Hier soir, j’ai regardé La
Vérité de M. Clouzot. Film magistral. Mise en scène impeccable, rythme
parfait, distribution époustouflante. Le duel opposant Paul Meurisse, mélangeant
fausse innocence et cynisme vrai, à
Charles Vanel en vieux matois feignant bonhommie et humanité, est une pure
merveille qui au passage dénonce tout le côté théâtral de la justice. Les deux dernières répliques échangées entre Vanel et
son assistante, alors que suite aux attaques de l’avocat de la partie civile l’accusée s’est
suicidée, jette un éclairage impitoyable
sur la comédie judiciaire : la jeune femme, émue par la fin tragique de
leur cliente et la responsabilité qui en revient à la partie adverse murmure à
son patron : « Je n’aimerais pas être à sa place » à quoi le
vieux ténor du barreau répond : « Nous y serons la semaine
prochaine : l’affaire Moreau… » Montrant que les rôles sont
interchangeables que le « gentil »
de la pièce peut en devenir le « méchant », comme au théâtre…
A côté de la vérité que Clouzot nous révèle il nous montre que peuvent se créer, dans l’esprit des juges et des jurés comme du
public, des vérités diverses nées du talent de l’accusation ou des parties
civiles… La mort de la victime nous prive de savoir laquelle l’aurait emporté.
Suprême habileté.
Le milieu « bohème » dans lequel évolue l’accusée,
fustigé comme dissolu par l’accusation, paraît, selon nos critères actuels,
voire ceux qui eurent cours une grosse décennie plus tard, bien innocent, dégage
un parfum suranné comme les divers milieux qu’on nous y montre mais chaque
acteur, jusqu’au plus petit rôle, y
tient sa place avec talent. Une mention spéciale à Mme Sardou, parfaite en
concierge avec ses intonations de poissonnière repentie…
Il y a bien sûr, le jeune Sami Frey, en amoureux transi,
possessif, jaloux, musicien ambitieux hésitant entre la passion avec Brigitte
et la raison avec sa sœur incarnée par la charmante mais bien pâle Marie-José
Nat.
Et puis… Et puis… Et
puis… (envoyez la musique de Ces gens –là de Brel !) Y’a Brigitte
qu’est belle comme un soleil, à damner un saint, à sanctifier un démon, belle comme
ça devrait être interdit ou au moins limité… J’avais jusqu’ici pensé qu’elle
jouait comme un pied. Et puis là, non… Divine la Brigitte ! Quand elles s’agite
nue sous un drap au rythme d’une musique Sud-Américaine, c’est au-delà des mots…
On comprend que le Sami ne s’en remette pas. On se demande comment il fait pour
rester assis, à prétendre lire…
Parce que Brigitte, c’est une femme comme on n’ose en rêver.
Une nana qui s’offrirait à vous comme ça, comme l’échange de votre 2 CV pourrie
contre une Jaguar E flambant neuve, si ça vous laisse froid, c’est que vous
êtes mûr pour le « mariage pour tous » !
Le monde serait-il mal fait ? Je ne l’ai jamais
rencontrée. Et puis il y a la différence d’âge. Seize ans jour pour jour. On
aurait pu fêter nos anniversaires ensemble (économie !). Mais bon, vu que
je préférais les jeunes… Surtout que
rien ne garantit que je lui aurais plu… La vie a de ces mystères… Sans compter que son
amour des bêtes aurait peut-être à la longue fini par m’agacer… Une star, c’est
fait pour créer le rêve des foules, pas pour vivre avec.
Pour La Vérité,
pour l’ensemble de son œuvre, pour avoir su quitter la scène encore à son
zénith, qu’elle reçoive ici l’expression de mon admiration sincère.