Amateurs de truismes, bonjour !
Si l’on en croit certains, la civilisation occidentale (si
tant est que ce terme soit approprié vu qu’on est toujours à la fois l’occident
et l’orient d’autrui) serait vieillissante voire moribonde. Ce que recouvre ce terme
est assez flou. Grosso-modo, il s’agirait d’un ensemble de valeurs
principalement fondées sur le christianisme, d’un mode de vie inspiré de ces
valeurs qui a émergé, fleuri puis essaimé dans le monde entier. Cette
civilisation, du fait des avances techniques qu’elle a su acquérir au fil des
siècles a pu soumettre à sa puissance la quasi-totalité du monde
lors de l’avant dernier siècle. De ce fait, certains aspects de son mode de vie
se sont vus adoptés par les peuples de la terre entière.
En dehors des leucémies et des lymphomes, le cancer est la
prolifération anarchique d’une cellule qui ensuite dissémine des cellules
anormales vers d’autres organes où se créent de nouvelles tumeurs nommées
métastases. Si on veut, par métaphore, faire de l’Occident le cancer de l’humanité,
il a établi des métastases plus ou moins similaires aux USA, au Canada, en Australie,
en Argentine, au Chili, en Nouvelle-Zélande, au Brésil, etc. qui attestent du
côté universel de sa prolifération. Si on ne prend en compte que les innovations
technologiques qu’ont su développer ce cancer et ses métastases, on peut considérer
que l’ensemble de l’humanité a été infectée (à un degré plus ou moins aigu) vu
qu’en dehors de quelques fondamentalistes rares sont ceux qui n’aspirent pas à
en bénéficier, voire à les copier ou à les améliorer.
Cela dit, ce fameux Occident, en dehors de l’exportation de la
démocratie et de sa technologie, a renoncé à se montrer conquérant. Comme un vieil
ogre vainqueur, incapable de digérer ses conquêtes, il est victime d’une phénoménale
gueule de bois qui entraîne culpabilité, remords et perte de confiance en soi. Il est en proie à une délectation morose qui l’amène
à douter de tout et à aspirer à expier l’interminable kyrielle de ses fautes
passées en oubliant ce qu’il a fait de bon.
Cette mélancolie pourrait s’avérer fatale, accélérer son inéluctable fin. Car toute civilisation,
comme tout être, évolue au point de
devenir méconnaissable avant de disparaître. Ce qui ne disparaît jamais, c’est
ses apports. Ceux-ci connaissent des éclipses d’une plus ou moins grande durée.
La civilisation grecque a disparu en tant que telle mais ce qu’elle a su
apporter dans les domaines de la philosophie, des mathématiques, de la culture
en général, nous a permis d’aller plus loin en en éliminant certains aspects
inadaptés aux données nouvelles.
Pas plus que pour un humain la certitude de sa fin ne
saurait justifier le suicide d’une civilisation. Ce qui m’ennuie dans l’environnement
idéologique d’aujourd’hui c’est l’appel constant au renoncement à soi et l’incitation
à précipiter sa propre fin. Notre civilisation est vieillissante, certes, mais
la vieillesse n’implique ni la lamentation sur ses erreurs, ses bonheurs passés
ou sa force déclinante ni le désespoir face à un avenir qu’on sait réduit.
Comme un humain, l’Occident, s’il sait qu’il va mourir n’a aucune raison de se
laisser aller ni de cesser d’assumer ce qu’il fut et sera encore.