Grand bruit dans Landerneau !
L'ex-ministre Ferry , Luc, pas Jules (que l'on n'entend plus guère
ces derniers temps), fait une déclaration fracassante dont je vous
donne le verbatim : « Quand on voit des types qui tabassent
à coups de pied un malheureux policier par terre, qu’ils se
servent de leurs armes une bonne fois ! Ça suffit, ces espèces de
nervis, ces espèces de salopards d’extrême droite et extrême
gauche ou des quartiers qui viennent taper des policiers. […] On a
la quatrième armée du monde, elle est capable de mettre fin à ces
saloperies » Aussitôt tout ce que Paris et ses annexes compte
de belles âmes s'émeut, s'indigne, pousse les hauts-cris ..
Pris de folie, l'ex-ministre, le
philosophe à la belle crinière, appelle à tirer dans la foule !
Dans quel monde vivons-nous, M'dame Michu ! La violence de ce
monde ne connaît donc plus de limites ? Si les racailles ne
peuvent plus tabasser pacifiquement un représentant de l'ordre à
terre et sans défense sans déclencher une répression sanglante, où
va-t-on ?
Que M. Ferry ait tort ou raison n'est
pas mon problème. Toutefois cette « affaire » me fait me
poser des questions : A quoi servent au juste les forces de
l'ordre ? Pourquoi sont-elles armées ? Les récréations
n'ont-elles pas de fin ?
A la première question, la réponse
paraît simple : maintenir l'ordre. Malheureusement, certains ne
l'entendent pas de cette oreille. Pour eux, les services de police ne
sont là que pour provoquer les braves gens et les amener à se mal
conduire quand leur seul désir est d'instaurer le bordel.
La question des armes est délicate. On
arrivera facilement à accepter qu'un flic sans flingue (j'allitère!)
est comme une belle à qui il manque un œil (femme que certains
continueront de préférer à une moche qui en aurait trois).
Seulement, c'est au niveau de l'utilisation de ces armes que l'on
commence à s'interroger : si un policier en fait usage contre
une racaille de banlieue dans des circonstances même extrêmes, les
cités s'enflamment. C'est donc à éviter. Si, comme le préconise
M. Ferry, on s'en servait pour éviter le massacre d'un policier, ce
serait folie. On en vient à se demander dans quels cas cette
utilisation serait acceptable. On pourrait même s'interroger sur la
nécessité de fournir des armes à des personnes ne devant en aucun
cas s'en servir. Après tout, même avec un œil en moins la belle
reste belle... Ne serait-il pas préférable de les équiper de
flutiaux ou de crécelles selon que l'on souhaite effrayer ou charmer
les foules en délire ou les
délinquants-que-c'est-pas-de-leur-faute ?
Quoi qu'il en soit et quelque
distrayants que puissent se montrer les mouvements insurrectionnels
il faut bien qu'ils connaissent une fin. Celle-ci peut venir de la
satisfaction de celles de ses revendications qui ne sont pas
totalement irréalistes, de la lassitude ou de l'emploi de la force
brutale. Ceux qui disent que cette dernière ne mène qu'au chaos ont
la mémoire hémiplégique ou ignorent l'histoire, ancienne ou plus
récente. J'en donnerai quelques exemple. Crassus et Pompée ne se
montrèrent pas tendres avec les révoltés de Spartacus : 16
000 exécutions et 6 000 crucifixions (le long de la voie Appia)
mirent fin aux troubles. En 1800, le comte de Frotté, chef d'une
chouannerie normande déjà bien affaiblie, se rendit, muni d'un sauf
conduit à Alençon pour y négocier avec un général fidèle de
Bonaparte. On l'y arrêta et le fusilla. Ainsi prirent fin des années
de rébellion des chouans. En 1871, M. Thiers ne fit pas preuve d'une
grande bonhomie lorsqu'il réprima la Commune de Paris mais ce
faisant il parvint à restaurer l'ordre. Plus près de nous, en 1989,
sur la place Tian'anmen
de jeunes idéalistes apprirent à respecter le pouvoir et depuis,
mis à part au Xinjiang,
on n'entend guère
parler de troubles en Chine. Tout ça pour dire que lorsque l'on
réprime, ça peut marcher à condition de ne pas le faire avec le
dos de la cuiller.
Mais
nous vivons en France, pays des droits de l'homme, au XXIe siècle ou
le simple bon sens paraît scandaleux et où l'on crie d'autant plus
vite au totalitarisme qu'on peut le faire en toute impunité prouvant
par là même que l'autoritarisme et le régime policier n'y sont que des
phantasmes.