Nous devons à M. Renaud Camus le
concept de Matière Humaine Indifférenciée. La MHI est le produit
de la mondialisation qui crée des humains hors-sol,aisément
interchangeables, et fait des hommes une matière première comme
une autre.
Comme bien des réacs, sans aller
jusqu'à en pleurer, je regrette l'émergence de ces êtres sans
racines, sans identité, de ces soi-disant « citoyens du
monde » dont Mme Theresa May a si justement déclaré qu'en
croyant en être un on était en fait « citoyen de nulle
part ». Encore, si ceux qui acceptent de se considérer
comme de la MHI s'en tenaient à leur conviction, ce serait
tolérable. Seulement ces malades se voudraient contagieux et via les
media et les politiques qui sont des leurs, ils s'attaquent en
permanence à ceux qui continuent de revendiquer des traces
d'identité culturelle nationale. Enfin, ceux de leurs (non)
concitoyens qui le font, car bizarrement, les allogènes bénéficient
d'un droit inaliénable à la conservation de leur identité sur
notre sol. Sous les coups de boutoir conjugués des « progressistes »
adeptes de la MHI et des allogènes revendiquant haut et fort le
maintien de leur identité, il est à craindre que notre civilisation
ne s'écroule.
Reste à savoir en quoi peut bien
consister ladite identité qu'on nous refuse. Je la crois diverse
mais fondée sur un amour commun d'un territoire, d'une langue, d'une
culture, d'un destin partagé. Pour le ressentir, encore faut-il en
avoir une conscience minimum et cette conscience s'est étiolée à
mesure que se développait l'urbanisation laquelle connut à partir
des années 50 du siècle dernier une expansion spectaculaire faisant
passer les ruraux de près de 50% à 18% en 2006. Le développement
des populations périurbaines depuis la fin des années 70 n'y change
rien dans la mesure où celles-ci ne font que transporter un mode de
vie urbain au sein de campagnes situées à une distance raisonnable
des centres urbains. Il n'y a pas à proprement parler de
ré-enracinement.
Or rien ne ressemble davantage à une
ville d'Europe qu'une autre ville d'Europe. Mis à part des centres
historiques qui, quand ils existent et présentent un certain
intérêt, perdent de plus en plus leur rôle commercial au profit
du tourisme, on retrouve dans chaque unité urbaine, les mêmes
barres d'immeubles, les mêmes zones pavillonnaires, les mêmes zones
commerciales, les mêmes hôtels, les même chaînes de restauration,
les mêmes complexes cinématographiques, les mêmes médiathèques,
etc. Si, comme c'est le cas en France, on y ajoute la perte
progressive des accents locaux effacés par l'influence des media
audio-visuels, on obtient de plus en plus d'individus indifférenciés
propres à se transformer, en les poussant un peu, en MHI. D'autant
plus qu'à la différence du début de l'urbanisation de masse ou les
migrants de l'intérieur gardaient des liens très forts avec leur
terroir d'origine où demeurait encore une grande partie de leurs
proches, les urbains de 2e ou 3e génération n'en conservent que peu
ou pas du tout.
A l'aube du XIXe siècle les ruraux
représentaient 82% de la population française. Aujourd'hui il n'en
constituent plus que 18. Pourtant, c'est dans un XVIIIe siècle
essentiellement rural que la France connut l'apogée de son
rayonnement linguistique et culturel. L'élite européenne parlait
français. Les souverains s'arrachaient nos philosophes, nos arts
étaient florissants. Il faut croire qu'une élite citadine
restreinte produisait plus de richesse culturelle que les masses
urbanisées vaguement instruites d'aujourd'hui.
Mais une culture n'est pas le fait que
de l'élite. La France rurale avait ses cultures locales et diverses.
Chaque terroir avait sa manière de construire, son parler, variant
parfois d'un village à l'autre, ses traditions, ses fêtes, et aussi
une certaine stabilité sociale qu'on tendait à entretenir par des
mariages entre personnes socialement compatibles. Le XIXe siècle,
avec le développement des routes puis du chemin de fer vit s'établir
une spécialisation des activités agricoles en fonction des
capacités des sols et des reliefs sans que pour autant ne
disparaisse la polyculture. Cette France diverse ne se réunissait
pas moins autour de ses souverains et plus tard de la république et
cultivait le sentiment d'appartenance à une nation.
Le passé est le passé, regrettable
ou regretté, il ne reviendra pas. Si on veut éviter de se voir
transformé en MHI, il faut définir un nouveau socle à l'identité
française. Un début pourrait consister à éradiquer l'esprit de
repentance. Admettons que nos ancêtres aient, par le passé commis
des erreurs, voire des crimes. Est-ce à nous qui n'y sommes pour
rien de nous en excuser auprès de gens qui n'en ont pas été
victimes ? Et les leurs d'ancêtres, ils ont toujours été
blanc-bleu ? Exigeons-nous des descendants de ceux qui ont
bénéficié des progrès apportés par nos pères de nous en vouer
une éternelle reconnaissance ? En admettant cette question
réglée, on pourrait envisager de rétablir dans notre enseignement
l'étude de l'histoire de notre pays et de sa culture (littéraire,
musicale, architecturale, etc.) dont nous n'avons aucunement à
rougir. Il est au moins aussi important de savoir d'où on vient que
où on veut ou peut aller. Il se peut même que la connaissance du
passé permette d'envisager plus clairement l'avenir et de l'inscrire
dans une continuité plutôt que dans d'insensées ruptures comme
certains tendent à le faire aujourd'hui.
Sans une profonde régénération des
mentalités, nous ne pourrons que sombrer dans le multiculturalisme,
le communautarisme et les graves troubles qu'ils ne manquent
d'engendrer. Une nation ne peut survivre et prospérer qu'en
assimilant les allogènes qui la rejoignent tout en limitant leur
nombre. Comment pourrait-on espérer assimiler qui que ce soit à une
culture et une histoire qui ne serait qu'un long chapelet
d'aberrations, d'erreurs et de crimes commis précisément contre
ceux qu'on dit vouloir accueillir ? A une nation présentée
aujourd'hui même comme porteuse de haine à leur égard ? On
s'assimile à ce qui est riche, sain, conquérant et prometteur.
Jamais à ce qui apparaît comme décadent, moribond et confit de
remords. Une nation en proie à de tels vices ne saurait inspirer au
mieux que le mépris, au pire que la haine. Je crains que nous n'en
soyons là.
Sans un profond et majeur sursaut
culturel, il me semble que la France, pays magnifique, construit et
maintenu au fil de nombreux siècles et d'inénarrables vicissitudes
ne sera bientôt plus qu'un territoire où viendront de plus en plus
s'entasser des gens venus d'ailleurs pour qui elle ne sera qu'un lieu
de vie, qui en ignoreront tout, y introduiront des cultures
antagonistes et qui bien vite sombrera dans la pauvreté, la violence
et finalement l'oubli.
Ce n'est pas le destin que je lui
souhaite.