Je relis plus que je ne découvre. Ces
derniers temps, suite à une grande méforme et afin de meubler le
temps, j'ai relu Cakes and ale (curieusement paru en français
sous le titre La Ronde de l'amour) de ce bon vieux William.
Satisfait de cette lecture, j'attaquai le premier de quatre tomes
réunissant l'ensemble de ses nouvelles dont j'avais fait l'emplette
à Londres il y a quarante cinq ans. Le temps passe mais la qualité
reste ! Les quatre cent et quelques pages du volume furent vite
savourées et, mon appétit se maintenant, je viens d'entamer la
lecture du second volume.
Alain Souchon parlait des « nouvelles
pour dames de Somerset Maugham ». Personnellement, réserver
ces écrits à un public féminin ne me semble pas justifié par
autre chose que la rime. Si Souchon et Voulzy avaient choisi la
prononciation anglaise de son nom, seraient-elles devenues des
« nouvelles pour mômes » ?
L'univers de Somerset Maugham est daté.
Il décrit une société disparue. Et cela d'un point de vue de
classe : celui d'un gentleman appartenant à la bonne société,
membre de clubs huppés. Grand voyageur, il situe ses histoires dans
des lieux souvent exotiques comme la Malaisie, la Polynésie mais
aussi sur la Riviera française, à Paris ou en Espagne. Les
nouvelles consacrées à des administrateurs coloniaux décrivent
avec une franchise qu'on ne saurait avoir aujourd'hui que dans des
plaidoyers anti-coloniaux le racisme sur lequel reposait l'Empire
Britannique, et cela sans complaisance ni révolte. Avec le même
détachement que sont exposés les travers des classes supérieures.
En dehors de la description d'un monde
disparu, ce qui fait à mon sens l'intérêt de ces écrits c'est
l’ambiguïté du narrateur (qui souvent ressemble comme un frère à
l'auteur) et la cinglante ironie de certains portraits qu'il brosse.
Le narrateur est certes un gentleman censé partager les valeurs de
sa classe mais on sent que derrière ce masque de respectabilité,
l'écrivain laisse poindre un sourire teinté d'ironie et de
scepticisme vis-à-vis des conventions qu'il est censé défendre.
Médecin de formation, c'est au scalpel qu'il dissèque l'âme
humaine afin d'en explorer les recoins secrets.
Mais à quoi bon accumuler de piètres
phrases sur de si fines œuvres ? Allez les voir de ma part, si
le cœur vous en dit...