Il a un charisme d’huître trop longtemps exposée au soleil,
un esprit conciliant, et une incapacité remarquable à trancher. C’est ce qui a
fait son succès. D’abord au sein de son parti. En tant que plus petit commun
dénominateur, il a pu rassembler les différentes tendances qui composent ce
parti extrêmement hétérogène. Entre un Valls trop à droite, une Ségolène trop
marquée par l’échec, un Montebourg trop à gauche et pas sec derrière les
oreilles, une Martine Aubry pas trop… mais pas assez… , un Baylet trop
extérieur il avait toutes ses chances, lui qui était si peu marqué. Il vira en
tête au premier tour et devança largement la juste-un-brin-moins-consensuelle
Martine au second.
Restait à convaincre les autres composantes de la gauche.
Pas trop problématique quand on est collectiviste avec les communistes, casqué sur un scooter, vert
avec les écolos, soûl avec les Polonais, radical avec les mous du genou,
coquin avec les starlettes, et
généralement habile manœuvrier. Il fut d’autant plus facile de l’emporter
que cinq ans de harcèlement médiatique avaient provoqué dans une grande partie
de l’opinion un anti-sarkozysme rabique.
Il fut donc élu.
Lui président, on allait voir ce que l’on allait voir :
croissance, baisse du chômage, pureté de l’air, justice indépendante,
république irréprochable, peuple réconcilié, mariage pour tous, logements en
pagaille, etc. Et ce qu’on ne voyait pas en vitrine, on était certain de le
trouver à l’intérieur. Y’avait qu’à demander.
Seulement, de croissance il n’y eut point. Le chômage
augmenta. Les microparticules se montrèrent rétives à disparaître. La justice
fut confiée à Mme Taubira (no comment). La république resta ce qu’elle était.
Les divisions du peuple s’exacerbèrent.
Le mariage ne fut pas du goût de tous. La construction de logements baissa…
Bref, que des bides en vitrine, alors
inutile d’en demander davantage.
Dire qu’un autre eût résolu en deux coups les gros tous les
problèmes du pays serait le fait d’un rêveur.
Seulement il aurait pu éviter certaines âneries monumentales propres à
entamer la confiance ou à booster le chômage : taxe à 75%, augmentation du
taux de TVA sur les rénovations, loi Duflot, projet de réforme de la justice
Taubira, mariage pour tous, etc. C’est d’autant plus regrettable qu’on a
critiqué la détérioration de l’économie et le clivage de l’opinion sous son
prédécesseur.
Et puis, d’abord et
surtout, ce qui a nui au président est ce qui l’a amené au succès :
son goût du louvoiement, son manque de netteté et d’esprit de décision, le fait qu’il soit plus homme de compromis
que chef, ont fini par donner l’impression qu’il n’y avait pas de pilote dans
l’avion, sensation d’autant plus gênante qu’on traverse d’importantes
turbulences. D’autant plus que ceux qu’il était parvenu à fédérer artificiellement
se sont, que ce soit par inexpérience ou par incompatibilité, mis à partir dans
tous les sens, ajoutant couacs aux couacs sans que le supposé responsable ne
siffle la fin de la récré.
Du coup, notre sauveteur fait naufrage. Sa gauche le trouve trop à droite, la droite
le vomit et se radicalise. Que lui reste-t-il ? Changer de
gouvernement ? A quoi bon ? Autant nommer un nouveau second sur le
Titanic après avoir touché l’iceberg…
Il me fait penser à
un conducteur maladroit qui se serait fourvoyé au fond d’une impasse étroite
qui lui interdit toute manœuvre et dont la voiture n’a pas de marche arrière.
Je n’aimerais pas être à sa place.
Et surtout je plains mon pays d’avoir placé l’homme qu’il ne
fallait pas au poste où il n’avait que faire…