Hier j'ai passé 8 h sur la route
reliant le Limousin à la Normandie. On en voit des choses sur plus
de 500 km : des « barrages », des radars et un
chevreuil. Des « barrages », j'en ai passé quatre. Mes
guillemets s'expliquent par le fait que sur les quatre seul un
barrait quelque chose. Les trois autres consistaient en un campement
tenu principalement par de dangereux retraités assoiffés de sang
qui se contentaient d'adresser des signes amicaux à ceux qui comme
moi klaxonnaient en signe de soutien. Ce fut le cas à deux ronds
points à la sortie de Limoges et à celui de Bellac.
Le quatrième, un peu avant Loudun
était d'une autre nature. Quelques kilomètres en amont un panneau
de signalisation routière indiquait que la route était interdite
aux poids lourds. A un carrefour, un homme d'un certain âge portant
gilet orange faisait des signes du bras. Il semblait conseiller aux
véhicules de se déporter vers la gauche. La voiture qui me
précédait s'engagea sur la petite route à gauche. Pensant que ça
devait être un gars du coin qui rentrait chez lui et que l'homme au
gilet orange était là pour mettre en garde contre l'approche de
travaux routiers justifiant la déviation des poids lourds , je me
déportai sur la gauche et continuai tout droit, un peu étonné de
ne pas voir le moindre engin des travaux publics. Je compris tout
quand j'aperçus au loin une très longue file de camions à l'arrêt.
Je fis donc demi tour afin de ne pas me trouver bloqué et ensuite
empruntai la voie qu'indiquait le vieil homme. Celle-ci était dans
un état lamentable : couverte de boue avec des accotements
bien creux et fangeux à souhait qui rendaient le croisement avec les
véhicules venant dans l'autre sens un peu inquiétants. Ce voyage me
permit de voir l'ampleur de la file de camions qui dans les deux sens
étaient bloqués.
A quelque chose malheur est bon :
ça me permit de traverser Loudun, petite ville de la Vienne. et de
bénéficier de son système de signalisation approximatif et de
constater que, comme bien d'autres de sa catégorie, cette bourgade
avait connu de meilleurs jours. Connaissant les villes et villages
avoisinants qui seuls étaient indiqués, je parvins finalement à
retrouver la route d'Angers. Passé Loudun, pas plus de Gilets Jaunes
que de beurre au tribunal. A croire qu'à Laval, à Mayenne ou à
Domfront l'espèce est inconnue.
Ce qui m'a le plus frappé c'est que
sur des centaines de kilomètre plus un seul radar ne faisait son
office. Certains avaient visiblement été incendiés, d'autres
peints et beaucoup occultés que ce soit avec du scotch et du
plastique ou par un gilet jaune. Ce qui ne changeait rien au
comportement des conducteurs qui ralentissaient à leur approche
juste au cas où par hasard ils auraient été laissés en état de
marche. Ce qui m'étonna c'est que visiblement personne ne semblait
se soucier de remettre en services ceux qui auraient pu l'être...
Venons-en au plus agaçant des
« événements » de ce parcours « héroïque ».
Presque parvenu chez moi, j'aperçus au bord gauche de la route la
forme d'un animal de belle taille qui aurait pu être un gros chien
ou un chevreuil. Approchant, je vis qu'il s'agissait d'un jeune de la
deuxième catégorie. Comme le veut la tradition, cette bête idiote
courut se mettre au milieu de la toute. Je parvins cependant à
l'éviter en freinant comme un malade, car même petits ces sales
bêtes sont susceptibles de causer bien des dommages à une voiture.
Je serais assez d'avis qu'on les déportât tous à Paris, ville où
on doit les aimer et où des loups (qu'on y aime également et qu'on
devrait y importer) se chargeraient d'en limiter la prolifération.
Voilà. Au contraire de ce que
prévoyaient certains amis sur Facebook, ce voyage ne m'a pas pris
cinq jours. Tout au plus ai-je, pour traverser en partie un pays « à
feu et à sang », perdu un quart d'heure...