs provoque l’inquiétude
du monde politico-médiatique et cela parce qu’il révèle un fait de nature à
glacer le sang de tout démocrate sincère : les ruraux votent mal. Très mal
même. S’il n’y avait qu’eux où en serait-on ?
Ce constat est bel et bon mais comment s’explique-t-il ?
Certains esprits profonds se demandent au nom de quoi des gens à la fois épargnés par
l’immigration et la violence peuvent voter pour un parti anti-immigration et sécuritaire.
Ce sont probablement les mêmes qui attendent qu’il y ait le feu dans leur
maison pour envisager qu’on puisse, même à tort, ne point apprécier l’incendie. En tant que
néo-rural (enfin, pas si néo que ça, vu qu’il y a des lustres que je me suis
installé quand faire se pouvait dans des villages perdus), j’y vois plusieurs
explications.
A la campagne on a une impression de sécurité comme en ville
on éprouve un sentiment d’insécurité. Cette illusion fait qu’on peut s’éloigner
de chez soi sans fermer sa porte à clé ou que si par malheur il vous arrive de
perdre votre portefeuille on le ramène à votre banque (ça m’est arrivé). On y
vit paisiblement à la française (et ici, souvent, à l’anglaise) sans trop
souffrir du manque d’enrichissement culturel que cela implique. Le chômage y
est rare (seuls restent ceux qui y trouvent un emploi), si le revenu est
souvent médiocre, on se débrouille, on bricole, on est généralement propriétaire. Du coup, l’assisté
n’y court pas les chemins. Le manque d’équipements, la pauvreté de l’offre
culturelle en éloigne le Bobo. Avec pour conséquence que la coalition assistés-bobos
qui, s’ajoutant à ses électeurs traditionnels (fonctionnaires, envieux de tout
poil), assure la victoire de la gauche dans les centres urbains ne peut s’y
former.
Le plouc regarde la télé. Et qu’y voit-il ? Des
horreurs ! Des foules bigarrées, des zones de non-droit, de la violence
gratuite ou payante, du vandalisme, etc. Et son cerveau fruste en conclut qu’importer
de telles réalités chez lui ne serait pas souhaitable. Les plus exaltés
finissent même par penser que ce n’est souhaitable pour personne, même pas pour
les citadins. Faut-il qu’il soit sot, le bougre !
Et s’il n’était que sot ! Mais il est couard, en plus !
Le genre de personne à préférer la santé à la maladie, la paix à la guerre, l’abondance
à la disette, peut-être même la vie à la mort ! Face à ce qu’il faut bien
nommer une peur irrationnelle, que peut-on faire ?
Pourquoi n epas envisager de créer une télé spéciale pour lui,
où la vie en ville serait parée de tous les charmes, d’où toute incivilité
(meurtres divers, actes terroristes, trafics de drogue, etc.) serait bannie ?
De lui interdire l’accès aux cités afin
qu’il ne découvre pas la supercherie ? De prohiber tout contact entre lui
et les urbains ? Ça ressemblerait un tout petit peu à de l’apartheid mais
si le salut de la république était à ce prix…
A moins qu’on ne lui retire tout simplement le droit de vote ?