On entend souvent que ceux qui, au
cours des manifestations de Gilets Jaunes se livrent à des exactions
diverses ne sont pas des Gilets Jaunes ou, dans le meilleur
des cas, ne représentent qu'une infime minorité. Moi je ne demande
qu'à croire tout ce qu'on dit, c'est dans ma nature, je n'y peux
rien. Seulement, tout le monde ne bénéficie pas de mon heureux
caractère Certains profitent du triste constat d'actes plus ou moins
blâmables pour stigmatiser l'ensemble du mouvement. Il serait bon
que ça cesse. En effet, au train ou vont les choses, les Gilets
Jaunes sont là pour durer : vu qu'ils déclarent vouloir
continuer jusqu'à la satisfaction de l'ensemble de leurs
revendications et que nombre de celles-ci sont irréalisables, on
risque de n'en jamais voir la fin.
Il est de ce fait indispensable pour
que les choses soient claires que l'appartenance au mouvement soit
mieux définie. En effet, jusqu'ici, il suffit de passer un gilet de
haute visibilité comme il est obligatoire d'en détenir, depuis le
13 février 2008, un dans son véhicule, pour devenir Gilet Jaune.
C'est insuffisant. Car dans ce cas, il me suffirait de revêtir un
tutu pour qu'on me prît pour un petit rat de l'Opéra, un uniforme
de général pour qu'on me confiât le commandement d'une division,
d'une blouse blanche pour qu'on me consulte, ou de coiffer une tiare
pour qu'on m'appelât Sa Sainteté. L'appartenance à toute
institution, et les GJ sont en passe d'en devenir une, se doit
d'être soumise à certains critères (passage d'un examen ou d'un
concours). De même, dans toute structure digne de ce nom existe une
hiérarchie.
Il est donc urgent que soit organisées
des épreuves permettant de valider l'appartenance de chaque
impétrant au mouvement. Je proposerais qu'une d'entre elles soit un
examen de Bonne Enfance. Chacun sait que l'ambiance des défilés de
GJ est unanimement qualifiée, du moins au départ, de « bon
enfant ». Il s'agit donc là d'un point essentiel. Une autre
pourrait être de faire lire au candidat des fiches de paye. Si, dès
que le montant net du salaire indiqué dépasse, disons, trois fois
le SMIC, il se met à pousser des cris de vertueuse indignation,il
pourrait passer au second niveau de l'épreuve : la photo de
Macron. Si celle-ci provoque sur son visage l'apparition d'une
expression de fort dégoût ce serait un plus, surtout s'il s'écrie
« Macron démission ». A l'oral, il devrait exprimer au
moins trois revendications. Tout cela, bien entendu, de manière bon
enfant. Lui serait alors délivrée une carte de Gilet Jaune lui
permettant, après avoir été dûment contrôlé par les forces de
l'ordre, de défiler où bon lui semblerait entre 10 h et 15h chaque
samedi et un dimanche par mois.
Mais quid de ceux qui, bien que très
désireux de rejoindre le mouvement, auraient manqué de Bonne
Enfance, se seraient, lors de l'épreuve visuelle mis à proférer
des grossièretés inqualifiables tandis que la haine faisait naître
aux commissures de leurs lèvres des flots d'écume, qui auraient
revendiqué la mise à feu et à sang des centre-ville et le pillage
de leurs magasins ou par exemple qu'on pendit le président avec les
tripes du dernier parlementaire ? Tout ne serait pas perdu pour
eux : après examen de leur dossier par une commission ad hoc
ils pourraient se voir délivrer une carte de GJEM (Gilet Jaune
Extrêmement Minoritaire) qui ne leur permettrait, après contrôle,
de ne défiler que passé 15 h en compagnie des casseurs.
Grâce à mon système, le travail de
la police serait grandement simplifié. Bonhomme jusqu'à 15 h, elle
pourrait se montrer répressive ensuite sans que quiconque ne vienne
la critiquer.
Quand à ceux chargés de représenter
le mouvement auprès des autorités, leur nomination se ferait au vu
des résultats du test de Bonne Enfance et d'un test supplémentaire
chargé d'examiner leur degré de Bonhomie. Toute remise en question
de leur représentativité vaudrait aux GJ de se voir attribuer une
carte de GJEM.
Simple, non ? Reste à savoir si
je serai entendu.